Riche Agglo, pauvre Douaisis

Le dernier rapport de la Cour Régionale des Comptes sur Douaisis Agglo vient de sortir.
Les Douaisinologues ne pouvaient l’ignorer en dépit, soyons honnêtes, de l’impression de paresse que les auteurs nous laissent après lecture.

Cette critique ne découle pas d’un oubli de l’important sujet des chaises musicales du Conseil, ni même de celui des savoureux bricolages du pont du « village » mais de la faible envergure des sujets contrôlés.

Les juges indiquent entre autres qu’ils ne se sont intéressés qu’au budget principal, les annexes étant foisonnantes à Douaisis Agglo. De fait, plus de 30% ont donc échappé à leur regard.
Retenons la martingale. Il ne faut pas hésiter à multiplier les budgets annexes où s’applique une grande « diversité des instructions comptables » laquelle peut pousser les contrôleurs à passer leur chemin.

Mais ne soyons pas trop critiques. On trouve, en cherchant bien, au cœur de ce maquis bâclé, des petites choses utiles et, même au final, une idée assez nette de l’objet de Douaisis Agglo, lequel n’est peut être pas là où on le croit habituellement.

On a des sous, c’est qu’on a la santé

D’emblée, il faut le dire, y’a de la fraîche dans la caisse, donc pas de déficit dans un budget qui profite, comme prévu, du remplacement de la taxe d’habitation par la part de TVA que tout le peuple paie sans le savoir.

Bref, on a de la ressource, du blé, des pépettes, de l’oseille, du jonc, de la tune, pour faire plein de trucs « structurants » pour parler comme Christian Poiret, notre président au carré.
Il s’en félicite souvent, indiquant que cette abondance prouve que les « finances sont saines » , expression qui ne veut rien dire en elle même.

Un budget, c’est un truc relatif.
Il pourrait découler d’emprunts toxiques alliés à de lourdes ponctions fiscales avec, au final, des projets déficitaires ne débouchant sur aucune amélioration de la situation du territoire.
Les comptes seraient bons mais il n’y aurait rien de sain là dedans.

Les recettes d’investissement où on dépasse tout le monde sont d’abord celles de l’emprunt pour Douaisis Agglo.
On notera la puissance dunkerquoise

Les maigres nourrissent les gros

Quoi qu’il en soit, la Cour considère les recettes de Douaisis Agglo comme « dynamiques » du fait d’un certain nombre de facteurs favorables cumulés, d’abord la fiscalité locale (47% du total avec, of course, des taux qui montent) mais surtout les compensations et péréquations nationales qui ont doublé entre 2018 et 2022 (de 7 à 14 millions d’€).
On en arrive à se demander comment un territoire qui perd du populo et où augmentent chômage et pauvreté peut accoucher d’un budget communautaire aussi grassouillet.

Douaisis Agglo, c’est un îlot de prospérité dans un océan de misère.

Petit comparatif des ponctions fiscales des EPCI locaux.

Tout augmente, surtout le PPI

Grâce à ses larges ponctions, la CAD a donc pu augmenter ses « charges de gestion » (+31%, de 25 à 33 M d’€), lesquelles sont liées aux choix de gouvernance de nos maîtres agglomérés.
D’abord la gratuité des bus dont le coût est passé de 5 M d’€ à 7,7 M d’€, puis la hausse des recrutements de personnels (+20%, on compte à présent 150 ETPT) et enfin, même si la masse reste faible en affichage, la comm’ au sens large, montée de 3 M d’€ à 6 M d’€… Une paille…

Toute cette machinerie financière a pour finalité prioritaire le célèbre « PPI » , soit le « plan pluriannuel d’investissement » qui présente, entre autres, les projets salvateurs qui vont nous tomber dessus jusqu’en 2026.
Pour plus de la moitié de la dépense (77,8 M€), les juges nous indiquent la destination de la manne : « la patinoire et, dans le cadre d’EuraDouai, la passerelle ferroviaire, le parking silo et le musée du livre d’art et de l’estampe » .

Plein de sous dans la caisse mais on emprunte quand même

Ces investissements dépendent des fonds de roulement (le blé dans les caisses) et de l’emprunt (la tune qu’on va chercher chez les banquiers).
En théorie, quand le premier est abondant, on n’a pas besoin de recourir à la seconde. C’est pourtant ce que fait Douaisis Agglo, dont les fonds de roulement débordent.
Cette pratique est peu appréciée : « un tel niveau de trésorerie ne se justifie que s’il est utilisé dans le cadre du financement d’un investissement, ce à quoi une stratégie de mobilisation anticipée d’emprunt ne répond pas. A défaut, l’EPCI sur-mobilise l’emprunt » .

De fait, l’agglo y a beaucoup eu recours depuis 2020 : 9 M d’€, 10 M d’€ en 2021 et enfin 40 M d’€ en 2022. Dans ce dernier cas, il parait que c’est pour pour assurer le rachat, en 2026, du terrain où sera la célébrissime usine de batteries chinoises qui va sauver le monde (1000 postes soit 1% de l’emploi du Douaisis).

Logiquement, ces emprunts cumulés de 59 M d’€ font passer l’encours de la dette à 111 m d’€ (+ 35% en 4 ans), ce qui mathématiquement dégrade la capacité d’autofinancement (CAF) et la durée de désendettement qui grimpe de 4 ans à 8 ans.

Grands projets contre petits équipements communaux

Le rapport est surtout le moyen pour la Cour des Comptes de pointer les insuffisances de la communauté d’agglomération quant à l’intégration de son fonctionnement et de ses ressources.

Pédagogue, elle explique le subtil concept « d’intérêt communautaire » , « ligne de partage » entre ce que fait l’agglomération et ce qui reste dans les communes. On comprendra que cette question est centrale dans l’évolution de notre territoire.

Ainsi, concernant les compétences obligatoires et surtout « supplémentaires » , on regrette l’absence d’un plan local d’urbanisme intercommunal – il aurait été refusé par les communes sans qu’on nous dise lesquelles – qui résume le développement économique à la seule gestion des parcs d’activité et l’invention de « grands projets » .

Pour ces derniers, les juges se contentent de rapporter les arguments de l’EPCI « qui les considère comme structurants et d’intérêt stratégique pour le territoire » en soulignant leur défaut majeur : leur concurrence avec les équipements communaux, « notamment les piscines ou les activités de loisirs » .
Elle ajoute même que la « communauté d’agglomération (devrait) appréhender les investissements sur ces équipements à l’échelle du territoire » .

Addition de différences = faible intégration territoriale

Dans les compétences obligatoires, on trouve l’eau et l’assainissement dont le rapport pointe l’allucinante hétérogénéité des tarifications.
Même bricolage du côté des déchets ménagers. On relève les 35 taux différents d’une TOEM qui devait obligatoirement être unique en… 2015.
Savourons la conclusion de ce chapitre : « l’harmonisation en cours, dont il est prévu qu’elle s’achève en 2035, s’avère donc irrégulière alors même que le produit de la TOEM est insuffisant pour couvrir les charges de gestion du service » .

Quant aux ponctions financières, la Cour expose l’intérêt du « coefficient d’intégration fiscale » (CIF) qui donne la hauteur du degré de communautarisation des ressources. Plus il est élevé et plus la fiscalité est globalisée à cette échelle.
Il est chez nous de 40%, plus bas que chez nos voisins et amis : « ce constat illustre le faible niveau d’intégration de Douaisis agglo et confirme celui effectué sur les actions et la gouvernance de l’EPCI.
Il traduit également le choix des élus d’exercer prioritairement leurs compétences à l’échelon communal » .

© CRC 2024

L’intérêt communautaire, c’est celui de la commune

Il faut, de fait, voir le fonctionnement de Douaisis Agglo comme celui de l’Union Européenne.
Les membres abondent un budget commun, lequel est redistribué des gros vers les petits, les premiers donnant plus que ce qu’ils reçoivent.
La ville de Douai, par exemple, est un « contributeur net »
comme l’Allemagne ou la France à Bruxelles.

Ce mécanisme passe par « d’importants reversements de fiscalité à ses communes membres : 58% de la fiscalité levée contre 41% » dans les Hauts de France.

Avec les « attributions de compensation » , les communes donnent largement d’une main ce qu’elle reprennent d’une autre. Le total de ces neutralisations n’est pas mince : 30 M d’€ environ chaque année.

Avec la « dotation de solidarité communautaire » , la célèbre « DSC » , on entre dans une complexité organisée dont on va s’épargner le détail.
Gardons toutefois que l’habileté agglomérée joue ici à plein par des modalités qui évitent de soumettre à des règles jugées trop « complexes » .
Ainsi le cadeau insigne de la « part 11 » qui attribue à toutes les communes une « dotation minimale de 80 000 € » .

Outre que cet apport n’a pas à être discuté en conseil municipal, il a de fait remplacé les « fonds de concours » pour, selon les juges, « ne plus avoir à mettre les dispositions de l’article L 5216-5 du CGCT » , en particulier son titre VI qui prévoit que leur montant « ne peut excéder la part du financement assurée, hors subventions, par le bénéficiaire du fonds de concours » .

Avec un tel cadeau, il ne faut pas s’étonner que les petits soient les plus fervents soutiens du patron. N’entrant pas dans ces considérations politiciennes, les juges prennent de la hauteur : « en conclusion, l’organisation de la solidarité communautaire au plan financier apparait complexe et manque de clarté » .

Pour naviguer heureux, décidons cachés

A plusieurs reprises, on pointe l’insuffisance qui constitue la marque profonde de Douaisis Agglo sur à peu près tout : l’inexistence d’une stratégie générale et l’indigence des informations délivrées aux conseillers sinon à la population.

Ainsi l’absence d’un « pacte de gouvernance » qui n’a pas donné lieu à un « débat en 2020 privant ainsi ses membres d’une réflexion sur le projet communautaire et sa mise en œuvre » .
Mieux, dans la forêt des lois qui depuis 1983 font évoluer à bas bruits les EPCI, il existe depuis 2014 l’obligation d’un « projet de territoire » .
Après de pénibles discussions avortées en 2016, on a remis la machine en route en 2021, laquelle a accouché en octobre 2023 d’un « projet d’agglomération – Horizon 2035 » dont la Cour indique qu’il vaut « projet de territoire » , même s’il est impossible à trouver quelque part.

Encore une fois, on a sorti le carnet de chèques en sollicitant un cabinet de conseil lequel a pondu « une feuille de route stratégique » avec trois objectifs qu’on espère n’avoir pas été payés trop chers tant ils sont innovants : « l’attractivité du territoire » (sans blague) puis « l’amélioration du bien-être des habitants » (par les boules et le patin) et surtout le dogme religieux pour lequel il faut sacrifier sous peine d’excommunication : « la lutte contre le changement climatique » (ah ! Climat ! Que de crimes on commet en ton nom !).

La Cour a, malgré ces nuages de fumée, tout compris : « sa mise en œuvre effective dépendra, en définitive, du pilotage et du suivi – à l’aide d’objectifs et d’indicateurs opérationnels – assurés par les instances intercommunales » .
On peut toujours rêver…

Une délégation en forme de régie

Pour finir, nos juges ont plongé dans les comptes de Sourcéane, on dira peu de cet « affermage » , passé en 2023 « d’Espace Récréa » à « Vert Marine » , prestataire qui hérite aussi de la future patinoire.

