La liste qui fait pchitt!

Il convient de dire quelques mots des sénatoriales puisque nous avions, voilà quelques mois, analysé la candidature de notre voisin sinois Christophe Dumont. Le Douaisis sera-t-il représenté au Sénat cette fois-ci ?

Et bien non… comme prévu.

Qui s’y intéresse ?

On remarque d’emblée que cette élection, hors le microcosme des élus, mobilise peu, l’opinion ayant compris l’intérêt limité d’une « chambre haute » qui fonctionne en circuit fermé.
Si on avait demandé à l’homme de la rue, dimanche dernier, s’il était au courant qu’au même moment s’exerçait à côté de lui cette importante expression démocratique, il serait resté coi.

Ses opérations sont originales. On a les isoloirs, les bulletins, des listes, des campagnes, les chikayas qui vont bien etc. mais au final seuls les « grands électeurs » s’expriment. Ils étaient 5806 cette fois-ci, sur un corps électoral qui pèse 1,8 million de personnes (0,3% du tout).

Il faudrait faire des électeurs des « grands électeurs » , l’abstention disparaitrait !

Lors du vote à la préfecture du Nord, ce monde de privilégiés était ravi d’approcher pour une fois les ors de la République. Ce n’était pas, certes, Versailles, mais combien de conseillers municipaux se croyaient déjà au palais du Luxembourg.

Résumons.
Lille se taille comme toujours la part du lion avec plus de la moitié des sénateurs élus.
Sur les 11 du département, 6 retrouvent leur siège et tout ce qui va avec. On a 5 nouveaux dont quelques uns ne sont pas pour autant des béjaunes en politique, loin de là.

Les duos reconduits sauf…

La logique du précédent scrutin est respectée, notamment du côté des couples émanant des partis nationaux.

On a ainsi le PS qui réussit, grâce à son poids dans les grandes villes et d’abord Lille, à conserver ses deux sièges, en dépit de la candidature dissidente de Martine Filleul.
Sénatrice sortante, la déconfiture de sa liste rebelle en dit long sur le crédit dont elle jouissait dans son camp.

Même exploit du côté du Parti Communiste. Contre toute attente, malgré la perte régulière de municipalités, nos dinosaures marxistes parviennent à conserver leurs deux sinécures.
Il faut voir là l’effet de la célèbre discipline de « l’appareil » . Chaque délégué était conscient de l’enjeu vital de conserver au parti, alors qu’il ne représente plus grand chose, quelques strapontins au Sénat.

Plus rigolo, la double victoire de l’UDI par deux listes, la dissidente et l’officielle. Cette dernière était menée par Olivier Henno qui a divagué, tout au long de sa carrière d’élu professionnel, de partis en partis (CDS, UDF, Mouvement démocrate) pour finir par bénéficier enfin d’une certification centriste.
Son concurrent en rupture de ban, ci-devant maire de Potelle (400 habitants), Guislain Cambier, a réussi à être élu avec en filigrane la même étiquette. Nul doute que ces deux là vont se rabibocher pour défendre les couleurs de l’UDI.

Retenons la martingale. Cette dissidence a habilement permis à ce parti de s’affranchir des règles de la parité. Il a deux hommes pour le représenter, ce qui aurait été impossible avec une liste unique.

Mais quel est donc ce parti dont tout le monde se revendique ? « Divers droite » , c’est quoi ce truc ?

Rien ne montre mieux l’absurdité de ce mode de scrutin quand on compare les résultats du 1er tour des présidentielles de 2022 avec ceux ci-dessus : RN 29% > 7,6% – PS 1% > 14,2% – Macron 26% > 5% – LR 3% > 8% …

les LR qui se dispersent façon puzzle

Les Républicains n’ont pas brillé. Si Daubresse sauve sa peau, sa solitude atteste d’une existence de plus en plus fantomatique des LR du Nord.
Tout démontre que ses délégués se sont dispersés entre les macronistes, accommodés à la sauce philippienne – alias Horizons – la liste départementalo-poiretienne et le Rassemblement National.

Dans le genre plantage plus radical que les LR, notons l’effondrement des Insoumis locaux dont le cavalier seul, au nom de la révolution permanente, prolétaire et verdâtre, s’est avéré un échec cuisant avec 91 petites voix.

Plus amusante encore est la disparition d’un autre élu professionnel de haute volée, Philippe Marchand, qui n’a pas réussi, au nom d’un macronisme qui laboure de plus en plus la mer, à sauver son siège.
On sent bien qu’il aurait aimé, en regardant l’horizon, enfourcher un cheval qui l’aurait ramené au Sénat mais il y avait déjà quelqu’un dessus.

L’heureux cavalier, Franck Dhersin, ressemble beaucoup au précédent en termes de profil. C’est lui aussi un professionnel de la politique dont les changements d’écuries ont été suffisamment habiles pour lui permettre de sauter de mandat en mandat, UDF, UMP et maintenant « Horizons » . C’est un métier, on vous dit.

Cette victoire est une prémisse. Amusons nous à repérer les ambitions douaisiennes et autres qui vont se construire sur le génie havrais que les médias vont nous vendre en prévision des présidentielles.

Après Macron, voilà Édouard Philippe, l’homme des Gilets Jaunes, du 80 km/h et du désastre covidien…

Quelques gagnants ?

