La caserne du quartier de Caux

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Nos beaux et vieux bâtiments… vides (5)

Ville historique au riche patrimoine, Douai possède une caractéristique frappante : la présence dans ses rues de nombreux bâtiments anciens, parfois énormes, souvent classés mais… vides.

Douai, cité militaire

Enfermée dans ses murs, Douai a longtemps été une cité militaire, place forte essentielle pour le royaume par sa proximité d’une frontière régulièrement franchie par l’ennemi.

Dès la conquête de 1667, la cohabitation des habitants avec les troupes est constante. Les rues sont encombrées d’uniformes. La part des militaires dans la population peut être importante, surtout en cas de guerre. En 1789, période de paix, on compte dejà 4600 hommes dans la ville.

A partir du XVII° siècle, un changement apparait dans le mode de casernement. Au logement chez les particuliers succède en effet l’installation des soldats et du matériel dans des bâtiments spécifiques. Outre de disposer d’une organisation plus rationnelle, on limite les contacts avec la population qui pouvaient parfois être rugueux.

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La caserne d’Esquerchin

Après le rattachement à la France, l’armée a surtout utilisé des bâtiments religieux désaffectés, ainsi ceux des abbayes d’Anchin ou de Marchiennes, plus ou moins réaménagés. Un siècle plus tard, la ville décide d’investir. La décision est prise en 1751 de bâtir une caserne sur des terrains de l’abbaye de Vaucelles près de la porte d’Esquerchin. Le coût de la construction – 600 000 livres soit près de 10 millions d’euros – est assuré par la ville pour moitié, le reste étant supporté par des droits d’octroi reversés par le roi.

Destinée à l’infanterie, le plan de la caserne est extrêmement simple, totalement dédié à la chose militaire. Deux longs bâtiments de 160 mètres, partagés par une place d’armes rectangulaire, se font face. Hors les tuiles de la couverture en pente forte (qui ont remplacé les ardoises d’origine), ils ressemblent à ceux de l’Hôpital Général. A partir d’un soubassement de grès, l’élévation est en briques sauf les angles et les ouvertures en calcaire d’Avesnes. La décoration est limitée. On note un tympan triangulaire posé à l’aplomb des entrées centrales – qui sont cochères – sur la corniche du toit.

Dès la réception des travaux, la première unité à occuper les lieux est le régiment de Belzunce, du nom de son colonel, ensuite dénommé de Flandre, caserné à Esquerchin au moment de la Révolution. En 1868, le 15° Régiment d’artillerie investit la caserne. Il y restera jusqu’en 1940. Nommé Quartier de Caux en 1887 en honneur du général Victor de Caux de Blaquetot, douaisien célèbre mort en 1845, le site devient Centre Mobilisateur 215 en 1963. Il est fermé en 1998 à la suite de la suspension du service national qui a conduit à la réorganisation complète des forces armées du pays.

Des projets sans envergure qui ont tous échoué

Vide depuis cette date, soit près de vingt ans, la caserne n’a pas manqué de projets de réhabilitation. Tous, sans exception, ont échoué.

On a eu successivement :
– en 2009, après quatre ans d’étude, le projet de SIA Habitatqui envisageait d’implanter 94 logements sociaux sur le site, capote à cause du coût de l’opération. Evaluée à 27 millions d’euros au minimum, selon les dirigeants du groupe, l’opération n’aurait été équilibrée qu’en dessous de 20 millions. 
– en 2012, après une forte campagne publicitaire, l’opérateur privé Saint Louis Promotion abandonne, arguant de la dégradation du marché immobilier local. Le projet était original, prévoyant une réhabilitation des bâtiments par la création de lofts, d’appartement bruts ou finis, le tout – près de 200 lots – promis à la vente aux particuliers.
en 2017, un projet de déplacement sur le site du siège du bailleur social Maison & Cités tourne court deux ans plus tard.  Il envisageait de partager l’aile nord entre des logements sociaux et des bureaux construits par la caisse des dépôts et consignations. Le surcoût lié à l’état du bâti aurait amené la dépense au delà de 30 millions d’euros. 

On note qu’entre 2009 et 2019, les estimations quant à la réhabilitation sont passées de 20 à 50 millions d’euros selon les récentes déclarations de Frédéric Chéreau, ce qui paraît beaucoup mais il est parfois prudent de voir large en ces matières.

Dans tous les cas, il y a probablement un rapport entre l’abandon du bâtiment depuis vingt ans et sa dégradation au fil des ans qui augmente inexorablement le prix de sa réhabilitation. Cette évolution s’accentuera si rien n’est entrepris à court terme. Il faut se féliciter de l’initiative de la commune qui a réclamé en octobre 2016 l’inscription du bâtiment, effective par l’arrêté du 9 août 2018 qui protège la totalité du site. Outre d’empêcher sa destruction, cette décision était motivée par le projet Maisons & Cités et in fine peut être le souhait d’obtenir de l’Etat des aides pour cette opération.

Mais que dire de ces projets visant à installer dans le Quartier de Caux des logements sociaux ? Dans notre ville, la vacance locative, la plus haute du territoire, atteignait en 2013, près de 13,2% dont 70% en habitat collectif ? Pire, le recours aux bailleurs les plus présents dans la ville apparaît comme une facilité problématique. Avec 36% de logements locatifs sociaux, le parc douaisien est un des plus haut de la CAD (Lauwin-Planque 14%). 
Vacances et saturation ont logiquement empêché la réalisation de ces programmes. Tant mieux.

Un projet structurant, enfin

A ce stade d’urgence mais aussi d’importance pour la ville, le projet « Quartier de Caux » mérite qu’on s’y attarde un peu. Hors l’Hôpital Général dont il partage, nous l’avons vu, beaucoup de points communs, aucun lieu dans la ville ne possède un tel potentiel.

Si ses inconvénients sont sans cesse rappelés, ils sont tout autant réversibles. Les avantages du site sont manifestes. D’abord sa localisation à l’entrée de Douai près des flux qui arrivent de Lille. Ensuite, sa proximité du cœur de ville sans parler de sa taille. Son emprise remarquable permet beaucoup de choses. La caserne d’Esquerchin est une chance pour la ville. Elle n’est pas le problème, elle est la solution.