Toute délégation fonctionne pour son détenteur sur l’acceptation de « ses risques et périls » . Ces deux aléas ont été largement effacés par des conditions financières très avantageuses.
On en arrive à se demander s’il ne s’agit pas d’une régie qui ne dit pas son nom. Le rapport « recettes commerciales/compensations » est de 70/30 pour Sourcéane, il sera de 50/50 pour la patinoire.
On rembourse même la redevance d’occupation du domaine public à l’euro près en contradiction formelle avec la loi.

Variable pourtant essentielle pour équilibrer les comptes, la tarification n’entre d’ailleurs pas dans la liste des obligations du délégataire.
Ce serait pourtant utile quand on observe que les prévisions de fréquentation (qui relève à 63% du seul Douaisis avec une bonne part de la cité des Epis) sont toujours surestimées.

La Cour indique de plus que les rapports du délégataire apparaissent peu lisibles, lequel a même, à partir de 2019, changé leur présentation, histoire de compliquer un peu plus la lecture.
Dans la même veine, l’information de l’assemblée délibérante est restée partielle, les dits rapports n’étant présentés qu’en 2021 et 2022, pour une piscine ouverte en 2016…

Le nouveau contrat avec Vert Marine aurait été l’occasion d’améliorer tout ça. Malheureusement, outre que l’examen des avantages et inconvénients du nouveau prestataire a été réalisé sans « aucune analyse chiffrée » , ces éléments n’ont pas été « communiqués au conseil communautaire » .

La demande de la CRC est de renégocier un contrat plus précis et un peu mieux à la charge du prestataire.

On a hâte de voir ça et surtout si les élus seront associés à ces obligations.

A quoi sert une communauté d’agglomération ?

Pour conclure, résumons l’intérêt premier de ce rapport : démontrer que notre bel établissement public de coopération intercommunale ne fonctionne pas vraiment comme il le devrait.

Ainsi, Douaisis Agglo collecte 200 millions d’€ en faisant le pari qu’à son échelle les effets seront massifs. L’évolution des compétences des entités territoriales construit une force de frappe favorisant la plus-value de l’action publique.

Or, dans le Douaisis, c’est l’inverse : le système fonctionne à l’avantage des communes – toutes sauf Douai – sans aucun plan d’ensemble, ni beaucoup d’informations aux élus et au peuple.

C’est très malin au plan tactique mais très bête au plan stratégique car qui peut croire, comme le montrent les équilibres financiers catastrophiques d’une piscine ou d’une patinoire, que de « grands projets » déficitaires puissent améliorer l’économie du Douaisis ?

Comme toujours, deux explications possibles.

Soit une pauvreté théorique qui confine les patrons majoritaires dans une vision de faible envergure, avec des redistributions financières organisées sous une logique de guichet.

Soit une priorité, qui n’est pas celle de l’efficacité de l’action communautaire mais le maintien, à coups de distributions amicales, d’un pouvoir dont le seul objectif est de durer.

Qui sait ?

Alléluia !

Impossible de rester silencieux devant les nouvelles qui parviennent de Waziers : Laurent Desmons a été réélu dimanche soir, alléluia !

Il a triomphé de la malédiction lambresque après une campagne plutôt digne, dans un combat compliqué à tous les points de vue.
Si une triangulaire donne ses chances à tout le monde, par définition, rien n’est jamais sûr…

Regardons cela de plus près

D’abord, il faut se méfier des conclusions hâtives. Quand on ne dispose que des grandes masses de résultats, la répartition interne est toujours inconnue.

Un résultat en hausse peut s’expliquer par une arrivée d’abstentionnistes du tour précédent (la participation est passée de 47,5 % à 52,61 %), d’un glissement d’un candidat à un autre, bref, de toutes sortes de déterminations qui échappent parfois à la logique. Les proportions ne peuvent qu’être hypothétiques.

Une chose certaine, Laurent Desmons a gagné 226 voix entre le 1er et le 2° tour, clé de son succès. Il a devancé au final Jacques Michon par 1102 voix contre 952, lequel avait dépassé les objectifs du plan quinquennal, obtenant 952 voix contre 834 (+ 118).
Il est facile d’en déduire que les gains de ces deux-là proviennent des abstentionnistes mais surtout des défections de la liste Poulain qui a perdu 72 voix. La tendance est probable mais la prudence doit être de mise, ce n’est jamais si simple.

Quelques enseignements

Ce qui est avéré en revanche, c’est que la liste du maire sortant a été soutenue par un groupe de Waziérois plus nombreux que les autres pris séparément.
Parions que cette victoire sonne le glas d’un communisme municipal qui rejoint enfin la conclusion nationale d’une idéologie aussi dépassée que dévoyée.

Autre enseignement, on n’est plus dans l’instant Covid qui a largement perturbé les logiques politiques locales, même si Waziers a été une des rares cités nordistes à donner la victoire au challenger d’un sortant en 2020.
L’état d’esprit des électeurs qui ont opiné cette fois-ci n’était pas le même. Gageons, après trois ans d’exercice, que le socle électoral du gagnant est à présent plus ferme.

Dernier point à relever, l’impossibilité dans laquelle les listes Poulain-Michon se sont trouvées de fusionner entre les deux tours et qui a certainement joué dans le résultat final.
Aurait-il été différent si ces deux opposants s’étaient retrouvés ensemble contre Laurent Desmons ? Gardons cette question ouverte et observons la suite…

L’avenir Via Waziers

On a vu apparaitre, dès la proclamation des résultats, l’argument d’une « majorité » constituée par les perdants. 1509 suffrages n’ont effectivement pas voté pour le sortant (952 : Michon et 552 : Poulain).
Pour autant, il faut se persuader que les haines ont le même avantage que la laideur : elles durent. Si on s’était entendu pour faire tomber le maire, on se déteste trop pour que cela puisse aller plus loin. L’avenir le dira.

Outre ce qui précède, dans ces élections – ainsi celles du Sénat en termes de sièges – seul le résultat compte. « The winner takes it all » comme dirait l’autre puisque les sortants disposent à présent d’une majorité absolue au conseil municipal avec 21 sièges sur 29.

Bien que minoritaire en son sein (3 + 5 = 8 < 21), il est certain que le « coup de blues » passé, l’opposition va tenter de prospérer dans des « luttes » qui seront autant de sujets absurdes, en forme d’autobus en panne ou de piscine ruinée.
Que Laurent Desmons se rassure. Il sort de l’épreuve renforcé, avec une liste plus homogène au sein de laquelle le risque de la dissension est faible. Au fond, ce qui vient de se passer, c’est une bonne vieille purge. Il ne l’a pas voulue mais elle ne lui apporte que des avantages.

Autre avancée stratégique, il gagne sur un autre terrain, celui de la communauté d’agglomération, sortant du scrutin avec deux sièges sur trois.
Douaisis Agglo est un machin connu pour ses nombreux travers. L’arrivée du maire de Waziers va légèrement faire bouger les lignes. C’est toujours ça de pris.

Quelques conseils d’amis

En douaisinologues et voisins, osons quelques remarques dont on ne doute pas qu’elles soient déjà dans les plans municipaux.

D’emblée, il faut profiter de l’état de grâce qui suit toute victoire pour solder le dossier piscine. L’arbitrage est simple. Une rénovation est-elle à la portée du budget communal ? Probablement pas.
Le recours à Sourcéane dans une agglomération aux transports gratuits parait une alternative de bon aloi. Tout le monde abonde le budget de Douaisis Agglo, il n’y a aucune raison que Waziers n’en profite pas.

L’assainissement financier, amorcé, va se poursuivre. Lui seul donnera des marges de manœuvre à la commune, c’est à dire des moyens de sortir du marasme par des projets apportant de la plus-value.
L’objectif est connu : il est vital d’apporter à la ville, qui en a tant perdu depuis des décennies, de nouveaux habitants.

De ce côté justement, il parait indispensable de s’occuper de ceux du quartier Notre-Dame où le maire sortant ne parait pas être beaucoup apprécié.
Quand on connait son histoire mouvementée – qui explique en partie l’effondrement démographique de Waziers – il y a là un gisement politique de grande ampleur qui peut intéresser le destin municipal.

En conclusion, bien joué pour Laurent Desmons et surtout bravo aux Waziérois qui, comme les grands d’autrefois, ont préféré les promesses du futur aux malédictions du passé.

Après Lambres, Waziers…

Nouvelle qui aiguise l’intérêt des douaisinologues : Waziers va rejouer les élections municipales après la démission d’une partie du conseil jeudi dernier.

Les bisbilles internes, ininterrompues depuis la victoire de Laurent Desmons, entrent à présent dans une phase plus concrète qui n’est pas sans rappeler nos affaires lambresques.

Les ressorts de l’évènement sont les mêmes avec ses trahisons, ses bas intérêts personnels et l’envie d’être calife à la place du calife.

L’entrée sera-t-elle suffisamment grande pour qu’y passent tous les candidats ?

Dynamo de Moscou contre USM Waziers

Toutes les coteries créées au sein du conseil se sont alliées pour démissionner en bloc. Il ne reste donc plus au maire suffisamment de conseillers pour faire tourner la machine.
Les électeurs vont revenir aux urnes dans un délai trois mois maximum, ce qui nous mène début mars. On verra d’ailleurs si le record de rapidité lambresque – 50 jours – sera à cette occasion battu.

Il y en a un qui doit se frotter les mains. Non pas notre ami habituel, encore que, mais le dinosaure communiste qui n’a jamais digéré une défaite qui l’a plongé dans l’opposition après vingt ans de règne sans partage.

A 75 ans et des brouettes, Jacques Michon sera à la tête d’une liste de reconquête. Il va sauver la ville, c’est sûr et certain, comme il l’a sauvée avant. Son intérêt se confond d’ailleurs avec elle.

Le Communisme municipal adore la pauvreté

Waziers, c’est la ville pauvre de la banlieue de Douai, presque l’inverse de Lambres sur pas mal de plans. Il suffit de se plonger dans sa fiche INSEE pour mesurer l’effet de ses cent ans de gestion communiste sur sa santé.

Plus que partout ailleurs dans le territoire, la perte démographique est vertigineuse après le point haut de 1968. Comptant alors 11000 habitants, Waziers en accueille aujourd’hui à peine 7000.
Les marqueurs de pauvreté sont sévères, ainsi la part de la population sans aucun diplôme (34%) qui renvoie à son importante proportion inactive ou au chômage, respectivement 35% et 27%.

Waziers, c’était la ville des mineurs dont toute la vie, de la naissance à la mort, tournait autour du charbon et du marxisme tendance stal.
On se souvient – rare instant historique de la cité – du discours fleuve de Maurice Thorez, enfant de Noyelles-Godault, venu défendre en juillet 1945 la « bataille du charbon » au nom du gouvernement d’alors.