Impossible, évidemment, de passer sous silence la victoire du Rassemblement National, parti, c’est le cas de le dire, avec un peu plus d’une centaine de voix probables pour choper au final les 433 suffrages qui lui donnent un siège.
Comme déjà dit, les reports LR du fond de l’isoloir apparaissent évidents. Ils prouvent, après l’électorat qui a réalisé dans les faits « l’union des droites » , que la piétaille des conseils municipaux, notamment ruraux, commence à faire de même.

Beaucoup de commentateurs exaltent la supposée victoire de la liste menée par le fameux Dany Wattebled – sobrement intitulée « le Nord au Sénat » – parce qu’elle est arrivée en tête avec 889 voix.
Cette notion pour un scrutin de liste a peu de sens. Ce qui compte au final, c’est le nombre de sièges obtenus. Certes, elle en a eu deux mais comme le PCF, l’UDI et le PS.
Notons que ce dernier, c’est lui le vainqueur, prouve la solidité de ses racines SFIO ancestrales quand il abandonne le gauchisme. Sans Martine Filleul, il aurait largement dépassé le millier de voix et obtenu un 3° siège.

De ce point de vue, la « liste apolitique nordiste de défense des intérêts personnels » n’a pas été la machine de guerre qui devait renverser la table. Deux sièges seulement en dépit du soutien massif d’un certain nombre de parrains.
Ces derniers, mis ensemble, font sourire quand on cherche leur commun dénominateur. Jugez plutôt : le président départementalo-aggloméré, Christian Poiret, le patron de la MEL, Damien Castelain, le boss du Valenciennois, Laurent Degallaix et enfin le père Decool qui certes passait la main mais qui connait du monde.

Cette liste devait rafler tous les sièges avec ce qui précède mais surtout un style de campagne si particulier qu’il en a même fait les honneurs de la VDN.
Si on a bien compris, la république bananière du Nord a manié avec finesse le « big stick » des subventions et autres arguments de poids vers les récalcitrants.
Dans notre pauvre Douaisis, bien rares sont ceux qui ont osé défier ces puissants. C’est sans doute dommage, un 7° plan « divers droite » aurait peut être été gagnant.

On peut in fine s’interroger sur l’intérêt d’avoir au Sénat des sénateurs « apolitiques » à l’horizon aussi restreint. Bon d’accord, on exporte le concept du MENID au Palais du Luxembourg mais que pèseront concrètement ces deux élus ?

Pour conclure

Reste enfin une interrogation sur la dispersion curieuse d’élus régionaux sur tant de listes. On en arrive à se demander à quoi correspond la majorité dirigée par Xavier Bertrand.
Un esprit positif dira qu’il n’a pas mis tous ses œufs dans le même panier et que, super malin, il protège l’avenir.
Un esprit chagrin comme le notre pense au contraire que ça prouve une impuissance à contrôler la baraque, indication sur la capacité future à conduire le pays.

Pour conclure tout à fait, il est certes un peu triste que Christophe Dumont n’ait pas obtenu le siège rêvé et que le Douaisis reste une fois de plus absent des problématiques sénatoriales.
Mais pas de panique, Dany Wattebled nous défendra peut être…

Nestor aime la polémique douaisienne, surtout quand elle est enfouie sous des tonnes de silence. On peut trouver parfois un peu de mauvaise foi dans ses propos mais sans cette liberté, il n'y aurait d'éloges flatteurs.

2 Comments

  1. Cher Nestor, votre analyse des résultats de la récente élection des sénateurs
    est comme toujours pertinente…
    Je constate que le Douaisis n’a aucun élu ? Quelle importance pour son peuple,
    puisque dans cette élection entre-soi il n’est tenu compte que de l’opinion des
    gens d’appareil, plus précisément les « grands électeurs » (sans rire).
    Qui connait les sortants d’ailleurs, à part quelques-uns de Lille ou de l’Avesnois,
    les nouveaux candidats, à part leurs propres élus locaux ? Qui sait de quelle
    obédience ils sont ?
    On note chez ceux qui lisent encore la presse, que certains sont sortis du bois
    juste avant la date du vote, pour s’afficher dans des évènements locaux,
    quelques poignées de main, des photos de presse. Classique !
    Un local a raté le coche, la belle affaire ? Il avait déjà raté les départementales,
    il lui reste donc à tenter l’élection européenne…
    Membre d’une des nombreuses listes « divers droite », qui localement
    confirment leur confidentialité, bien que pourvu du franc et encombrant
    soutien du parrain divers droite/ménidien du cru (qui selon la presse semblait
    vouloir ainsi écarter en cas de réussite un rival potentiel pour 2026) ! L’échec
    local est donc commun.
    On notera quelques voix dissonantes, furieuses de ne pas avoir été consultées
    sur un soutien hors des règles d’appareil (fonds de commerce) du groupe local,
    mais est-ce qu’on leur demande leur avis, en général ?
    Ce résultat au pied du podium est peut-être l’effet collatéral de l’autre liste
    divers-droite locale (105 voix quand même), qui pourtant paraissait de la même
    droite diverse…
    Ainsi il restera pour l’instant un caillou dans la chaussure du monarque (celle de
    droite évidemment).

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