La mairie, qui n’a pas réussi en cinq ans à faire aboutir le moindre projet viable, a commencé à bouger, les élections approchent, en prévoyant un aménagement large prenant en compte le triangle rue d’Arras, rue d’Esquerchin et rue d’Albergotti.
Recréer le « Jardin des plantes » du XIX° siècle en détruisant une part de l’IUFM inoccupé est une excellente idée. Un mauvais esprit dirait que la meilleure manière d’enterrer un dossier c’est de l’inscrire dans un débat plus large mais ne boudons pas notre plaisir. Cette approche est un préalable indispensable.

Caserne d’Esquerchin en haut, Couvent des Capucins en bas, entre les deux, le Jardin des Plantes, on le refait ?

Quelle pourrait être la destination d’un site aussi unique ? Douai s’est contentée de mettre en avant des solutions limitées avec des recettes banales qui ont toutes échoué.
A l’inverse, l’examen des villes proches qui ont fait le pari de l’innovation d’envergure est utile. On repère avec intérêt le développement de nouveaux Tiers-lieux comme le “Labo” de Cambrai, “l’hôpital St Jean Baptiste” d’Aire sur la Lys, la “Station” de St Omer, la “Condition Publique” de Roubaix etc.

Et si on s’y mettait aussi ? Il faut penser autrement, sortir du cadre et enfin adopter le « think big* » pour offrir aux Douaisiens un lieu exceptionnel par sa valeur patrimoniale, son envergure et la diversité de ses services. Basée sur la solidarité collective qui est un point fort de notre culture locale, associée à une démarche éco-responsable, la «Caserne Caux» doit être la vitrine du renouveau de la cité.

Besoin d’un projet d’envergure ?

Nous proposons de mobiliser le concept de Tiers-lieu mais en l’élargissant pour en faire un « écosystème » qui envisage, sur un espace commun, l’interaction de publics différents pour des activités de toutes natures.

Le concept à privilégier est ici étranger, à savoir celui de l’architecte Lina Bo Bardi réalisé à Sao Paulo (Brésil) à partir d’une ancienne usine réhabilitée. Ce Centre culturel atypique comprend au même endroit des infrastructures sportives, une bibliothèque, un théâtre, des espaces d’exposition, un restaurant, un solarium et des espaces de convivialité diversifiés.
Depuis 1977, le SESC Pompeia parvient à attirer des publics de tous les âges et tous les milieux sociaux par ses spectacles variés, ses horaires amples, ses tarifs très accessibles mais surtout son aménagement flexible.

L’exemple de la citadelle du loisir à Sao Paulo

De la caserne Caux au Quartier CO

A Douai, la «Caserne» s’intègre dans un aménagement large, grâce à une «Coulée Verte» organisée en «sentes» qui relient l’arrière du quartier au Couvent des Capucins, en passant par l’ex-IUFM. 

L’ensemble, qui doit être autonome sur le plan énergétique et auto-financé en fonctionnement, sera un Tiers-lieu de grande envergure offrant une multitude de services à un public inter-générationnel, abonnés ou utilisateurs occasionnels. Il doit être tourné vers la stratégie régionale Rev3 qui met l’économie durable et connectée au cœur des projets locaux.

Pour illustrer la démarche, le tiers-lieu peut offrir des services dont la liste qui suit n’est pas exhaustive :
un food hall**, proposant différents stands de restauration préparés avec des produits frais authentiques, le tout dans un cadre agréable propice au partage. Ici, on viendra chercher avant tout une expérience.
– des ateliers d’artisans, d’artistes en résidence, des galeries d’art.
– des salles de spectacles modulables de petit format.
– un espace de co-working (individuel et collectif)
– un marché de produits divers locaux.
– un espace enfant (jeux, ateliers, mini-salle de cinéma).
– un espace d’innovation numérique et de formation.
– des salles de danse, de yoga, de détente.
– un mur d’escalade intérieur.
– une salle de lecture (journaux, magazines)
– un jardin, verger, potager, un rucher, sur le modèle génial de l’agriculture urbaine.
– un FabLab adossé sur l’Ecole des Mines.
– des espaces réservés à la musique adossés au Conservatoire (répétition, enregistrement etc.)
– un cinéma de plein air avec transats aux beaux jours.
– des gites à louer sur le principe de la Cité des Electriciens de Bruay.


Le «Quartier CO» sera le renouveau de la ville. Qui osera relever ce défi ?

*Penser grand en british
**Espace de stands culinaires en grand breton

Vous aussi vous avez des idées, partagez-les avec nous.

Un CFA et t’es sauvé!

Un CFA à douai

Que ferions-nous sans La Voix du Nord ? Sans les infos qu’elle distille quotidiennement au citoyen démuni, nous ne saurions rien de rien sur rien. La communication est quand même un tour de force dans le Douaisis une fois franchies les déclarations lénifiantes des élus. Sans la PQR, nous serions sourds et aveugles. Voilà c’est dit.

Un CFA à La Clochette

On y trouve ainsi la récente déclaration de Douaizizaglo® quant à l’émergence prochaine d’un CFA dans le quartier de la Clochette.

Ce projet est très ancien, au moins dix ans voire plus. Il n’a jamais abouti. Si les conditions n’ont pas été réunies, cela devrait inciter à la prudence. Une vieille idée n’est pas forcément une bonne idée. 2020 n’est plus 2000.

Quoi qu’il en soit, cette fois-ci c’est bon. Le CFA va bientôt sortir de terre. Le terrain est acheté. On en connait le prix. C’est comme toujours le célébrissime « million d’euros » apporté par la communauté d’agglomération, c’est-à-dire les contribuables du Douaisis. Enfin, cette somme représente, si on comprend bien, un amorçage car le coût total sera de 25 millions, supportés in fine par la région et la Chambre des métiers.