Ah ! C’était le bon temps ! L’avenir vers… La Gauche

Un dinosaure marxiste trompe énormément

Évidemment, depuis, l’eau a coulé sous les ponts de la Scarpe. L’érosion de cette idéologie d’un autre âge a réduit inexorablement l’audience des camarades waziérois.
On se demande même comment ils ont réussi à se maintenir à la tête de la municipalité jusqu’en 2020, frôlant régulièrement l’échec à quelques dizaines de voix près.

On comprend dès lors l’exploit de Laurent Desmons quand il a terrassé Jacques Michon mais surtout « l’appareil » militant mis à son service.

Si on en juge par l’agressivité oppositionnelle du maire déchu depuis cette date, ce dernier n’avait pas très bien encaissé l’affront qu’avaient osé lui faire les électeurs.
Il est né trente ans trop tard, l’ami Michon. C’était quand même plus pratique le parti unique à candidat unique au nom de la dictature du prolétariat.

Rien n’étaient d’ailleurs plus risibles que ses appels, depuis la défaite, à la « démocratie » toujours malmenée par son rival évidemment méchamment « autoritaire » .
On avait aussi la dénonciation de son « clientélisme » , ce qui ne manque pas d’intérêt quand on examine son lourd passé de maire.

Le mystère Bänsch

Rappelons les mésaventures de son premier adjoint, héritier annoncé, Steve Bänsch, débarqué fin 2017 pour des motivations obscures.
Comme toujours avec les Communistes, il faut, dans toute décision, en chercher la « vraie raison » .
Il ne serait pas impossible que le vieux maire accroché à sa rente ait été inquiet de l’ombre que lui faisait ce jeune militant aussi actif qu’apprécié dans la commune.

Cette éviction a été un des facteurs de l’échec du sortant quand on analyse les résultats du premier tour des dernières municipales. En effet, si Laurent Desmons avec 881 voix (36%) était arrivé devant Jacques Michon et ses 823 voix (34%), le jeune Bänsch avait cartonné avec 703 voix (29%).

Le deuxième tour, réalisé après le confinement, avait réservé des surprises. D’abord, l’abandon de la liste Bänsch qui pouvait se maintenir mais ne l’a pas fait, appelant du bout des lèvres au « changement » .
Signe que les électeurs le voulaient, le changement, le taux de participation était passé de 49% à 53%, donnant la mairie à Laurent Desmons avec 1514 voix (57%) tandis que le sortant se ramassait avec ses 1113 bulletins (43%).

Les « luttes » c’est bon pour la fraction oppositionnelle

Depuis les dernières élections, Steve Bänsch s’est reconverti dans la communication de la mairie d’Auby, évolution professionnelle plutôt symbolique quand on pense au plantage bienvenu de M. K.

Les sujets de dispute au sein du conseil de Waziers ressemblent à ceux qui avaient déchiré celui de Lambres. Toute tentative d’économie budgétaire a été, dès 2020, ressentie dans cette ville comme une trahison.
Sans doute la rareté des contribuables dans la commune font croire à ces opposants que « l’argent public est gratuit » .

La fermeture de la piscine à bout de souffle qui coûtait un bras a, entre autres, cristallisé ce sentiment facile. Une « lutte » fructueuse pour Jacques Michon qui, si on en croit ses hurlements, voyait la jeunesse waziéroise condamnée aux pires sévices par absence de bains.

La piscine de Waziers… Bon, ce n’est pas Sourcéane, on en conviendra…
© La Voix du Nord

Même punition avec la situation du Centre Social Henri Martel, chasse gardée de syndicalistes qui se confondaient avec les partisans du maire déchu. Laurent Desmons avait bien du mal à remettre cette machine à but politique dans son objet social originel.

Un manoir normand ? Un local syndical ? Un centre social ? On vous laisse deviner.

Waziers de droite ou de gauche ?

Les pronostics électoraux apparaissent aussi difficiles à faire qu’à Lambres. Waziers est une ville incontestablement de gauche, traversée par les extrêmes selon des déterminations qui échappent à toute logique.

Déjà un truc curieux, le rapport électeurs inscrits/habitants. Si Douai et Sin le Noble, les deux grosses voisines, tournent autour de 40% des habitants portés sur les listes, ce taux est de 70% à Waziers.

Les législatives de juin 2022, dernier point de repère, ont permis au camarade Bruneel (PCF) de ramasser dans la commune 1036 voix (57%) contre 767 (43%) au sieur Marchio (RN) qui a toutefois remporté la 16° circonscription.
La faiblesse du taux de participation démontre que dans cette commune, l’abstention massive valorise la mobilisation des clans familiaux communistes.

Les présidentielles étaient encore plus singulières.
Au premier tour, le candidat du Parti Communiste n’a pas brillé, pourtant régional de l’étape puisqu’il était l’ancien attaché parlementaire du député de la 16° du Nord, Jean-Jacques Candelier.
En dépit ou à cause de tous ces avantages, Fabien Roussel a réalisé un tout petit 6% (203 voix…) dans cette commune donnée pourtant par les médias comme un bastion du PCF.

Quoi qu’il en soit, au second tour, avec une participation passée de 67% à 60%, c’est Marine Le Pen qui, à Waziers, a ramassé la mise, obtenant 1736 voix (58%) contre 1257 pour Emmanuel Macron (42%).
Le gars du Touquet contre la dame d’Hénin, tout un programme… On imagine le dilemme pour les Waziérois

Waziers va-t-il redevenir marxiste tendance groucho ?

A quelle sauce, donc, va être mangé Laurent Desmons ? Difficile à dire.

Visiblement, les oppositions se sont rapprochées depuis les élections de 2020 et les lâchages successifs au sein du conseil, sur le principe bien connu des « ennemis des ennemis qui sont mes amis » .
La démission collective des conseillers a été concertée entre ces gens là, tous ligués contre le maire.

En dépit de cet arrangement, on doute que Jacques Michon puisse mettre sur sa liste ses opposants d’hier, Ophélie Poulain et surtout Karim Bachiri, lequel n’était pas un grand ami de l’ancien maire quand celui-ci était aux manettes.

Compte-rendu du conseil du 30 octobre 2014, avec le père Michon, c’était la bonne ambiance….

Il est certain qu’on va rejouer, une décennie plus tard, le match de 2014 où Jacques Michon avait affronté au premier tour deux listes concurrentes.
Leur fusion – cette fois-ci à l’évidence exclue – les avait amenés à perdre de moins de cent voix… sur 3280 votants…

On s’achemine donc, très probablement, vers une bonne vieille triangulaire qui risque fort d’infliger aux Waziérois le retour en mairie du dinosaure communiste qui les a si bien gérés dans le passé.

Le camarade Michon devrait d’ailleurs se retourner pour contempler son œuvre.
Après ses deux décennies de pouvoir, son bilan fait peur, d’abord quant à cette misère si utile qu’on en arrive à croire qu’elle ne doit surtout pas disparaitre.

En ce combat douteux, un conseil à Laurent Desmons dont les efforts pour sortir Waziers du marasme ne peuvent qu’être salués : bien choisir ses colistiers avant de décrocher la victoire.

On lui souhaite les deux…

Quand le chat n’est plus là, il est là quand même

A Lauwin-Planque, des chats disparaissent, retrouvés mystérieusement morts dans les jardins de la ville.
La maire, Sonia Vallet, réagit en adoptant le vocabulaire de Christian Poiret, son illustre prédécesseur.
L’imitation est la recette du succès  : « c’est très triste pour les chats. On ne va pas lâcher, on va faire la lumière là-dessus. On aura le fin mot, j’en suis sûre » .

Empoisonnement par des voisins ne supportant pas le vagabondage des félidés sur leurs plates-bandes ? Épidémie de COVID animal ? Manque de vigilance des maîtres ? La municipalité se perd en conjectures.

Le patron ne peut plus cumuler

Décidément, il s’en passe des choses à Lauwin-Planque. Il y a, certes, l’inquiétante disparition des chats, mais aussi, sujet pour les douaisinologues, diverses péripéties qui agitent le conseil municipal et, au delà, un « village » qui bruisse de mille rumeurs.

Du temps du président au carré, guidé d’une main de fer, tout ce monde là marchait d’un seul pas, obéissant au doigt et à l’œil.
Malheureusement, la loi sur le cumul est passée par là. Il a bien fallu se séparer du mandat de trop.

Conseiller départemental, président dudit département du Nord – un des plus gros de France – président de Douaisis agglo, Christian Poiret a donc été contraint de se dessaisir de son boulot de maire, clé de toutes les responsabilités qui précèdent.

Dynastie ou compétences ?

Cela dit, pas folle la guêpe. D’abord, Christian Poiret a un peu trainé à décider, jouant des délais de la procédure lancée par Frédéric Chéreau après les élections cantonales.
En février 2023, huit mois après le scrutin, il a passé la main, restant toutefois conseiller municipal de la liste unique qui dirige le « village » depuis… 1995.

Le démissionnaire avait la ressource, comme dans toute république bananière, de placer son fils à la tête de la cité.
Qu’il ait eu des scrupules à adopter un principe monarchique qui préfère l’hérédité à la compétence ou que l’intéressé ait décliné l’offre, il est difficile de trancher. Fabien Poiret sera toutefois premier adjoint, on ne sait jamais.

Pour faire moderne, le président a opté pour une solution qui n’est pas sans rappeler sa binôme cantonale : placer une femme à la tête de la mairie.
On se doute ici que ni la compétence, ni l’hérédité ne jouent mais, à Lauwin-Planque, les désirs du patron, même démissionnaire, sont des ordres.

C’est ainsi que Sonia Vallet a été nommée maire.

L’affaire ne s’est pas passée simplement. Lauwin-Planque, c’est l’illusion démocratique qui se fracasse sur le réel.

Le premier adjoint, Bernard Barelle, pensait ainsi succéder au patron comme l’espèrent tous les brillants seconds. Il est vrai qu’il avait assuré l’intérim après la prise du département par Christian Poiret. Son moment était enfin venu.

Cette ambition n’entrait pas du tout dans les projets du patron. Pour les imposer, un despote sait se draper dans le voile de la démocratie, laquelle devait – bien contrôlée – soutenir la parité homme-femme.
Pas de bol, lors du vote « interne » organisé en septembre 2022, c’est le premier adjoint qui est sorti vainqueur. Pas de très loin (10 contre 8 voix) mais le gagnant c’était lui.

Christian Poiret a semblé dans un premier temps accepter la sanction populaire. Mais très vite, réalisant le danger d’un Lauwin-Planque dirigé par un autre, le patron a su démontrer une fois de plus qu’il était prêt à ne « rien lâcher » quant à son maintien par procuration à la tête du « village » .

Révolte des « Vigilants »

D’où le 20 février 2022, l’élection en bonne et due forme du premier magistrat de la commune.
Ce fut, selon la VDN, un « scrutin à la Koh Lanta » puisque qu’on a découvert à la fin du dépouillement – devant le ban et l’arrière-ban des parrains locaux – la victoire de la dame désignée par Christian Poiret… à une voix de majorité.

Cette élection à l’arrache a évidemment laissé des traces.

La liste unique de 2020, qui entre temps a perdu deux conseillers démissionnaires, s’est alors coupée en deux.
Deux clans s’opposent à 12 contre 5. Le quintet d’opposition, intitulé « Vigilance » , annonce bien le programme.

