La lecture des rapports de la Cour régionale des Comptes est un exercice auquel devrait se livrer tout électeur. On y trouve des informations sur des sujets dont on ne parle jamais. Malheureusement, selon l’expression locale, ils « n’intéressent personne ».
Une bonne lecture
Evidemment, il faut, comme on dit, « entrer dedans » et oser affronter le jargon juridique, sinon comptable, de nos magistrats. On peut aussi regretter qu’au delà de ces difficultés de lecture, certaines dérives – toujours présentées avec une mesure qui en limite les effets – n’aient jamais la moindre conséquence pour personne.
En décembre 2020, la Cour des Comptes a publié un excellent rapport sur la gestion de notre commune. Il n’a reçu aucune publicité. On y découvre pourtant de tout, du bon et du mauvais, mais surtout des hypothèses qui permettent d’avoir une idée sur ce qui nous attend dans les années futures.
On perd du monde
Il y a une grande diversité de sujets, notamment financiers, dans ce document mais concentrons nous sur l’évolution de notre population dont la baisse continue depuis 1968 – son point haut à 49000 habitants – prouve l’étendue du déclin.
La Cour des Comptes retient en « population légale » au 1er janvier 2020, le chiffre de 40 605 Douaisiens. Signalons que nous avons été sauvés par le décret de 2019 lequel, réformant les vieilles et utiles dispositions de 1969, met à présent dans le grand tout la masse des « sans domicile fixe » auparavant comptés à part.
Pour comprendre l’intérêt du nouveau mode de comptage, l’INSEE met dans cette catégorie les personnes qui utilisent un service d’hébergement ou un lieu non prévu pour l’habitation. Cela concerne les « migrants » relativement courants à présent dans Douai mais aussi toute la population sans domicile qui se concentre dans la ville pour y trouver de l’aide.
Quoi qu’il en soit, passés sous la barre des 40 000, nous expérimenterons, pointées dans le rapport, toute une série de conséquences négatives qu’il convient de résumer ici.
On perd avec des conséquences
D’abord un effet budgétaire selon la Cour des Comptes qui considère la baisse régulière de la population de 1% par an comme inéluctable. Elle pointe pour cette raison la dégradation probable de la capacité d’autofinancement (CAF), c’est à dire la réduction de l’excédent de dépenses par rapport aux recettes, notamment fiscales.
Avec une « CAF » tombée à 5,3 millions en 2023 par l’effet de la perte des habitants, la commune sera dans l’obligation d’emprunter (21 millions) pour assurer plus de la moitié des dépenses d’équipements prévues (48 millions). Actuellement de 3,7 – ce qui est rassurant – le ratio d’endettement passerait alors à 8,6 années (durée de remboursement si toutes les recettes y sont consacrées), s’approchant du seuil d’alerte de 12 ans fixé par l’Etat.
La solution des magistrats est banale : adapter les dépenses de fonctionnement et d’équipement aux capacités financières des prochaines années, donc les réduire. Ils n’envisagent pas l’autre possibilité, la hausse probable des taxes pour ceux qui les paient, mouvement qui ne conduira évidemment pas, comme nous l’avons déjà présenté, à renverser la vapeur démographique, bien au contraire.
On perd des emplois
L’autre conséquence dont on ne parle jamais sera plus administrative. Il existe en France toutes sortes de règles qui dépendent du niveau de la population communale. Très sage, l’Etat souhaite éviter qu’un petit village ne rémunère ses agents comme pourrait le faire une grande métropole. L’idée est aussi, sur cette même logique, de limiter le nombre des fonctionnaires municipaux.
Passée sous le seuil fatidique des 40 000, « la commune ne serait plus en capacité de recruter certains cadres d’emplois d’encadrement supérieur », c’est à dire des administrateurs territoriaux, des ingénieurs en chef, des conservateurs du patrimoine et des bibliothèques, etc.
La Cour ne précise pas les conséquences en termes de rémunération pour ces cadres qui seront en voie de raréfaction. Rappelons les : quand un directeur général des services (9° échelon) reçoit un salaire brut de 4554 euros dans une commune de plus de 40 000 habitants, ce dernier passe à 3889 euros dans la strate inférieure. Il suffit de calculer la différence sur une année…
On agit, on y croit
La rapport aborde les moyens mis en œuvre pour « attirer de nouveaux Douaisiens » et donc conjurer ces dangers.
Les magistrats notent sobrement que « cet objectif n’a pas, pour l’instant, été atteint ». Il est vrai que les 42 411 habitants en 2016 sont à comparer aux 40 605 actuels, soit une perte de 2000 personnes en dépit de la modification des contours de la population légale. Au doigt mouillé à la douaisienne, la perte est sans doute en réalité de plus de 4000 habitants.
La réponse de « l’ordonnateur » apparait dans la ligne habituelle, mélange de déni et d’aveu masqués sous l’amphigouri. Il indique en effet que « la diminution tendancielle de la population est ancienne et qu’elle s’est accélérée ces dernières années ». Si la formule reconnait que le déclin vient de loin, le phénomène n’a pas été freiné durant les six années écoulées.
On n’y comprend pas grand chose
Plus intéressantes sont les mesures prises par la municipalité, telles qu’elle les présente aux magistrats qui ne sont pas, comme nous le savons, les électeurs, ni d’ailleurs les contribuables. On a droit, c’est de bonne guerre, à la mise en avant du fameux programme « Cœur de ville ». Pour autant, cette merveille est considérée comme « récente » – sous entendu : sans effets – car elle a « nécessité au préalable, la constitution d’un patrimoine foncier ».