Le citoyen qui a un peu de mal à payer ses impôts locaux s’intéresse immédiatement aux motivations de cette décision. Il s’inquiète surtout de son efficacité pour répondre aux besoins du territoire.

La bonne idée d’apprentissage

Un Centre de Formation des Apprentis (CFA) n’est pas un lycée qui, s’il envoie régulièrement ses élèves en stage, les enseigne dans ses locaux. Le CFA fait reposer d’abord sur l’entreprise, par contrat, la formation de l’apprenti.

L’apprentissage a toujours été présenté comme une réponse efficace à la demande de jeunes en attente d’insertion, entre autres parce qu’ils reçoivent un salaire qui peut les aider à vivre et qu’ils sont employables dès la sortie du contrat.

On met aussi en avant la plus grande aptitude des CFA à gérer le lien – difficile – entre la formation et le besoin local. Très présentes, les entreprises interviennent dans la définition de leurs filières qui peuvent donc s’adapter plus vite aux évolutions économiques du territoire que celles des lycées professionnels.

Une bonne idée qui prend mal

Cette idée géniale peine pourtant à se développer comme elle le devrait, surtout dans notre région. 

Plus précisément, ça coince au « niveau V » c’est à dire celui des CAP et des BEP, sachant que plus on monte dans la hiérarchie des diplômes et plus l’apprentissage fonctionne bien (pour les ingénieurs du « niveau I » mais ils ne sont que 2% du total des apprentis).

Dans les Hauts de France, compte tenu du profil de la population scolaire et des médiocres capacités de son système éducatif à former les élèves les plus faibles, le besoin en niveau V est évident.

L’apprentissage a pourtant du mal à augmenter ses effectifs. Voilà dix ans, on comptait dans l’académie de Lille environ 9000 apprentis. Leur nombre est quasi le même aujourd’hui (soit 2,5% des élèves du Second Degré).

Plusieurs raisons interviennent pour expliquer le faible succès de l’apprentissage. Le déficit d’image, le peu d’envie des familles d’y mettre leurs enfants. Il est vrai que le décrochage, c’est à dire les ruptures de contrat, y est relativement fort, ce qui ne les rassure pas. On peut ajouter pour notre région la présence massive de lycées professionnels (10% à 15% de plus que le national en moyenne) qui pèse sur les orientations des élèves dans ces filières.

Cette question est au centre de l’installation d’un CFA à Douai car notre ville et plus encore son bassin sont très fournis en LP. La complémentarité des deux est un point essentiel. C’est sans doute pour cette raison que la région – qui finance lycées et CFA – a si longuement hésité à soutenir le projet.

Une absente, l’Education Nationale

Nous savons, ainsi que le Président de la CAD nous l’a affirmé par écrit voilà peu, que les « élus de la République réfléchissent avant de prendre une décision ». Nous n’en doutons évidemment pas.

Juste une interrogation quant à l’absence de l’Education Nationale dans la « troïka » qui a scellé le récent accord, soit Douaizizaglo®, la région et enfin la chambre des métiers (CMA).

Il existe dans notre ville le lycée Labbé, siège du « GRETA Grand Hainaut » qui après avoir fusionné plusieurs structures similaires en 2016, couvre à présent un territoire allant de Douai à Fourmies en passant par Cambrai et Valenciennes (41 lycées contre 25 en 2015).

On repère aussi dans l’académie un « Campus des Métiers du bâtiment » qui étend son influence à travers de très nombreux établissements professionnels, Douai étant pile au milieu et le lycée Cassin de Montigny, spécialiste du bâtiment avec CFA, juste à côté.

On espère que tous ces réseaux ont été intégrés dans l’architecture du projet, notamment en prenant langue avec les autorités académiques qui ne gèrent pas les locaux mais, comme chacun sait, tous les emplois qui correspondent à ces nombreux établissements.

Quels besoins pour le territoire?

Décider d’une implantation de cet ordre doit d’abord répondre à un besoin connu, mesuré et surtout prioritaire.  Au niveau V, en France, le recours à l’apprentissage se concentre dans le BTP (22 % des entrées), l’agroalimentaire (13 %), l’hôtellerie-restauration et le tourisme (12%) . Dans ces branches, à composante manuelle et artisanale, l’employabilité est avérée.

En termes de prospective, il serait bon de disposer d’élément concernant le futur de notre territoire. Justifier cette création par la rénovation de « 23 000 logements des cités minières » est, certes, un coup de communication saluant notre passé charbonneux mais il parait quand même un peu léger pour justifier l’engagement financier de 25 millions d’euros. La CAD n’a-t-elle pas d’idées plus stratégiques comme, par exemple, inscrire cette création dans une perspective territoriale plus large ?

Du bâtiment ou pas?

L’interrogation qui découle de ce qui précède concerne évidemment les filières qui seront accueillies par le futur CFA. L’article de La Voix du Nord les présente un peu comme une ménagère annoncerait la couleur de sa nouvelle cuisine sans être certaine de la choisir. Verbatim, ça donne : « on partirait sur les métiers du bâtiment, notamment tout ce qui gravite autour de la domotique et de l’éco-construction mais il y aura aussi du service à la personne, du tourisme et de la restauration ».

Tout cela ne parait pas trop assuré. Il faut choisir. Soit on prend la filière du bâtiment avec tout ce que ça comporte pour obtenir un effet masse sur le territoire, soit on envisage plusieurs parcours, histoire de faire un peu de tout à la mode douaisienne, avec le risque de peser sur pas grand-chose.

Le CFA de Saint Saulve, admirable projet (1200 apprentis prévus, le double de celui de Douai qui envisage, admirez la précision, 533 jeunes en formation) a fait ainsi le pari du soutien déterminé à un secteur en forte demande de main d’œuvre locale, l’artisanat, en concentrant dessus tous les moyens créés.

De la formation initiale ou de l’insertion?

L’autre sujet concernant un CFA est celui du profil du public accueilli. Il peut ainsi intégrer des collégiens en fin de 3° mais tout autant des jeunes en insertion sortis du système scolaire sans diplôme voire des adultes souhaitant une réorientation.