En juin dernier, les élections sénatoriales ont été l’occasion d’un nouveau conflit, lié à l’imprudence de deux conseillers qui ont osé le vote nul dans la désignation des délégués.
Cette audace a déclenché un pataquès dont seules les communes du Nord ont le secret, mélange d’impréparation, de méconnaissance des règles légales et de foirage dès que le patron absolu n’est plus là.

La normalisation est en route

Il est vrai que 3 délégués contre 2 pour les « Vigilants » minoritaires, ça la posait mal pour le maître du département du Nord.
Quand on pense qu’il sponsorisait en plus la liste du père Watebled qui devait ramasser la mise sénatoriale, c’était gênant.

En dépit du secret du vote, les services de renseignements lauwinois ont vite repéré les déviationnistes.
Les deux adjoints concernés se sont vus retirer leurs délégations à la vitesse de la lumière, ainsi Xavier Halut et Florence Thuillier qui avaient peut être montré, après l’élection de Sonia Vallet, le bout d’une oreille un peu trop neutre.

On se doute que « La lettre lauwinoise » © aurait bien aimé éviter l’étalement dans ses colonnes de la fronde qui déchire le « village » mais comment faire ?

Cette normalisation au nom du salut du parti unique lauwinois n’a pas empêché une dernière péripétie lors du conseil municipal du 27 septembre dernier. Sonia Vallet, opportunément « souffrante » , s’est bien gardée de le présider.

Ce furent donc le fils et le père qui s’en chargèrent, pour ce dernier pas qu’un peu.

La « bonne humeur » casse l’ambiance

Une association récemment créée, « Bonne humeur et détente » , a osé lors de la séance réclamer une subvention à la commune.
Fabien Poiret (le fils) ne savait pas trop quoi faire comme souvent mais Christian Poiret (le père) savait, lui.

D’abord la proximité de cette association avec les Vigilants lesquels, par ailleurs, se confondaient ignominieusement avec les bénévoles qui avaient déserté en décembre le célèbre marché de Noël du patron.
Comme l’aurait dit l’autre, « la demande était modeste mais les demandeurs ne l’étaient pas » .

Ce fut d’ailleurs, avec un refus catégorique du boss, l’occasion pour ce dernier, président au carré – conseiller municipal – maire putatif, d’exposer sa philosophie d’une association subventionnée.
Elle ne doit jamais « tirer » sur celui qui la nourrit mais surtout ne doit « pas faire de politique » . Ah oui, d’accord, mais si la « politique » de l’association soutient la collectivité locale qui paie, alors là c’est bon ?

On peut supposer que oui.

Si dans le Nord l’égalité et l’équité commandaient l’octroi de la manne, ça se saurait… © La Lettre Lauwinoise

Pour finir, on admire le courage de ces mutins qui ont levé l’étendard de la révolte au cœur même du « village » .
Quand on connait la vindicte qui vaut à tout déviant, soit la « damnatio memoriae » , soit la disparition, dans un périmètre de 100 bornes, du moindre appui matériel ou humain, ces citoyens méritent des éloges.

Car ils ont mis au jour, s’il le fallait encore, des pratiques politiques qui n’améliorent pas l’image du Douaisis.

Pensons à la mesquinerie insigne d’une intervention, dans une affaire à 500 balles, du président d’un conseil départemental qui gère un budget de 4 milliards d’euros.

Mesquinerie probablement provoquée par la trouille qui doit saisir l’intéressé quant à un « village » échappant à son contrôle. Selon la théorie bien connue des dominos, la fin des mandats pourrait apparaitre à l’horizon.

Mesquinerie, surtout, découlant d’une toute puissance qui lui permet de tout faire et même n’importe quoi. Pourquoi se gênerait-il ? Les limites sont franchies depuis longtemps.

A ce niveau, on s’interroge ainsi sur l’utilité d’une loi sur le cumul des mandats.

On se souvient, à ce titre, de la prédiction du regretté Guy Carcassonne, sur le risque de maintenir un maire démissionnaire dans son conseil municipal : « dans un tel système, se développerait la pratique du contournement par lequel un élu confierait la municipalité à un prête-nom, tout en continuant à agir comme son véritable patron. Ni la démocratie ni l’efficacité n’ont rien à y gagner » .

Depuis, la loi sur le cumul a pourtant permis cette absurde possibilité. Quand on voit la situation de Lauwin-Planque, le parlement aurait mieux fait d’écouter les experts…

Quand on sauve le « Mirabeau » avec nos sous

Alors là, on atteint des sommets dans le cynisme aggloméré quant à la solution miracle que vient de sortir de son bonnet notre parrain bien-aimé.
Voilà que Douaisis Agglo met la main au porte monnaie pour sauver « l’hôtel Mirabeau » , imposante verrue immobilière en plein centre de Douai dont l’apparence actuelle atteste de la bonne santé du territoire.

Nous avions à plusieurs reprises abordé le devenir de ce monument historique en déshérence, dès avril 2019 et, quatre ans plus tard, ici pour une visite improvisée qui donnait une idée des désastres qui peuvent parfois découler d’un projet mal conçu.

On va le faire… avec de l’argent public

A plusieurs reprises, Christian Poiret a botté en touche quand on lui mettait cet échec personnel devant les yeux.

Le propos lénifiant as usual était « que ça se fera un jour ou l’autre » mais comme le contraire commençait à se voir, pour éviter d’affaiblir la réputation d’omniscience de notre maître à tous, il fallait quand même bouger.

Nous y voilà.

Pour résumer, la communauté d’agglomération a voté cette semaine une délibération qui garantit l’emprunt de 12 millions d’euros pris par l’opérateur constructeur aménageur société hôtelière « Financière Vauban » qui, outre de posséder le bâtiment, devait débuter l’opération en… 2013.

Le plus risible était le lâche soulagement des « opposants » macroniens et socialos lesquels comme des gogos ont applaudi la manœuvre. On pense à la formule de Machiavel : « La férocité de ce spectacle fit le peuple demeurer en même temps content et stupide » .

Ce « peuple » aurait été en effet plus inspiré de soulever tout ce qui débloque dans cette décision, non pas dans sa légalité, avérée quoique bizarre, mais dans tout ce qui entoure depuis le début – et qui le sera jusqu’à la fin – cette affaire aussi honteuse qu’extravagante.

Résumons, jeu des 7 erreurs, les ratés successifs des génies qui président aux destinées du Douaisis quant à la maîtrise du projet :

1ère erreur

La première, la plus évidente, a été l’abandon – non motivé – du projet initial défini par Jacques Vernier. L’épure était bien avancée, les architectes, dont on espère qu’ils ont été payés, s’étaient mis au boulot. L’opération, prudente, était bien dimensionnée.

Invention du gouvernement d’alors, le concept était celui d’un partenariat public privé (P.P.P.), entre le propriétaire hospitalier du bâtiment et le groupe « Rabot Dutilleul » , entreprise centenaire et nordiste, sise à Wasquehal, dont le sérieux comme la surface financière n’avaient pas, à l’époque comme maintenant, à être démontrés.

Mais arrivant aux manettes de la « pompe à phynances » que constituait feue la « CAD » , notre président n’a pas trouvé mieux que de liquider ce projet pour en faire un autre, évidemment plus grand et plus beau.

Dix ans plus tard… Rien… Mais il n’y est pour rien…

Douaisis agglo du rififi à Palerme plage - @Tampographe sardon

2ème erreur

Adepte bien connu de la « régie » qui transforme régulièrement la communauté d’agglomération en entreprise immobilière, Christian Poiret a d’abord acheté l’hôpital général en 2012 pour 3,8 millions d’euros.

Acquis par de l’argent public, ce bien a été vendu l’année suivante pour 2,5 millions à la « Financière Vauban », holding basée à Tournai pour en faire un hôtel de luxe, ajouté à une opération de vente d’appartements défiscalisés.

On glosera longtemps sur la bonne affaire réalisée par le promoteur, Xavier Lucas, puisqu’il a obtenu un rabais de plus d’un millionLes contribuables un peu moins. Ils ont payé de leur poche la différence de prix.

A ce stade, la question est celle ci : pourquoi la Financière Vauban n’a t’elle pas acheté directement le bâtiment aux précédents propriétaires ? Cette manip’ était-elle une subvention masquée ?

Pas de panique, nous ne le saurons jamais.

3° erreur

C’est là qu’on s’interroge sur le choix de ce promoteur. Pourquoi lui ?

En France comme ailleurs, ils ne sont jamais bien vus. Certains dénoncent ces bétonnages qui sont autant d’artificialisations démoniaques détruisant la planète.
Plus dangereuses que le bobard qui précède, ces opérations, aux confins du fric et de la politique, ont parfois débouché sur le pire du pire, non sans éclabousser tous les constructeurs, même les plus vertueux.

Le flamboyant patron de la Financière Vauban est un Janus bifrons.
Pour quelques uns, il est le sauveur de vieux bâtiments dont personne ne veut mais, pour d’autres, un entrepreneur qui ne s’embarrasse pas de détails comme le montrent les conflits qui parsèment son parcours.

Ses opérations sont souvent fragiles, assaillies de problèmes, avec le risque en bout de course du naufrage définitif.
Le Royal Hainaut de Valenciennes, parti avec un budget de 40 millions d’euros, s’est conclu par le double, après pas mal de frayeurs, sans doute excessives puisque ces travaux ont abouti.

Pourquoi ?

Parce que Xavier Lucas est un malin qui lie son destin à celui des pauvres élus qui portent un toast au cocktail « monument historique-opération géniale » .
Comme il leur est impossiblepar la loid’abandonner un bâtiment classé, la variable d’ajustement sera la remise au pot du côté des collectivités locales, pot sans fond comme nous le savons tous.

4° erreur

D’où cette garantie décidée par le conseil d’agglomération, enfin par son président, c’est à dire le soutien par une autorité publique d’un emprunt contracté par une entreprise privée.
Pour l’instant rien ne sort de la poche de Douaisis Agglo qui ne sera sollicitée qu’en cas de défaut de l’opérateur mais cette délibération amène pas mal de questions.

D’abord le montant annoncé – 12 millions d’euros – qui parait bien léger quand on considère le projet du Hainaut dont le coût a été six fois plus important. On peut faire le pari que notre « Mirabeau » n’en sera pas loin.
Il s’agit donc d’une garantie pour faire levier auprès des banques sur un emprunt beaucoup plus gros ou, mieux, un signal donné à ces dernières pour les persuader que, quoi qu’il arrive, l’argent public viendra à la rescousse.

Notons que ce chantier, qui aurait du commencer en 2013, n’a de fait jamais débuté, hors le « curage » des menuiseries (question subsidiaire, où sont donc passées les espagnolettes bicentenaires et les ouvrants encore en état ?).

Si le promoteur en est, comme un ami impécunieux, à demander une garantie à ses potes pour démarrer des travaux après une décennie d’attente, on peut se poser des questions sur la confiance que lui portent les banquiers.

5° erreur

La loi prévoit, par plusieurs articles du CGCT, la possibilité pour un EPCI de garantir un emprunt à charge pour lui, comme déjà dit, en cas de défaillance, de payer à la place du débiteur les annuités du prêt.