Dans la foulée, le maire reste optimiste. Il déclare qu’à « partir de remontées d’informations de terrain (…) des résultats positifs commencent à apparaître ». Nous passerons sur la valeur statistique de cette affirmation et cela d’autant plus que quelques paragraphes plus loin les magistrats pointent la maîtrise du sujet par l’Hôtel de Ville : « Lors du contrôle, la commune a indiqué ne pas disposer d’étude, ni d’évaluation des retombées de ses projets d’investissement sur son attractivité ».
Devant ce constat peu rassurant, arrive aussitôt la solution miracle en forme de promesse dont on se demande pourquoi on ne l’a pas mise en œuvre tout de suite et qui d’ailleurs est loin de l’être : « Enfin, la commune envisage de créer, au sein de sa direction de l’urbanisme, une cellule de pilotage chargée du suivi des projets de promotion immobilière et de la valorisation de ses terrains ».
On fait des trucs quand même
Reste ensuite la botte secrète, le projet phare qui rachète toutes les fautes. Le maire cite « une opération de réhabilitation d’une grande enseigne commerciale régionale en centre-ville, qui aurait vu son chiffre d’affaires augmenter » . S’il serait excessif de critiquer cette réussite, qui a certes englouti beaucoup de sous publics, mais qui s’avère un succès commercial, on a quand même du mal à saisir le lien entre le déménagement du Furet avec l’évolution démographique de la ville.
Peut être qu’un amoureux des livres ou un adepte des matériels de bureau pourraient être poussés, après leurs achats, à s’installer dans la ville pour profiter de la proximité de ce magasin.
Dès lors, dans la même logique, il aurait été bon de citer la réussite flagrante du « Prévost » qui, comme le Furet, amène, n’en doutons pas, de nombreux habitants à Douai. Après un bon repas, il est certain qu’un habitant de Lauwin-Planque foncerait acheter une maison à côté pour s’y rendre tous les jours… à pieds.
Par contre, beaucoup plus évident quant à un éventuel impact sur le phénomène, « l’ordonnateur » cite « l’acquisition d’une ancienne caserne militaire (cf le quartier Caux) par un groupe spécialisé en matière de rénovation du patrimoine classé pour en faire de l’habitat » . On reconnaîtra que cette proposition est de bon sens. Reste à savoir quand même combien seront ces nouveaux Douaisiens et surtout quel en sera le profil social.
On pose des habitants à tout prix
Car il est possible de craindre que cette volonté de peuplement – vitale pour tout ce que nous avons exposé plus haut – ne se traduise par du n’importe quoi. L’évolution de la démographie douaisienne est évidemment un phénomène complexe – séculaire – qui ne peut se résoudre par quelques mesures bâclées.
Nous sommes devant deux futurs :
Le premier est un rêve. Une équipe soudée et dynamique, à l’écoute des citoyens, assume la baisse démographique pour la transformer en avantage. On libère des espaces, on détruit les logements insalubres, on restructure les cités périphériques. Le gel de la construction de logements sociaux et la réduction de cette offre déclenchent mécaniquement leur étalement dans les communes des alentours.
La baisse des taxes, vigoureuse pour faire passer la ville sous les taux des voisines, attire de nouveaux habitants comme de nouvelles entreprises, si possible à forte valeur ajoutée. Cette action est couplée avec le renforcement de l’offre scolaire et universitaire de la ville, sous-employée et sous-valorisée.
On fait enfin partout la promotion de la ville, mais pour ne pas mentir, on répond concrètement aux défis qu’elle connait depuis des décennies : l’esthétique immobilière, l’insécurité, la propreté, l’accès au centre-ville.
La seconde est un cauchemar. Une municipalité à la dérive tire à hue et à dia entre l’écologie punitive et l’incohérence économique.
Les décisions, qui relèvent de la pensée magique, ne reposent jamais sur une étude serrée de leur bilan coût/avantage.
inaccessibles sinon à pied, les commerces disparaissent. Les taxes flambent, ce qui pousse les taxés à fuir. Les valeurs immobilières s’effondrent.
Terrorisés par la vacance accélérée des logements, les édiles « font du social » pour les occuper à tout prix. Des centres d’hébergement où se bousculent « migrants » et « SDF » sont multipliés un peu partout, notamment en centre-ville.
Au bout de quelques années, Douai, après avoir perdu son palais de justice, le siège de son école des Mines et un bout de sa fac de Droit, compte 30000 habitants, relevant pour plus des 3/4 des minimas sociaux.
Aux abois, le maire réclame le classement de toute la cité, devenue un centre social à ciel ouvert, en politique de la ville…
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Idée évoquée voilà plus de deux ans par Douai Vox, une société française qui doit être abonnée à cet excellent site, propose aux actifs fatigués de la vie dans la capitale une solution intelligente d’exfiltration.
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Mais pourquoi nos décideurs ne prennent-ils pas contact avec eux pour installer un bureau à Douai ?
Max aime apprendre mais parle un peu souvent à la première personne. C’est un travers qu’il combat difficilement. Va falloir l’aider. Il adore la Scarpe et l’orgue de St Pierre, surtout les basses.