Dans les faits, il est très difficile de mélanger ces deux profils comme l’ont analysé de nombreux rapport sur l’apprentissage quand ils s’interrogent sur la difficulté d’augmenter le volume de ce mode de formation.

Compte tenu des sorties sans diplôme plutôt forts dans le bassin de Douai, il serait sans doute plus indiqué de faire le choix de l’insertion, d’autant plus que dans ce cas on ne prend pas le pain de la bouche des LP du coin qui gèrent, eux, la formation initiale.

Douaizizaglo® s’occupe de tout

L’autre étonnement concerne les déclarations du président Poiret affirmant que la CAD allait gérer en direct les travaux du nouveau CFA parce qu’ainsi elle récupèrerait « la TVA et maitrisera mieux l’avancée du chantier ». Nous savons que la communauté d’agglomération joue déjà les vendeurs des maisons du quartier du Raquet. L’état de ce projet séculaire après 15 ans d’existence permet de s’inquiéter de l’efficacité d’une prise en charge directe.

La vente comme la construction immobilières entrent-t-elles dans les compétences obligatoires de notre communauté d’agglomération ? Pas sûr. Notre président paraissait ravi de ce choix en considérant qu’il était une innovation majeure. Il indiquait assez fier que « personne ne l’avait jamais encore fait, sauf peut être aux Antilles ». Prendre cette région en exemple fait un peu peur quand on connait les performances scolaires des DROM mais surtout la situation financière de ces administrations locales, notamment leurs charges excessives en personnels.

Une conclusion en forme d’inquiétude

Le lecteur comprendra sans peine l’inquiétude qui parcourt cette analyse. Un CFA pourquoi pas ? Mais le mais arrive tout de suite.

On craint immédiatement que cette création – outre de faire taire les critiques concernant le CFA dont on parle souvent et qu’on ne fait jamaissoit d’abord à but immobilier. Investir à La Clochette pour donner à ce quartier très enclavé l’importance qu’il a beaucoup de mal à avoir, est peut être la motivation première de ses promoteurs.
On aimerait tout autant, symétriquement, que les arguments qui ont réussi à débloquer ce dossier enlisé depuis si longtemps soient réellement la réponse adaptée aux besoins, identifiés et mesurés, de notre territoire.
Et là, comme nous l’avons déjà évoqué, ce qui doit primer dans la décision, c’est l’ordre des choses. On a besoin d’apprentis dans un secteur prioritaire donc on construit un CFA pour les former. On n’occupe pas un terrain avec un CFA en pariant au final que cela va rendre service à des entreprises qui, par chance, chercheraient des apprentis.

Enfin, comment ne pas regretter l’absence d’envergure d’un projet qui parait ne rien connaître, à l’inverse de celui de St Saulve, de Rev3, dite « 3° révolution technologique de la région des Hauts de France « , qui vise à faire de celle-ci l’une des plus avancées en matière de transition énergétique et de technologies numériques. On espère que nos chers élus placent notre futur CFA dans l’un des 10 projets structurants qu’envisage cette extraordinaire stratégie.

Qui est-ce ?

qui est-ce?

Plusieurs réactions à Douai Vox tournent autour de l’identité de ses auteurs. Est-ce si important en comparaison des sujets qu’il aborde ? Evidemment non.

Il n’effleure pas la notabilité douaisienne qu’il puisse exister en dehors de son horizon des habitants concernés qui ne font partie d’aucun des réseaux d’intérêts de la ville.  Plus curieux, si on en croit certains commentaires, une parole comme la nôtre ne pourrait être que l’expression d’un groupe masqué défendant un parti politique. Ben voyons. Tout mais pas ça.

Anonymes et invisibles, n’étant rien, nous sommes libres de prendre position et de le faire savoir. Voilà la première raison d’être de Douai Vox.

Il y en a une autre que les lecteurs attentifs auront perçu sans effort. Le ras-le-bol des gâchis auxquels le peuple assiste impuissant alors qu’il en est le premier payeur, sans parler du silence pesant qui recouvre tous ces ratages.

Comme l’a justement fait remarquer le président de notre agglomération, aux affaires depuis dix ans à la CAD et depuis vingt-cinq ans dans sa mairie, les mécontents n’ont qu’à se faire élire pour décider à sa place.

C’est exactement l’objet des municipales et au-delà celui du renouvellement de Douaisis Agglo qui suivra. L’objectif très souhaitable de changer le patron avec la récente augmentation des sièges en faveur de Douai est tout à fait jouable.

Il ne sera pas dit que dans ce rendez-vous, qui est peut-être celui de la dernière chance, des citoyens libres n’auront pas, avant, fait entendre leur voix.

Loin de toute manipulation, ils ont choisi de se focaliser sur les idées plutôt que sur les hommes. Au final, l’espoir est là, c’est aussi le moyen de pousser d’éventuels candidats – reconnaissons qu’ils sont nombreux – à adopter un programme dépassant des engagements partisans qui aujourd’hui ne veulent plus rien dire.

Les remarques qui émanent de nos nombreux lecteurs démontrent que beaucoup d’entre eux, de tous bords politiques, approuvent notre propos. Ce sont la ville et son avenir qui comptent. Sur un tel objectif, le consensus est total.

Cette constatation, incertaine au lancement de Douai Vox, suscite un véritable espoir. Nous n’avons jamais douté du potentiel de la ville, ni de celui de sa région. Le problème est ailleurs. Il est chez les représentants que nous nous sommes donnés jusqu’à présent et qui ont été incapables de faire bouger les lignes.

Si c’était le cas, nous rencontrerions des multitudes de Douaisiens ravis de la situation de la cité découlant de l’action de nos élus. C’est bizarre mais c’est rarement le cas.

Allez hop ! On les change !

La plus vieille maison de Douai

plus vielle maison de Douai

Nos beaux et vieux bâtiments… vides (4)

Ville historique au riche patrimoine, Douai possède une caractéristique frappante : la présence dans ses rues de nombreux bâtiments anciens, parfois énormes, souvent classés mais… vides.