Ces décisions sont très encadrées pour éviter toutes les dérives que les élus pourraient commettre dès qu’on leur lâche la bride.
D’abord, elles ne doivent concerner que des emprunts et rien d’autre (pas de lignes de trésorerie etc.) mais surtout la quotité maximale est fixée à 50%, chiffre que Douaisis Agglo a allégrement atteint.

Il lui aurait été possible de faire moins, par prudence, mais non. La formule martiale du patron, lors du vote communautaire, sent le gars qui croit sortir du fric de sa poche : « quand on a quelque chose dans la tête, on y arrive toujours quand on veut » .
Oui, très bien, c’est un guerrier courageux, mais c’est fastoche avec des fonds publics et c’est en plus pour un projet foireux

Enfin, on n’ose relever la possible contradiction entre cette garantie de prêt et l’interdiction votée par le parlement en 1988 de le faire pour des entreprises en difficulté.
On ne doute pas que notre Douaisis Agglo, comme les représentants de l’État dont c’est le rôle, ont vérifié la bonne santé du sauveur de l’hôpital général et qu’ils vérifieront la réalité de ses obligations auprès des prêteurs.

On espère aussi qu’une convention a prévu toutes ces choses pour, en cas de problème, permettre à nos élus visionnaires de parer à toute éventualité.

6° erreur

Notre président au carré a pris à plusieurs reprises, comme preuve de la future réussite du « Mirabeau tout beau » , l’exemple du Royal-Hainaut de Valenciennes.

Or rien n’est semblable entre les deux projets à plusieurs titres : le bâti lui même, la configuration des immeubles, l’emprise etc. Seul le point de départ est commun : des Ehpad à bout de souffle dans des monuments historiques dégradés.
Après, tout est différent. Ainsi, entre autres, l’installation des bureaux de la communauté d’agglomération de Valenciennes-Métropole dans les ailes, présence publique qui a évidemment soulagé les finances de l’opérateur.

Ce dernier a réalisé dans la douleur le Royal-Hainaut, non sans mettre ses ressources en péril. De ce point de vue, la chance du Valenciennois c’est qu’il est passé avant le « Mirabeau » douaisien. Ce qui est fait n’est plus à faire et ce qui n’est pas fait reste à faire.

Pour autant, la viabilité de cet hôtel « de luxe » , dont les charges apparaissent importantes, doit être examinée sur le long terme. On aimerait connaitre son taux de remplissage moyen depuis l’ouverture…
Il est situé au sein d’un territoire qui n’est pas la Côte d’Azur ou Paris, même si le Hainaut sait mieux que Douaisis tirer son épingle du jeu sur à peu près tous les tableaux.

7° erreur

D’où la dernière erreur. Quel sera – si d’aventure il sort un jour de terre – l’équilibre financier du Mirabeau ? On nous jette au visage un projet dont les seuls détails sont le « luxe » , ses « 62 chambres » et ses « 118 appartements » mis en vente.

Ces présentations qui se copient les unes sur les autres se gardent bien d’interroger au fond le concept du machin. Quel plan marketing ? Quel équilibre général ? Quelles retombées pour le propriétaire ? Le gestionnaire ? Le territoire ?

Douai et le Douaisis peuvent-ils être le lieu du luxe et du farniente ? Verra-t-on des Ferrari et autres Porsche côtoyant les voiturettes sans permis et les bus gratuits à la sortie de St Jean ?
Pour quelle raison des touristes à gros revenu dépenseraient-ils de fortes sommes pour leur hébergement dans une ville et un territoire à l’attractivité manifestement faible ? Pour aller jouer aux boules ou faire du patin ?

On ne soulève même pas la possibilité d’une saturation de l’offre par rapport à la demande, notamment avec la création annoncée à La Clochette d’un nouvel hôtel dont on a un peu de mal à comprendre l’utilité.

Conclusion

Cette affaire est probablement l’une des plus symbolique de cet aventurisme qui est la marque de notre territoire quand il s’agit d’un « grand projet » qui doit enrayer d’un coup de baguette magique son irrémédiable déclin.

On nous sert à chaque fois ces solutions absurdes en forme de tramway ou de TVME gavées d’argent public et auxquelles personne ne trouve rien à redire, ni même simplement, ici ou là, réclamer des précisions quant à leur intérêt réel.

Mais plus certainement, s’agissant de cette garantie d’emprunt – dix ans de rien en toute impunité – le plus dingue est la pirouette géniale qui transforme l’auteur du désastre en sauveur par la sollicitation – par lui même ! – de l’argent public.

Chapeau l’artiste !

La liste qui fait pchitt!

Il convient de dire quelques mots des sénatoriales puisque nous avions, voilà quelques mois, analysé la candidature de notre voisin sinois Christophe Dumont. Le Douaisis sera-t-il représenté au Sénat cette fois-ci ?

Et bien non… comme prévu.

Qui s’y intéresse ?

On remarque d’emblée que cette élection, hors le microcosme des élus, mobilise peu, l’opinion ayant compris l’intérêt limité d’une « chambre haute » qui fonctionne en circuit fermé.
Si on avait demandé à l’homme de la rue, dimanche dernier, s’il était au courant qu’au même moment s’exerçait à côté de lui cette importante expression démocratique, il serait resté coi.

Ses opérations sont originales. On a les isoloirs, les bulletins, des listes, des campagnes, les chikayas qui vont bien etc. mais au final seuls les « grands électeurs » s’expriment. Ils étaient 5806 cette fois-ci, sur un corps électoral qui pèse 1,8 million de personnes (0,3% du tout).

Il faudrait faire des électeurs des « grands électeurs » , l’abstention disparaitrait !

Lors du vote à la préfecture du Nord, ce monde de privilégiés était ravi d’approcher pour une fois les ors de la République. Ce n’était pas, certes, Versailles, mais combien de conseillers municipaux se croyaient déjà au palais du Luxembourg.

Résumons.
Lille se taille comme toujours la part du lion avec plus de la moitié des sénateurs élus.
Sur les 11 du département, 6 retrouvent leur siège et tout ce qui va avec. On a 5 nouveaux dont quelques uns ne sont pas pour autant des béjaunes en politique, loin de là.

Les duos reconduits sauf…

La logique du précédent scrutin est respectée, notamment du côté des couples émanant des partis nationaux.

On a ainsi le PS qui réussit, grâce à son poids dans les grandes villes et d’abord Lille, à conserver ses deux sièges, en dépit de la candidature dissidente de Martine Filleul.
Sénatrice sortante, la déconfiture de sa liste rebelle en dit long sur le crédit dont elle jouissait dans son camp.

Même exploit du côté du Parti Communiste. Contre toute attente, malgré la perte régulière de municipalités, nos dinosaures marxistes parviennent à conserver leurs deux sinécures.
Il faut voir là l’effet de la célèbre discipline de « l’appareil » . Chaque délégué était conscient de l’enjeu vital de conserver au parti, alors qu’il ne représente plus grand chose, quelques strapontins au Sénat.

Plus rigolo, la double victoire de l’UDI par deux listes, la dissidente et l’officielle. Cette dernière était menée par Olivier Henno qui a divagué, tout au long de sa carrière d’élu professionnel, de partis en partis (CDS, UDF, Mouvement démocrate) pour finir par bénéficier enfin d’une certification centriste.
Son concurrent en rupture de ban, ci-devant maire de Potelle (400 habitants), Guislain Cambier, a réussi à être élu avec en filigrane la même étiquette. Nul doute que ces deux là vont se rabibocher pour défendre les couleurs de l’UDI.

Retenons la martingale. Cette dissidence a habilement permis à ce parti de s’affranchir des règles de la parité. Il a deux hommes pour le représenter, ce qui aurait été impossible avec une liste unique.

Mais quel est donc ce parti dont tout le monde se revendique ? « Divers droite » , c’est quoi ce truc ?

Rien ne montre mieux l’absurdité de ce mode de scrutin quand on compare les résultats du 1er tour des présidentielles de 2022 avec ceux ci-dessus : RN 29% > 7,6% – PS 1% > 14,2% – Macron 26% > 5% – LR 3% > 8% …

les LR qui se dispersent façon puzzle

Les Républicains n’ont pas brillé. Si Daubresse sauve sa peau, sa solitude atteste d’une existence de plus en plus fantomatique des LR du Nord.
Tout démontre que ses délégués se sont dispersés entre les macronistes, accommodés à la sauce philippienne – alias Horizons – la liste départementalo-poiretienne et le Rassemblement National.

Dans le genre plantage plus radical que les LR, notons l’effondrement des Insoumis locaux dont le cavalier seul, au nom de la révolution permanente, prolétaire et verdâtre, s’est avéré un échec cuisant avec 91 petites voix.

Plus amusante encore est la disparition d’un autre élu professionnel de haute volée, Frédéric Marchand, qui n’a pas réussi, au nom d’un macronisme qui laboure de plus en plus la mer, à sauver son siège.
On sent bien qu’il aurait aimé, en regardant l’horizon, enfourcher un cheval qui l’aurait ramené au Sénat mais il y avait déjà quelqu’un dessus.

L’heureux cavalier, Franck Dhersin, ressemble beaucoup au précédent en termes de profil. C’est lui aussi un professionnel de la politique dont les changements d’écuries ont été suffisamment habiles pour lui permettre de sauter de mandat en mandat, UDF, UMP et maintenant « Horizons » . C’est un métier, on vous dit.

Cette victoire est une prémisse. Amusons nous à repérer les ambitions douaisiennes et autres qui vont se construire sur le génie havrais que les médias vont nous vendre en prévision des présidentielles.

Après Macron, voilà Édouard Philippe, l’homme des Gilets Jaunes, du 80 km/h et du désastre covidien…

Quelques gagnants ?

Impossible, évidemment, de passer sous silence la victoire du Rassemblement National, parti, c’est le cas de le dire, avec un peu plus d’une centaine de voix probables pour choper au final les 433 suffrages qui lui donnent un siège.
Comme déjà dit, les reports LR du fond de l’isoloir apparaissent évidents. Ils prouvent, après l’électorat qui a réalisé dans les faits « l’union des droites » , que la piétaille des conseils municipaux, notamment ruraux, commence à faire de même.

Beaucoup de commentateurs exaltent la supposée victoire de la liste menée par le fameux Dany Wattebled – sobrement intitulée « le Nord au Sénat » – parce qu’elle est arrivée en tête avec 889 voix.
Cette notion pour un scrutin de liste a peu de sens. Ce qui compte au final, c’est le nombre de sièges obtenus. Certes, elle en a eu deux mais comme le PCF, l’UDI et le PS.
Notons que ce dernier, c’est lui le vainqueur, prouve la solidité de ses racines SFIO ancestrales quand il abandonne le gauchisme. Sans Martine Filleul, il aurait largement dépassé le millier de voix et obtenu un 3° siège.

De ce point de vue, la « liste apolitique nordiste de défense des intérêts personnels » n’a pas été la machine de guerre qui devait renverser la table. Deux sièges seulement en dépit du soutien massif d’un certain nombre de parrains.
Ces derniers, mis ensemble, font sourire quand on cherche leur commun dénominateur. Jugez plutôt : le président départementalo-aggloméré, Christian Poiret, le patron de la MEL, Damien Castelain, le boss du Valenciennois, Laurent Degallaix et enfin le père Decool qui certes passait la main mais qui connait du monde.

Cette liste devait rafler tous les sièges avec ce qui précède mais surtout un style de campagne si particulier qu’il en a même fait les honneurs de la VDN.
Si on a bien compris, la république bananière du Nord a manié avec finesse le « big stick » des subventions et autres arguments de poids vers les récalcitrants.
Dans notre pauvre Douaisis, bien rares sont ceux qui ont osé défier ces puissants. C’est sans doute dommage, un 7° plan « divers droite » aurait peut être été gagnant.

On peut in fine s’interroger sur l’intérêt d’avoir au Sénat des sénateurs « apolitiques » à l’horizon aussi restreint. Bon d’accord, on exporte le concept du MENID au Palais du Luxembourg mais que pèseront concrètement ces deux élus ?

Pour conclure

Reste enfin une interrogation sur la dispersion curieuse d’élus régionaux sur tant de listes. On en arrive à se demander à quoi correspond la majorité dirigée par Xavier Bertrand.
Un esprit positif dira qu’il n’a pas mis tous ses œufs dans le même panier et que, super malin, il protège l’avenir.
Un esprit chagrin comme le notre pense au contraire que ça prouve une impuissance à contrôler la baraque, indication sur la capacité future à conduire le pays.

Pour conclure tout à fait, il est certes un peu triste que Christophe Dumont n’ait pas obtenu le siège rêvé et que le Douaisis reste une fois de plus absent des problématiques sénatoriales.
Mais pas de panique, Dany Wattebled nous défendra peut être…

C’est quand qu’on fusionne ?

Les affaires lambresques ont éveillé dans le groupe des experts bénévoles de Douai Vox un intérêt pour un sujet souvent évoqué en France : le regroupement des communes en entités plus grosses.
La fusion de Douaisis Agglo ne manquerait pas d’intérêt si elle était réalisée à son échelle.

Regardons cela de plus près.

La folle exception française

Quand les Constituants de 1790 ont décidé de transformer les paroisses millénaires en communes, ils ne se doutaient pas que cette décision aboutirait aujourd’hui à un excès numérique qui constitue une singularité mondiale.

Nos petits 15% de la population de l’UE correspondent, avec 34955 communes, à 40% des entités municipales européennes. Encore mieux. Sur ce total 2500 communes comptent moins de 100 habitants, sachant même que 17000 ne dépassent pas la barre des 500.

Regardons nos voisins plus malins : la Belgique les a divisées par cinq en dix ans, l’Allemagne par trois depuis plus longtemps encore. Pragmatique comme toujours, le Royaume-Uni les a regroupées voilà des lustres. Ses 545 « districts » comptent en moyenne 100 000 habitants chacun.

L’histoire a légué à la Flandre une densité humaine particulièrement forte, ce qui explique que les 646 communes du Nord soient si populeuses. Certaines, notamment dans l’Avesnois et le Cambrésis, sont certes de très petite taille – Dehéries compte 38 habitants – mais la majorité affiche une démographie largement supérieure.

C’est le cas du Douaisis dont les 35 communes sont plutôt grosses. Si Roucourt, la plus petite, pèse 500 administrés, l’ensemble est plutôt au dessus du millier, sachant que Douai avec ses 35 000 « vint’d’osier » représente un quart des 150000 habitants de la communauté d’agglomération.

Que des avantages

Il est facile de comprendre que le regroupement de ces entités en quelques unes possèderait beaucoup d’avantages.

Il y a le principe bien connu de « l’union fait la force » . Se mettre à plusieurs donne l’avantage du nombre pour se faire entendre au dessus, dans toutes les instances du genre départements, régions et même l’État.

Cette « abondance des peuples » , comme l’aurait dit Louis XIV, est la condition du respect. Dans notre inextricable maillage administratif, c’est le rapport de force qui prime et en aucun cas l’équité.
Que pèse une commune de 100 habitants (il en existe qui comptent une dizaine d’habitants) lorsqu’elle souhaite investir dans un projet ? A peu près rien.

Il y a aussi la capacité financière, plus forte avec 100 000 habitants que 100, sachant que l’État a aussi créé des subventions pour faciliter ces regroupements par diverses exemptions fiscales ou même, plus subtil, le maintien de la hauteur de ses financements.

Enfin, un grand territoire donne de la dimension au sens propre à tout aménagement spatial, aux investissements collectifs ou, encore mieux, à la gestion prospective à long terme.

Que des blocages

Comme ces regroupements sont rares, on subodore qu’il doit y avoir un truc qui coince. Voilà un précepte que les réformateurs de tous poils doivent avoir en tête : quand ça ne se fait pas, il y a des raisons pour ça.

D’abord le travers national de ne réformer qu’en cas de circonstances particulières : la révolution, la banqueroute ou la guerre. On peut les souhaiter ardemment mais ces conditions sont rarement réunies.
Napoléon a eu cette chance incroyable. La banqueroute de l’État a provoqué la Révolution qui a débouché sur la guerre. D’où l’œuvre impériale

Motivation plus concrète, ne rien changer arrange beaucoup de monde. C’est le cas de l’armée d’élus locaux – un demi-million de personnes – qui émargent aux frais des contribuables.
A la louche, la ponction représente de 1 à 2 milliards d’Euros annuels, peut être même le double. Ce n’est pas demain que tout ce populo va abandonner sa rémunération en soutenant une réduction des collectivités locales qui la ferait disparaitre.

Dernier blocage, sans doute le plus dirimant comme on dit, le clivage politique. Pensons à Douai qui est en délicatesse avec sa périphérie depuis des années. On n’est pas certain qu’il s’agisse d’une opposition gauche-droite même si ça y ressemble. Dans tous les cas ça bloque tout.

Il est effectivement impossible, dans ce genre de configuration, qu’un camp abandonne son pouvoir – et tout ce qui s’y attache – pour les céder à ses adversaires. C’est aussi simple que cela.

Une vieille idée démonétisée

Les facteurs qui précèdent expliquent l’échec de fusions dont le principe a pourtant été posé voilà plus de 50 ans. Le paradoxe, c’est que notre maillage administratif a vu depuis ses conditions de fonctionnement régulièrement modifiées mais sans aucune réduction de ses strates.

D’abord la réforme la plus importante, révolutionnaire, la loi de décentralisation de 1983, dite « de transfert de compétences » , qui aurait été, en profitant de l’expansion budgétaire du moment, l’occasion de regrouper les communes puis, dans la foulée, de simplifier le mille-feuilles. Il n’en a rien été.

De très nombreux textes ont ensuite suivi mais aucun n’égale l’ébouriffante « loi NOTRe » partie avec les objectifs qui précèdent – notamment supprimer le département – pour les oublier en route. Elle a même fini avec une strate de plus, ces « super-régions » qui n’ont aucune existence logique.

Les « super régions » issues de la loi NOTRe, alias Valls. On cherche vainement le respect des « pays » et des reliefs, tout en plaignant les gens de l’Aquitaine…

La France est habituée aux « réformes » qui ne changent rien, facilement acceptées.
Retenons toutefois les stratégies de contournement que l’État a quand même essayé d’imposer sur le dossier.
C’est un gagne-terrain qui avance millimètre par millimètre mais dont l’échelle du temps, comme l’Hôpital Général, est séculaire.

Ainsi, conservant le principe de la « fusion communale » , on y a récemment ajouté pour faire passer la pilule, le concept de « communes déléguées » qui, en s’associant, peuvent conserver mairie et conseil municipal. Avec une telle possibilité, on se demande ce qui subsiste de l’idée de départ.

Le futur sera la communauté d’agglomération

Il reste cependant un machin qui, en dépit du fait qu’il ajoute une strate de plus au maillage administratif, pourrait à peu de frais amorcer une sortie par le haut de ces tentatives qui sont autant d’échecs cuisants.

Pour tuer la commune ou le département, rien de plus efficace que de leur retirer des moyens financiers et des bouts de pouvoirs, c’est à dire des compétences. C’est assez limité pour le second mais très avancé pour la première.

C’est ainsi qu’il faut analyser la mise en place – obligatoire – des communautés de communes et d’agglomération, d’abord simple cadre prospectif (cf le SCoT) mais ensuite, par la grâce de nombreuses décisions, bénéficiaires de plus en plus de puissance comme le prouve la frénésie dépensière de notre Douaisis Agglo.

Sur le site de cette dernière, la liste de ses compétences fait sourire par son manque de hiérarchie.
Loisiparc est mis sur le même plan que le développement (séparé en durable, rural et économique, rien que ça) mais c’est de plus par un lien discret qu’on découvre les « autres compétences » qui sont loin d’être minces.
On y trouve par exemple les « infrastructures routières, fluviales ou ferroviaires » ou, mieux, « l’aménagement de l’espace communautaire » , une fois encore mélangés avec des bidules insignifiants ainsi la « capture des animaux errants » .

Faisons un rêve

Comme nous aimons nous amuser, allons dans le sens de ce qui précède en défendant la fusion communautaire pour tout ce qu’elle pourrait changer pour nous autres, pauvres administrés.

Quelle serait l’intérêt d’une communauté d’agglomération transformée en grande commune de 150000 habitants ?

Pas mal de choses – ainsi les compétences déjà attribuées citées plus haut – sont déjà en place et pas nécessairement pour notre bien. Quand viendra le moment des bilan financiers des éléphants blancs semés par notre président tout puissant, on s’en rendra compte.

Mais ne nous arrêtons pas à ces broutilles. Dépassons les. Prônons la fusion de toutes les communes du Douaisis en une seule entité. En poussant la logique jusqu’au bout, les conséquences seraient paradoxalement bénéfiques :

si la majorité actuelle se perpétue année après année c’est parce que le système de vote à deux tours favorise ce conglomérat d’intérêts et d’arrangements entre amis. Un vote globalisé donnerait enfin l’alternance.

découlerait de cette fusion un bien immédiat pour nos impôts : la réduction de l’armée d’élus locaux qui émargent au titre de mandats dont on se demande souvent quel en est l’effet sur le quotidien des habitants du Douaisis.

-Sans doute, l’objectif le plus utile de ce regroupement serait l’harmonisation des ponctions fiscales avec une taxe foncière, entre autres, identique sur tout le territoire, moyen évident pour stopper l’hémorragie démographique de la ville centre.

-Avec un budget globalisé sur le territoire, il y aurait une meilleure rationalisation de la dépense, à la fois par économies d’échelles mais tout autant par une meilleure perception des enjeux généraux donc des décisions prises.

-Ce dernier point permet d’évoquer le déficit démocratique d’un conseil communautaire aux ordres car livré aux décisions d’un seul. Ramenée dans ce lieu par la force du suffrage direct, la souveraineté locale disposerait enfin d’un espace de débat et de décision collective. Nous en serions sauvés !

Les élections municipales approchent à grands pas. On a hâte de connaître parmi les 6 ou 7 listes qui se disputeront à Douai les suffrages des électeurs, celles qui défendront cette option révolutionnaire.
Quant aux candidats des 34 autres communes du Douaisis, on peut douter, compte tenu des avantages offerts par la situation actuelle, qu’il y ait beaucoup de défenseurs de cette bonne idée qui n’est pas fausse.