Un modeste témoin du passé

Bien discret sur son pignon, à l’angle des rues de Huit-Prêtres et du Clocher Saint Pierre, le bâtiment ne paie pas de mine.  Il est vrai que l’allure est peu flatteuse quand on regarde l’horrible rideau métallique qui ferme le rez-de-chaussée, l’affreuse enseigne masquée depuis peu, l’incroyable vitrine de la devanture mais plus encore l’état des fenêtres qui, ici ou là, ont même perdu leurs carreaux.

Pourtant, à bien le regarder, on comprend qu’il ne date pas d’hier comme le montrent ses pans de bois dont la facture médiévale ne fait pas de doute. On perçoit aussi le montage en encorbellement des étages puis tout en haut la façade triangulaire qui épouse la forme du toit.

Une miraculée de la Grande Guerre

Sa modestie l’a probablement sauvée à l’inverse de sa voisine. Juste en face, se trouvait en effet la célèbre maison dite « des Rémy », un des monuments les plus connus de la ville. Sa restauration sous le Second Empire en avait fait le joyau de la cité, exaltant un « style espagnol » qui n’était d’ailleurs que flamand. Incendiée en 1918 par les troupes allemandes en retraite, cette merveille est partie en fumée avec ses superbes sculptures, ses pilastres ciselées, ses métopes délicates, ses colonnes ouvragées.

A comparer la forme des deux façades, la disparue et la survivante, on comprend qu’il y a une filiation dont la plus modeste mais la plus ancienne, est peut être l’origine. Construit au XIV° siècle, le bâtiment était une dépendance d’un ensemble plus grand, l’Hôpital des Huit-Prêtres fondé par une certaine Marguerite Mullez ou Mulet, « dite Baudane », sœur du prévôt de St Pierre.

Si on en croit Plouvain, l’héritage de cette bienfaitrice disparue en 1329 était destiné à permettre l’accueil de « huit prêtres indigents » mais surtout de pourvoir à leur entretien. Reconstruit en 1519 – la brique a remplacé les colombages – l’hospice a traversé l’Ancien Régime pour finir vendu comme bien national à la Révolution. Le bâtiment subsistant n’est donc que la partie miraculeusement indemne d’un îlot dont il ne reste rien, plus étonnant encore, dans un quartier durement touché par les destructions de la première guerre mondiale.

Un monument protégé devenu bien municipal

Brièvement poste de gendarmerie, elle est dès le début du XIX° siècle un estaminet puis un magasin, le fameux « bazar à 100 francs » de la famille Cocheteux. Vendue l’année dernière par ses descendants pour 80 000 euros (quand même moins cher que le Furet) à la mairie, la collectivité a acquis cette maison « afin qu’elle ne se détériore pas davantage », ce qui est une très bonne idée.

On peut regretter qu’un bâtiment dont la façade et les toitures ont été inscrites à l’inventaire des Monuments Historiques dès décembre 1964 n’ait pas été plus tôt acheté et restauré comme il se doit. Ici encore, on voit que le ciment a frappé, ainsi que le montrent les joints de briques datant sans doute des années 50. Il ne reste probablement pas beaucoup de matériaux d’origine. Sur la façade, les pans de bois du XIV°, régulièrement réparés depuis, ont peut être disparu depuis longtemps.

Besoin d’une idée médiévale?

Sans aller jusqu’à réclamer son retour à la fonction originelle qui n’était sans doute pas très éloignée d’une conciergerie, conserver à cette maison sa fonction commerciale ne serait pas indigne dès l’instant où elle constituerait une étape dans le circuit touristique d’un centre-ville enfin valorisé.
Célébrer le passé médiéval, la draperie qui était l’âge d’or de Douai, aurait beaucoup d’avantages.
Cette idée rejoindrait le goût du Moyen-Age qui plait à Douaisis Agglo à travers le soutien important qu’elle apporte à Arkéos, notamment son extension en parc médiéval. Le sujet est porteur comme le prouve le succès des animations organisées sur ce thème. Un soutien financier, même modeste, devrait pouvoir se mettre en place, la surface du local est réduite – 70m2 au sol – ce n’est ni Le Furet, ni Le Prévost.

boutique médiévale plus vieille maison de douai

Restaurée dans sa forme originelle, la maison pourrait être un lieu de vente d’objets touristiques, artisanaux, issus de productions locales, peut être même associatives. Une échoppe médiévale reconstituée pourrait être un lieu de vente original, susceptible d’attirer l’attention.
Il serait possible pour renforcer l’intérêt de ce projet, de l’associer par convention avec les établissements professionnels du secteur. Plusieurs lycées, ainsi Rabelais (vente) ou Leforest de Lewarde (accueil), pourraient en faire un lieu de stage pour les élèves en cours de formation.

Échoppe médiévale à l’Aigle (Orne), bien jolie non ?

Vous aussi vous avez des idées, partagez-les avec nous.

Trop d’impôt tue la ville

trop d'impôt tue la ville - Gettyimages

En période électorale, la question des impôts locaux payés par les habitants est une interrogation obligatoire. Le principe est simple. Tout Douaisien donne de sa poche pour faire fonctionner les services de sa ville et même un peu plus. Dans ce « plus », il y a les investissements qui préparent l’avenir, comme les pistes cyclables ou le restaurant le Prévost.

Un système incohérent

Penchons nous sur deux impôts locaux principaux, la taxe d’habitation et la taxe foncière, cette dernière assumée par les seuls propriétaires. Nous évoquerons en conclusion la suppression de la première qui va changer profondément la donne de la fiscalité locale. C’était pourtant la ressource la plus importante des communes. A Douai, elle compte pour un tiers des 60 millions du budget de la ville.

Le calcul de la TH et de la TF relève de logiques curieuses, de celles dont notre pays a le triste privilège en matière fiscale, c’est-à-dire le n’importe quoi. D’une part les valeurs qui servent de base de calcul sont les mêmes depuis 1970 et de l’autre l’imposition n’a aucun rapport avec les revenus des habitants.