Mais sait-on jamais ?

Le peuple a parlé

Comme nous avons beaucoup blablaté sur les élections municipales de Lambres, il convient d’en dire un mot après la parole du peuple.

Disons le tout net et même s’il étonne : le résultat est sans appel. Les votants de Madame Sanchez ont été deux fois plus nombreux que ceux de Monsieur Goulois.

Dont acte.

© La Voix du Nord

Comment expliquer l’échec de ce dernier ? Essayons de le décortiquer à la mode Voix du Nord en le considérant comme une répétition des futures échéances électorales du Douaisis, celles de 2026.

Mieux vaut dépenser que le contraire

Très certainement, la raison de la querelle a-t-elle joué fortement dans le débat. Toutes les économies budgétaires imposées pour réaliser un projet nébuleux d’isolation thermique des bâtiments communaux, pourtant légué par le grand maire inventeur du TVME, ont pesé lourd dans les décisions des électeurs.

Il est vrai que le message envoyé aux habitants n’était pas particulièrement attractif. Ce clivage était du genre asymétrique : il est toujours plus facile de défendre un retour de dépenses – dont des indemnités diverses – que le contraire.

C’est cool d’avoir un président² dans sa poche

Autre facteur positif probablement tout aussi puissant : la proximité de Madame Sanchez avec le président de la communauté d’agglomération qui se trouve être, en plus, le président du département, lequel, sans vergogne, s’est d’ailleurs invité dans le débat.

Dans notre région en forme de république bananière, ce type de proximité, irrésistible, est synonyme de subventions faciles et de traitement préférentiel.

Les électeurs adorent ça. Faut faire avec.

Ville de droite, résultat de droite

Par ailleurs, il ne faut pas exclure, même si ce type de détermination a tendance aujourd’hui à s’estomper, la force des positionnements politiques qui retrouvent leur logique naturelle quand c’est flou.

La liste sortante a tenté de rassembler toutes sortes d’origines, du Vert à l’apolitisme en passant par la gauche, dans une ville très clairement classée à droite.

Il est certain que les électeurs ont préféré désigner la candidate qu’on imagine du même bord que son patron – soit « conservateur » faute d’une meilleure définition – plutôt qu’un conglomérat inclassable.

Compétences et vertus ne valent pas succès

Quant à l’influence de l’équipe de la gagnante sur la population, tenons la pour nulle, à part un ou deux membres. L’examen attentif de la biographie de certains convainc que les déterminations électorales n’en dépendent en aucun cas.

De l’autre côté, cela démontre de la même façon que la personnalité de Bernard Goulois ne l’a sans doute pas aidé à gagner. On peut être honnête et opiniâtre mais ne pas attirer pour autant les suffrages et peut être même les faire fuir.

Voilà le premier enseignement que tous les futurs impétrants du Douaisis doivent méditer dans la perspective de 2026.

Par contre, naissance et amour, ça paie

Bernard Goulois n’a sans doute pas assez insisté sur ses origines pourtant locales, argument unique de son adversaire comme on peut le lire dans la VDN au cœur d’un article au titre qui tue et qui cherche vainement ce qui a attiré l’électeur, hors le critère de « Lambrésienne pure souche » .

Cette qualité, répétée ad nauseam, laisse songeur quand on considère la complexité de gestion d’une commune, même aussi petite que l’est Lambres.

On aurait pu espérer la mise en avant de compétences académiques, d’expérience professionnelle ou, mieux, d’un lourd passé d’élue, mais non, rien de tout cela : « Je suis née ici, j’ai grandi à la cité des Cheminots, je suis allée avec mes amis au Mille club avant qu’il devienne MJC (…) Je suis d’ici, j’aime ma ville, et c’est le cas de beaucoup dans notre équipe. »

Que les futurs candidats méditent cette deuxième leçon : pour gagner dans le Douaisis, il faut y naitre et aimer sa ville…

La campagne, très courte, a permis d’ailleurs à cette candidate – c’était très bien vu – d’éviter tout débat, toute explication, toute exposition d’une connaissance fine du pilotage d’une municipalité. L’avenir dira si la capacité de gestion fait partie du portefeuille de Madame Sanchez.

Après tout peut être.

On attend la Cour des Comptes

Pour conclure, cette dernière a très souvent fustigé la mauvaise gestion de l’équipe sortante à laquelle elle a appartenu pendant trois ans.
Elle a, après sa victoire, annoncé l’ouverture d’un « audit » susceptible de faire la lumière sur la situation financière de la commune.

Seuls les spécialistes des affaires comptables savent que ce type de contrôle ne s’exercera que sur l’équilibre général des comptes, lequel a été constamment assuré depuis l’élection de l’équipe sortante en 2020.

En revanche, on conseille à la nouvelle municipalité de voir plus loin.
Elle doit saisir la Cour Régionale des Comptes pour un examen approfondi de la décennie écoulée, du boulot mené – emprunts compris – non seulement par l’équipe sortante mais aussi et surtout sur celle qui l’a précédée.

C’est certainement à ce titre que les habitants de cette belle petite commune bourgeoise pourront être rassurés sur l’avenir pour lequel ils ont voté, hausse des dépenses et réduction du déficit budgétaire ainsi que Mme Sanchez s’est engagée à les assurer.

On prend date.

Senatus populusque duacus

Comme tous les Français, Douai n’a pas habituellement grand chose à faire des sénatoriales mais Christophe Dumont est candidat en septembre prochain, ce qui change tout.
Le maire de Sin le Noble a-t-il une chance d’être élu ? Voilà qui peut être intéressant à observer de près.

Un bon maire

En bons voisins, on ne peut en effet être indifférent à son destin. Tous les douaisinologues savent qu’il constitue à Douaisis Agglo, avec Jean-Luc Hallé, la garde rapprochée de Christian Poiret, le fameux « duo infernal » .

D’aucuns pensent même qu’il serait, plus que son alter ego d’Hamel (700 habitants, 40 ans de mandat), l’héritier du patron communautaire, sachant qu’il en est le 1er vice-président, titre connu pour les espérances qu’il donne à celui qui le détient.

Ses qualités éminentes se sont plutôt bien déployées dans sa commune depuis 2014 si on en juge par sa réélection magistrale en 2020. Peu de maires peuvent se vanter d’avoir terrassé leurs adversaires en un seul tour par 75% des voix.

On se souvient enfin de l’esprit de sacrifice dont Christophe Dumont a fait preuve aux départementales en faisant équipe avec une douaisienne exfiltrée de la capitale pour éviter au patron une concurrence dangereuse sur son canton. L’abstention massive explique sans doute l’échec du duo, à moins que cette alliance ait déplu aux électeurs.

Utilité relative du Sénat

On dira peu du Sénat souvent présenté avec des trémolos dans la voix comme le « Grand Conseil des Communes françaises » selon la célèbre formule de Gambetta.
C’est oublier son origine, qui est celle de la chambre des Lords britanniques, laquelle explique largement son statut de maison de retraite pour professionnels de la politique.

C’est surtout faire peu de cas de toutes les réformes que cette institution a empêchées, de l’impossibilité de réduire le nombre de communes au maintien absurde du département, en passant par un certain nombre de lois que ces vieux messieurs ont bloquées avant de plier devant l’assemblée nationale.

Pour finir, les citoyens seraient bien embêtés si on les interrogeait sur le rôle précis de ce machin ou, mieux, s’agissant des sénateurs du Nord, si on leur demandait d’énoncer leur nom, de dire de quels partis ils dépendent et enfin et surtout d’expliquer ce qu’ils ont réalisé durant leur si important – car lucratif – mandat.

Des changements inaperçus

Il y a eu ces dernières décennies des modifications de cette sinécure, parfois passées inaperçues. La durée du mandat est à présent de six ans au lieu de neuf auparavant. Le renouvellement des sièges ne se fait donc plus par tiers mais par moitié tous les trois ans. C’est ainsi que le Nord vote cette année.

L’élection, toujours au suffrage indirect, repose à 95% sur les choix des délégués que désignent les conseils municipaux mais là encore, quelques changements récents.
Si chaque conseiller municipal des villes de plus de 9000 habitants est à présent électeur, le bonus est encore plus net pour les communes de plus de 30000 habitants. Elles bénéficient en effet d’un délégué supplémentaire par tranche de 800 habitants au-delà de cette dernière limite.

Ces évolutions subreptices réduisent de fait le poids – autrefois excessif – des zones rurales dans la « chambre haute » .
Ce système est avantageux chez nous pour Tourcoing, Roubaix mais surtout Lille. Avec ses 240000 habitants qui sont un étonnant concentré de Socialistes, elle dispose avec ces derniers des Mohicans de 250 électeurs possibles sur les 6000 qui composent le corps électoral nordiste, ce qui n’est pas rien.

11 sénateurs dans le Nord

Le résultat de 2017 reflétait comme souvent les grosses étiquettes partisanes.
Les 6000 délégués, dont les votes sont répartis à la proportionnelle, avaient donné, grosso modo, pour le PS, LR, l’UDI et le PC deux sénateurs chacun.
Le reste s’était éparpillé façon puzzle
, à l’unité, sur des listes aux intitulés invraisemblables du genre « Les Élus locaux s’engagent » (ce n’était pas le cas ?) ou encore « La Voix des Communes et des Territoires » (Elle vient d’où sinon ?).
On croit comprendre qu’elles sont centristes.

Le résultat sera probablement dans le même genre cette année, nonobstant les changements de personnes, toujours possibles dans ces marigots asséchés que sont devenus les partis nordistes.

Sachant que le mode de scrutin est totalement corrélé aux résultats des municipales, regardons ce qui s’est passé en 2020.
Dans les villes de plus de 9000 habitants, la Gauche et la Droite ont perdu respectivement 3 et 4 communes.
Cela au bénéfice d’un gloubi-boulga centriste et « sans étiquette »
, la plupart du temps avec le même maire, ce dernier ayant simplement changé de marque commerciale.

Considérons ce phénomène comme un effet déstructurant du macronisme, lequel sera peut-être un élément d’incertitude, encore que la performance des adeptes du président actuel aux municipales est quand même restée limitée.

Un sénateur sinois ?

Christophe Dumont a-t-il une chance d’être élu ? Peut-être. On peut déjà noter que le Douaisis n’a jamais eu beaucoup de représentants au Sénat, hors, il n’y a pas si longtemps, le regretté Patrick Masclet, maire d’Arleux.
De ce point de vue, l’élection du patron de Sin le noble serait un rattrapage légitime, sachant que l’agglomération lilloise au sens large a été très représentée en 2017 (7 sur 11…).

Au delà de la géographie, la typologie des sénateurs du Nord démontre qu’il vaut mieux être l’élu d’une petite commune ou un personnage politique de second plan pour se retrouver au palais du Luxembourg.
On a, certes, deux anciens ministres parmi les actuels, ainsi Patrick Kanner ou Valérie Létard, mais la question de leur influence nationale peut être posée. D’ailleurs, si le premier persiste, la seconde passe la main pour 2023.