Taxes d’habitation et foncières sont en effet calculées sur une « base locative cadastrale » fictive, valeur de 1970 actualisée automatiquement et qui dépend d’éléments divers. On y trouve le confort du bien (WC, chauffage, salle de bain etc.), son emplacement, sa taille, son état d’entretien etc. C’est sur cette valeur que la commune applique le taux qu’elle vote.

Une « commission communale des impôts directs » est chargée de réviser les valeurs cadastrales. Elle est constituée de contribuables choisis par la mairie d’abord (qui propose une liste de « spécialistes », notaires ou agents immobiliers, distribués selon les quartiers) puis le Trésor Public qui distingue dans le lot 8 personnes. Difficile de connaître l’identité de ces experts installés à chaque élection, dans les faits probablement reconduits de mandat en mandat. Si un des membres de la commission lit ces lignes, on aimerait qu’il nous explique comment ça marche.

On prend cher à Douai

Les taux de Douai pour la taxe d’habitation sont à 28,95% quand Cuincy est à 12,57% et Lauwin-Planque à 19,91%.
Il faut se méfier de ces chiffres. Un village de Corse, Tasso, possède le douteux avantage d’un taux à 50,09% quand Neuilly sur Seine est à 12,57%. La différence provient de cette fameuse valeur locative révisée par la commission communale. 12,57% à Neuilly rapportent beaucoup et 50,09% à Tasso, très peu.

Les communes du Nord connaissent des taux qui sont parmi les plus hauts de France (d’où peut être le nom de la région) parce que leurs bases seraient faibles.
Sur 35361 communes du pays, dans les 100 taux les plus forts (de 30% à 50%), le Nord en constitue plus d’un tiers. Selon la Cour Régionale des Comptes, les bases de Douai sont « inférieures aux moyennes de la strate » (867,1 euros/habitant en 2018). On peut faire l’hypothèse qu’elles étaient en 1970 peu élevées, encore qu’on ne comprend pas vraiment pourquoi.

D’ailleurs, il n’est pas facile de connaître cette valeur locative, ni de la comprendre, ni même de la comparer avec celle des communes voisines. Des Douaisiens découvrent d’une année sur l’autre, alors qu’aucune amélioration de leur bien ne s’est réalisée, qu’elle augmente automatiquement et pas dans de faibles proportions.

Cette tendance est d’autant plus étonnante qu’à Douai les valeurs immobilières baissent régulièrement depuis des années. Il suffit de comparer les prix des maisons mises en vente aujourd’hui et celles qui l’étaient voilà dix ans. Avec plus de nuances selon les biens, la location est peu dynamique, ce qui rend ces augmentations « automatiques » incompréhensibles.

Car encore une fois, la fuite des habitants, processus complexe, a peut-être un lien avec le taux d’imposition. Il est courant d’entendre des Douaisiens se plaindre du poids de la fiscalité locale et d’expliquer ainsi la baisse de la population. L’examen des taux parait leur donner raison et cela d’autant plus que les valeurs locatives des communes voisines ne doivent pas beaucoup s’éloigner de celles de Douai. Il vaut mieux habiter Lambres ou Cuincy pour profiter des services de la grosse ville sans y payer ses impôts.

On peut d’ailleurs se représenter sans peine le cercle vicieux ainsi lancé : à budget constant, la baisse de la population conduit la municipalité à augmenter les impôts sur ceux qui restent. De plus en plus ponctionnés, la fuite des payants s’amplifie. Incapable de baisser ses dépenses, la commune appuie sur les taux. Les gens continuent à partir etc. Au bout du cycle, de moins en moins de Douaisiens mais à l’inverse des impôts locaux de plus en plus lourds.

Les chiffres paraissent donner raison à ce terrible enchainement. La hausse des deux taxes (TF et TH) depuis 2000 est forte, plus de 40%. Leurs taux étaient alors à 20%. Ils sont respectivement aujourd’hui à 29,55% et à 28,95%. La baisse de la population de Douai est exactement inverse à l’augmentation des taux. Etonnant, non?

Une seule option, l’augmentation

Comment ne pas soulever la responsabilité des municipalités successives dans cette évolution fiscale toujours plus lourde ?

Nous nous souvenons de la déclaration de F. Chéreau quand il a augmenté les taux « par précaution », justification qui vaut son pesant de fiscalité. Mieux, l’argument avancé pour répondre aux critiques était que « d’autres villes sont plus imposées que la notre ». Outre que cette déclaration est démentie par la périphérie de la ville, on pourrait ensuite demander aux Douaisiens s’ils souhaitent se rapprocher de ces chanceux qui paient plus qu’eux, à Condé sur Escaut (43,17%), Lambersart (37,80 %) ou Valenciennes (35,50 %).

Quoi qu’il en soit la disparition de la taxe d’habitation rend tous ces raisonnements inutiles puisque supprimée dès cette année pour les plus pauvres, elle n’existera plus pour tous les contribuables en 2023.

Prudence cependant. Le gouvernement a fait le choix, pour compenser cette perte de revenu pour les communes, de faire glisser sur elles l’intégralité du produit de la taxe foncière auparavant attribué aux départements. Si la révision des bases est prévue à partir de 2022 – sur dix ans – les municipalités continueront donc à fixer les taux. Pour mémoire, celui de Douai, à 29,55%, n’est battu dans sa périphérie que par Flers qui se situe à 31,7%.

Plutôt habile, cette réforme parait résoudre toutes les contradictions d’une fiscalité locale incohérente. La commune conserve, certes amoindri, un pouvoir propre sur ses ressources. Les bases, révisées par la redoutable et secrète commission communale, seront plus justes. C’est dit, c’est écrit.

Le Douaisien critique fera remarquer que seuls les propriétaires assureront le coût d’un impôt auxquels échapperont donc tous les locataires. Il ne faut pas être grand clerc pour comprendre l’effet sur la population de Douai. Estamper les seuls proprios reviendra évidemment à les faire fuir un peu plus. La ville connait 36,8% de propriétaires, soit 6500 foyers sur 17700. L’assiette sera bien réduite. Tremblez possédants, ça va taxer !