Sur ce critère, maire d’une cité de 15 000 habitants – peut être d’ailleurs un peu trop grosse – Christophe Dumont pourrait avoir une chance, sans parler de son positionnement politique, évidemment « indépendant » à la suite du célèbre Dany Wattebled qui a été élu sur ce critère en 2017.

Ces listes « apolitiques » sont celles qui peuvent apporter quelques surprises. Avec un ticket d’entrée à 400 voix par sénateur, il est toujours possible pour ces dernières de décrocher la timbale dans un scrutin où les arrangements entre amis participent au charme sénatorial.

Ce sera difficile

Pour le reste, un sénateur sinois parait peu probable, d’abord parce qu’il faut considérer le positionnement des candidats sur les listes.
Si on en croit les médias, Christophe Dumont sera en troisième position après Dany et Marie-Claire Lermytte. Pour cette dernière, il y a peut-être une stratégie tenant à sa mairie de Brouckerque où elle a succédé à Jean-Pierre Decool. Comme ce dernier ne se représente pas au Sénat, ses anciens soutiens pourraient se reporter sur cette liste.

C’est dire, pour Christophe Dumont, que la troisième place risque fort d’être comme la quatrième aux Jeux Olympiques : la pire de toutes. Il parait rien moins que possible qu’une liste « indépendante » puisse obtenir trois élus. C’était d’ailleurs, à la suite du sénateur Decool déjà cité, la position de Jean-Luc Hallé en 2017. Il n’est pas sénateur…

Ensuite, il y a les courants souterrains de ce comité électif qui représente 0,3% de la population du Nord. Si l’idée de donner des sénateurs ailleurs qu’à Lille peut jouer, l’audience du Douaisis dans les rapports de force parait bien limitée à l’inverse de Valenciennes ou de la côte dunkerquoise.
On pourrait bien sûr compter sur l’appui du président au carré – qui a donné le feu vert – mais il n’est pas certain que les délégués soient tous de ses partisans, loin de là. La logique d’une élection indirecte c’est qu’on y vote plus souvent « contre » que « pour » .

En conclusion

Pour finir, outre le positionnement du maire de Sin le Noble, as usual placé sous le prisme du « centrisme » , on peut se demander si les qualités de Christophe Dumont ne sont pas, en elles mêmes, un handicap.

La lecture attentive des biographies de ces sénateurs du Nord dévoile une sacrée liste d’apparatchiks ou de professionnels de la politique (le top, presqu’incroyable, Frédéric Marchand, macroniste avéré), de gens qui n’ont jamais exercé un vrai métier ou, quand ils en ont eu un, c’est si vieux que personne ne s’en souvient et même pas les intéressés.
Directeur administratif au musée de la mine de Lewarde, ce n’est pas le cas de Christophe Dumont. Il a un boulot, lui.

Mieux, on sait qu’il a succédé à Sin le Noble à un édile qui a été en délicatesse avec certaines règles légales. C’est curieusement – sans que cela n’aille jamais très loin, rassurons nous – le cas de certains de nos sénateurs.
Ainsi le Daubresse soupçonné de détournements de fonds publics, la Filleul condamnée pour « violation du statut protecteur du salarié » en contradiction d’une loi venant de son propre parti et enfin le Wattebled qui a vu refusés ses frais de campagne mais qui, péché véniel, n’a pas été frappé d’inéligibilité.

Christophe, que vas-tu faire dans cette galère ?

C’est plus Lambres, c’est Bakhmout !

Franchement, on les plaint les gens de Lambres. Bon, nous, à Douai, on est écrasés d’impôts pour qu’on soit pauvres mais Dieu merci on a jusqu’ici échappé au genre de guerre civile que traverse la cité voisine.
Depuis l’annonce des prochaines élections municipales, ça flingue et ça tape dans tous les sens. On se demande ce qui va émerger de ces ruines.

Tout le monde s’y met

Pour être franc, on ne sait plus trop quoi en penser, de cette affaire. On assiste à un combat de chiffres et de procès d’intention, masqué par une bonne dose de baratin.
L’ancien maire s’en mêle, comme le patron communautaire. On voit même des Douaisiens, pour des raisons obscures, jouer les utilités.
Pour filer la métaphore ukrainienne, sous ce camouflage, on prépare l’offensive sans trop regarder aux moyens puisqu’elle va tout régler.

Outre une audience impressionnante, notre précédent article a reçu pas mal de commentaires, dont certains assez agressifs, ce qui démontre de l’importance pour certains de retrouver leurs places mais surtout leur incapacité au débat. Raison de plus pour en rajouter une louche.

Si la vérité dérange, c’est une excellente raison pour continuer à la chercher.

Mais pourquoi maintenant ?

Déjà, ils sont quand même comiques, les cris de ces mutins décidés à faire de Bernard Goulois le responsable du conflit. Il paraissent oublier que leur opposition a été logiquement la raison de leur perte de mandat et de leurs indemnités.
Personne ne les obligeait à démissionner. Quand ils l’ont fait – action génératrice – c’était évidemment pour provoquer de nouvelles élections et, pour Caroline Sanchez, espérer prendre la place du maire.

On a du mal à comprendre, concernant cette dame, pourquoi elle ne l’a pas réclamée dès 2020, cette fameuse place. C’était facile, bardée comme elle est de mandats qui ne peuvent qu’attester d’éminentes compétences.
Nul doute qu’elle aurait été, comme le prouvent ses brillantes prises de parole, une mairesse d’élite, capable de vision stratégique et d’efficacité dans l’action.

Ce curieux assemblage d’opposition dénonce bruyamment aujourd’hui les deux déficits qu’il appréciait hier : le budgétaire et le démocratique.

On sera des grands gestionnaires

Pour les difficultés budgétaires, il faut d’abord préciser que la ruine financière est balancée par les factieux à la tête des futurs électeurs pour les faire flipper. C’est facile, personne n’y comprend rien et la peur n’arrange rien.

Diverses sources, en « open data » , permettent toutefois de connaitre les grandes masses du budget lambrésien depuis quelques années. Ce dernier n’est pas très gros, pas plus de 8 millions d’euros quand Douai en sort un qui pèse dix fois plus.

Principe souvent oublié à Lambres, cette petite cité ne peut avoir les moyens d’une grande.

Revient souvent dans cette campagne le concept ébouriffant de la « capacité de désendettement » , soit le nombre d’années que mettrait une ville à rembourser l’intégralité de sa dette si elle y allouait la totalité de ses excédents.

L’État considère qu’une durée de plus de douze ans doit déclencher une mise sous tutelle. Rassurons les Lambrésiens, cette mesure – même en cas d’endettement monstrueux, il en existe – est rarement appliquée. Des discussions aboutissent le plus souvent à des arrangements type consensus mou dont la France a le secret.
Par contre, si le budget avait été rejeté – ce qui était sans doute l’objectif des opposants – la ville y passait aussitôt.

A Lambres, comme partout ailleurs, on a toujours emprunté depuis des décennies, ce qui permet ici ou là de rééquilibrer les comptes, notamment sur la section investissement.
M. Vandewoestyne a recouru à cette option quasiment tous les ans pour des sommes relativement importantes. On repère trois « pics » : 2012, 2016 et 2019 avec, à chaque fois, un emprunt de 1,5 million d’euros.
Son successeur a fait de même en 2022 pour une somme légèrement inférieure. Ces quatre emprunts seront éteints respectivement en 2026, 2030, 2034 et 2037…

Des variations de la capacité d’endettement ont logiquement suivi ces apports. Ainsi en 2019 et 2022 deux « bourrelets » à 10 ans, qui ne sont pas 12 ni 13 ans. Pour le dernier, il s’est aplati à 5 ans l’année suivante. Lambres n’est pas ruinée et ne mourra pas…

On est des « démocrates »

Pour la « démocratie » , les guillemets sont évidemment des pincettes. Il faut interroger l’histoire et les pratiques locales.

Il n’est pas certain que M. Vandewoestyne ait été un forcené de la gestion participative et de l’autogestion municipale durant ses longs mandats. Selon des témoignages aussi concordants que récurrents, l’ancien édile se gardait bien de réclamer de ses colistiers leur autorisation pour agir, ce qui ne parait pas avoir posé le moindre problème.

Dans notre belle région, l’exigence de « démocratie » émane toujours de l’opposition, qu’elle soit interne ou externe, en aucun cas de la majorité. Quand tout le monde est d’accord pour laisser les patrons décider à leur guise, personne ne trouve à redire sur leur mode de gouvernement.
On fait confiance et cela d’autant plus qu’on est souvent incapable de déceler d’éventuels manquements. Si on l’est et qu’on en repère, le coût du dévoilement sera tel qu’il vaut mieux s’écraser.

De ce point de vue, ces appels à la « démocratie » venant de gens qui ont prospéré à l’ombre de Douaisis Agglo ne manquent pas de sel.
Glissons sur ce que prennent les opposants qui critiquent une décision géniale du Grand Président. Gardons en revanche, l’octroi à deux battus des urnes, à Douai et Auby, d’un siège de vice-président. Souvenons nous, surtout, du refus d’en attribuer un au maire de la capitale du Douaisis, pourtant dument élu avec 3400 voix, dix fois plus que celui de Lauwin-Planque.

« Démocratie, démocratie ! » certes, mais pour y croire il faut qu’elle obtienne de temps en temps, comme l’amour, quelques preuves.

Une normalisation à la Douaisis Agglo ?

En conclusion, en tenant pour saugrenus les conflits qui précèdent, on ne peut s’empêcher de s’interroger sur les motivations profondes de cette crise municipale. Faisons le pari que ses ressorts souterrains ne seront connus qu’après les élections.

Dans tous les cas, l’intervention de la communauté d’agglomération dans ce conflit, intempestive, est peut être une clé d’explication. Il est quand même rare de voir une intercommunalité sortir d’une neutralité qui devrait être sa première obligation.

Contrairement à ce que croit l’opinion, il n’existe aucune hiérarchie entre les niveaux territoriaux. Les départements ne commandent pas les EPCI et les EPCI ne commandent pas les communes.
Bernard Goulois, qui n’était pas vice-président à l’inverse de son prédécesseur et de son adjointe démissionnaire, ne parait pas recevoir beaucoup de soutien du conseil communautaire. A l’inverse, la lecture des rézosocios démontre que ses membres ne sont pas avares de critiques à son encontre.

Il sera d’ailleurs intéressant d’observer ce que fera Mme Sanchez si d’aventure elle sort battue des urnes. Pourra-t-elle garder ou pas sa sinécure douaizizaglossiste ? Si un siège à la CAD revient à sa liste devenue d’opposition, tiendra-t-elle compte de la sanction populaire – par définition démocratique – en abandonnant sa vice-présidence ?

En cas de victoire, certes improbable, c’est encore plus intéressant. Mme Sanchez se retrouvera à assumer trois lourds mandats réclamant une présence régulière et active.
Comme on peut parier sur le maintien du siège cantonal, sa vice-présidence sera-t-elle abandonnée au bénéfice de la mairie ? Qui sera donc mis à sa place ? Mystère et boule de gomme…

Ce qui est bien avec le Douaisis, c’est qu’on n’est jamais déçu et cette fois-ci encore on ne le sera pas.

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