De même, parce que les recettes de la taxe foncière ne correspondent pas à celles de la taxe d’habitation, l’Etat est obligé de compenser le manque à gagner des communes. Cette idée diabolique lui donnera un levier d’une grande efficacité pour les contraindre à réduire leurs dépenses. Ce paramètre va en effet s’ajouter à une dotation globale de fonctionnement (DGF) dont les variations à la baisse sont devenues la règle. Craignons que nos élus n’aient la tentation, « par précaution » , de compenser la compensation par des hausses des taux.

Enfin, cette réforme qui possède un coût évident, va être au final supportée par tout le monde à travers l’impôt sur le revenu, la TVA, la TICPE, les taxes délirantes dont la France a le secret… Avec un peu de chance, le fardeau va se vaporiser sur la masse mais il reste une certitude pour nous tous : l’impôt ne baissera pas, ni dans la ville, ni dans le pays.

Les atouts du Douaisis

atouts du territoire CAD

On a testé pour vous (1). Les « atouts du territoire » sur le site de la CAD

Le développement économique étant la compétence essentielle d’une communauté d’agglomération, examinons ensemble la page qui, sur le site de Douaisis Agglo, envisage cet important sujet du point de vue des arguments qui vont le favoriser.

Le titre donne le ton : « Investir dans le Douaisis pour développer son entreprise ». On en déduit que tout ce qui va suivre donne au futur douaisien entrepreneur des arguments pour le convaincre de s’installer chez nous. De fait, l’objectif est clair : « Votre implantation dans le Douaisis est une solution fiable et pertinente pour faire des affaires en Europe et entier sur le marché français. »

On regrette juste un peu la faute de frappe (« entier » pour « entrer »). Visiblement personne n’a pris la peine de relire ce topo et même pas la première ligne. On tremble que ce soit parce qu’on pense que ce truc n’existe que pour exister et rien d’autre.

Un argumentaire bizarroïde

Ensuite, regardons les thèmes que les promoteurs de la CAD considèrent comme stratégiques pour favoriser l’implantation de nouvelles entreprises dans le Douaisis. Commençons par le premier : « Le Douaisis : une accessibilité exceptionnelle »

Ouvrir par les accès est une bonne chose. Un entrepreneur qui cherche à s’implanter dans la région se posera immédiatement la question de la mobilité dans l’agglomération. Il s’interrogera aussi sur sa situation géographique par rapport aux grands pôles d’activité, Paris, Lille et puis la Belgique, les Pays-Bas, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, évidemment s’il a des ambitions internationales.

On peut discuter la « fluidité de transport permettant un gain de temps et d’argent » qui est peut être une promesse excessive par les temps qui courent. Pour autant, la centralité de Douai dans les Hauts de France, résultat de son histoire, est un fait incontestable. Quoi qu’on puisse être, nous sommes toujours au centre de quelque chose mais notre ville bénéficie d’une situation idéale quand on observe sa localisation sur une carte.

Voyons ensuite le « territoire qui mise sur la formation » 

Si le lien entre l’emploi et la formation est une évidence dont on est ravi qu’il soit ici posé, il est possible de s’interroger sur sa présentation. Curieusement, les établissements de formation de Douai sont passés sous silence. On parle quand même des « nombreux établissements d’enseignement supérieur » dont on aimerait bien avoir la liste et dans tous les cas, chose étonnante, l’école des Mines n’apparaît même pas. Il y avait peut être un manque de place sur la page.

Continuons par le « territoire fort de grandes institutions »

La liste qui suit est censée persuader patrons et ménages de l’intérêt d’avoir à portée de main certaines structures publiques. Incontestablement, en termes d’information et d’accompagnement d’entreprise la Chambre des Métiers peut être utile. Pour les autres, le rapport reste à confirmer. En quoi la présence du 41° RT joue un rôle dans l’attractivité du territoire ou mieux l’agence de l’eau ?

Après la situation se gâte avec « un territoire au patrimoine riche » 

On voit bien l’intention : convaincre d’une richesse culturelle et patrimoniale susceptible de renforcer l’image positive du Douaisis. Certes, on peut y souscrire mais encore une fois quelle est la plus-value de la présence dans notre région, par exemple du château de Bernicourt, pour convaincre un entrepreneur de s’y établir ? On imagine la scène : « tiens chérie ! Il y a un musée à Roost-Warendin, je vais donc y créer une usine. »

Pour le reste, le site ajoute ensuite plusieurs sujets qui auraient pu être fondus en un seul mais qu’on a probablement dissociés pour faire masse sur la page : les « loisirs », les « équipements culturels » et « l’histoire ».

Une fois encore, hors l’image déjà évoquée, on reste dubitatif des effets de cette liste sur un éventuel entrepreneur. Par contre, on peut y voir la célébration de la CAD – pardon Douaisis Agglo – car aucun des projets qu’elle finance n’y échappe. C’est déjà ça de gagné encore qu’un chef d’entreprise avisé pourrait se poser des questions. Avec tant de trucs subventionnés, la fiscalité locale ne serait-elle pas un peu lourde dans le coin ?

Conservons enfin, le dernier volet susceptible de convaincre d’investir et avec lequel nous serons d’accord, « Un territoire où il fait bon vivre » parce qu’il est évident que la douceur de l’existence est un élément essentiel d’attractivité d’une région. Mais c’est assez opaque en terme de logique car comment associer « l’Ecoquartier du Raquet », les « boucles de randonnée », les « circuits-courts » (mais qu’est-ce donc ? Cela concerne la cantine scolaire ?). On devine encore ici une intention confuse, vaguement écologique, mais encore ?

Argumentons gratuitement

Proposons, pour aider les fonctionnaires et élus de la CAD, c’est cadeau, quelques réflexions pour répondre à la question posée : comment renforcer l’attractivité de la région ? Le postulat sera de penser, comme le site de Douaisis Agglo mais en le disant, que ses « atouts » interviennent dans cette dynamique économique.

Quels sont les facteurs qui prouvent la bonne santé d’un territoire ?
Il y a évidemment, comme nous l’avons déjà vu, d’abord l’évolution de la population. Quand elle baisse, ce n’est pas rassurant. Quand elle augmente c’est meilleur. Pour autant, dans ce dernier cas, le profil social joue un rôle. Une ville dont la hausse démographique relèverait d’une construction massive de logements sociaux pour accueillir des chômeurs n’aura pas la même dynamique qu’une autre où, attirés par toutes sortes de facteurs positifs, de nombreux actifs s’installeraient en y achetant un bien immobilier.
Il y a ensuite le développement d’entreprises sur le territoire. Le lien est connu en termes démographiques et économiques. Il n’est pas besoin d’évoquer – les Hauts de France ont connu ces drames – les conséquences d’une fermeture d’usine ou, à l’inverse mais c’est plus compliqué, les effets d’un renforcement d’une activité existante voire l’émergence d’une nouvelle.

Pour autant, il ne faut jamais perdre de vue que ces deux facteurs, population et entreprises, peuvent être dissociés. Il existe des villes où ceux qui y travaillent n’y habitent pas tandis qu’à l’inverse ceux qui y habitent n’y travaillent pas. Ce sont les types d’activité et les profils des habitants qui font la différence.

Le cas idéal est celui de productions à haute valeur ajoutée, évidemment tertiaires, réclamant une forte qualification des personnels. Ces derniers, bien rémunérés, recherchent des lieux de résidence agréables, si possible proches de leur lieu de travail. Quand le boulot et la maison se confondent par le haut, c’est du bonheur pour tout le monde.

Aujourd’hui, beaucoup de chercheurs font reposer l’attractivité d’un territoire sur le concept des « pôles de compétitivité », les fameux « clusters ». Il s’agit de dégager des synergies à partir de projets innovants pilotés collectivement autour d’un ou de plusieurs secteurs économiques. Douai a connu ça dans le passé quand tout était fait pour favoriser une activité unique : la draperie, le commerce des grains, la concentration administrative, le charbon etc.

Ces « clusters » doivent bien entendu être cohérents avec la stratégie du territoire qui, associant tous les acteurs, se concentre sur les innovations qui permettent la croissance. Si ces conditions sont réunies, se constitue peu à peu une masse critique d’activités capable de concurrencer les territoires voisins et au delà, stade ultime, de développer une visibilité nationale voire internationale.

La version ratée du « pôle de compétitivité » serait à l’inverse le placage d’un projet sur l’économie locale sans tenir compte de ses logiques et qui aboutit à une dispersion des activités ne parvenant jamais à atteindre la masse critique visée.
La version étranglée serait que le tissu économique se disperse en filières peu dynamiques – on fait un peu de tout – sans ligne de force dans la stratégie des pouvoirs publics locaux. Suivraient la baisse continue de la population du territoire mais surtout son inexorable appauvrissement.

Besoin d’une idée rédactionnelle?

Proposons bénévolement, une réécriture de cette page « atouts » en présentant les facteurs qui selon nous pourraient favoriser l’attractivité de notre territoire.

1- L’accès, la situation et la localisation, déjà évoqués sont essentiels. Comme nous l’avons vu, le Douaisis n’est pas mal doté. Il est inutile d’y revenir. On le garde.
2- La taille du marché d’emploi et de consommation est une évidence. Le Douaisis compte près de 150 000 habitants – et même plusieurs millions dès qu’on étend un peu le périmètre – qui peuvent constituer autant un réservoir de main d’oeuvre ainsi qu’un grand espace de consommation. L’un peut appuyer l’autre.
3- La formation initiale et continue des établissements scolaires et universitaires présents sur le territoire est une clé importante. Près d’une vingtaine de collèges, une dizaine de lycées et enfin trois structures d’enseignement supérieur. L’Ecole des Mines, fleuron absolu, l’école de Droit et enfin Douai Biotech. On peut y ajouter les multiples sections de techniciens supérieurs ainsi que les classes préparatoires qui se trouvent dans les lycées.
4- Le réseau des entreprises est un point essentiel d’ancrage des pôles de compétitivité. Leur variété et leur force est au coeur de cette dynamique. Le territoire profite ainsi de la présence de Renault et de ses sous-traitants mais tout autant des PME ultradynamiques peu connues et pourtant absolument innovantes. Tiens, au fait, qui connait « Gènes Diffusion » de Frais-Marais ?
5- Les possibilités de foncier et leur coût méritent l’attention. Les premières sont très importantes dans la région car l’histoire a laissé de nombreuses friches qui sont autant d’opportunités, sans parler des accès déjà existants. Quant au coût, la comparaison avec les régions parisienne et lilloise est un avantage radical.
6- Les aides locales et nationales ne sont pas à négliger. Les zones franches comme les politiques de revitalisation sont déterminantes dans le déclenchement des implantations.
7- De même, le poids de la fiscalité est un facteur majeur pour le maintien des entreprises dans le territoire mais plus encore pour y fixer la population active, s’agissant des impôts locaux du Douaisis.
8- Plusieurs éléments objectifs s’ajoutent aux arguments qui précèdent. On y voit par exemple l’insécurité vécue ou réelle qui reste maîtrisée mais tout autant les efforts pour réduire la pollution dans un espace autrefois très industrialisé dans lequel les rejets étaient autant de menaces sur l’environnement.
9-Plus subtile est l’organisation politique des collectivités du territoire, notamment dans la prise en compte des impératifs de la démocratie participative pour répondre aux attentes de la population. Il s’agit de « rendre durable » le territoire en accroissant les capacités d’être et d’agir des résidents.
10- Enfin, nous pouvons rejoindre certains arguments du site de la CAD quant à la beauté du Douaisis en terme de paysage, de patrimoine et de biens culturels. Nous n’en manquons pas, valorisons les.

Vous aussi vous avez des idées, partagez les avec nous.