Douaisis Agglo lez Douai

Habituellement, nous ne nous occupons pas des affaires des voisins mais comme il y a un lien dans ce qui va suivre avec Douaisis Agglo, on ne résiste pas à l’envie de regarder de près les péripéties municipales de Lambres lez Douai.
De Caroline Sanchez ou Bernard Goulois, qui va sortir victorieux du marigot électoral de 2023 ?

La banlieue riche apolitique

Cette commune, refuge des bourgeois qui évitent la lourde taxe foncière douaisienne, est notre banlieue chic quand on la compare à Waziers, Lallaing ou nous. Notre taux de pauvreté est à 28% quand Lambres se situe à 10%…

Retenez le principe : moins on taxe et plus on a des riches. Mais comment est-ce possible ?

Longtemps gérée – oxymore – par l’homme des déchets, Martial Vandewoestyne, le choix de ce dernier de ne pas se représenter en 2020 en a étonné plus d’un. L’abandon de tant de responsabilités rémunératrices, patiemment obtenues par l’association étroite avec Christian Poiret, n’est pas dans les habitudes de nos élus professionnels.

C’est intéressant, Lambres. Martial Vandewoestyne l’a dirigée vingt ans, comme son prédécesseur, le regretté Jules Fromont. Si ce dernier était « sans étiquette » , son successeur était plutôt adepte d’une obédience à géométrie variable.
On a eu en deux décennies un apolitisme de droite oscillant entre les deux extrêmes. Les anciens Républicains diraient que c’est de l’opportunisme.

Le pape local de l’écologie

Déjà évoqué dans Douai Vox, retenons aussi le goût de l’écologie d’un maire qui en a fait son fond de commerce. Ce trait mériterait une étude serrée, notamment d’un bon paquet de décisions qui n’étaient probablement pas, avec ses petits 5000 habitants, dans les moyens de sa commune.

Les péripéties du Symevad et celles de Lambres relèvent en partie de cette propension absurde de nos pauvres élus à choisir des solutions « innovantes » sans toujours maîtriser les facteurs objectifs du succès.

Martial Vandewoestyne, comme tous les princes qui tiennent le haut du pavé du Douaisis politique à l’ombre du président au carré, n’a pas échappé à cette coûteuse malédiction.

C’est dans cette logique générale qu’il faut analyser les conflits qui ont déchiré le conseil municipal lambrésien.

Un maire improvisé à liste unique

Déjà, le moins qu’on puisse dire, c’est que la succession du sortant n’a pas été préparée avec beaucoup de soin. Une équipe de bric et de broc s’est constituée en 2020 sans stratégie, ni grande logique. Elle n’avait même pas une opposition qui aurait pu l’obliger à clarifier ses positions. Tout politologue le dira : le destin d’un parti unique c’est de créer des partis en son sein.

On a fait simple pour la tête de liste, choisissant comme souvent, le 1er adjoint en charge des finances, sujet qui donne l’illusion de l’expertise.
Dissipons la. Il existe dans les collectivités locales des services qui font le boulot et des élus qui n’y sont généralement pour rien. C’est déjà beau quand ils comprennent qu’un budget administratif doit être légalement à l’équilibre.

Historiquement, les chicayas ont très tôt débuté, excités par la personnalité de Bernard Goulois, maire improvisé qui a tenté la synthèse entre les intérêts de sa commune et ceux du maître tout puissant donneur de subventions. Ces derniers se confondaient en plus avec les appétits de la camarilla dirigée par sa première adjointe, Caroline Sanchez, ci devant 3° vice-présidente de Douaisis Agglo.

L’adjointe se voit pousser des ailes

On le plaint un peu, le maire sortant, d’avoir eu à ses côtés la co-listière cantonale de Christian Poiret. Ses ambitions s’avéraient d’autant plus grandes à Lambres qu’elles étaient étouffées partout ailleurs, communauté d’agglomération et département compris.

Ne cherchez pas chez Caroline Sanchez une décision, une idée, un truc « waouh » de sa part, dans chacun de ses mandats rémunérateurs, ça n’existe pas. Elle pouvait soutenir son maire dans un moment difficile. Elle tente de prendre sa place. L’histoire s’en souviendra.

Dans les péripéties, le premier épisode a été l’éviction d’Etienne Samain, débarqué au bout d’un an pour des raisons obscures. La rumeur dit qu’il avait signé son arrêt de mort en ne soutenant que d’une fesse à Lambres les conseillers départementaux sortants.
La trouille de perdre du couple Poiret – Sanchez explique le prompt châtiment affligé à l’infortuné adjoint et l’ardeur mise par ses anciens collègues à se partager ses dépouilles.

La commune de Lambres n’a plus de sous

Plus grave a donc été cette histoire de budget. On peut faire le pari que Bernard Goulois n’avait pas tout à fait mesuré la fragilité des finances de sa commune quand il en a pris la direction.
On évoque la guerre en Ukraine et toutes sortes de raisons exotiques pour justifier l’impasse. Lambres n’étant pas la seule ville confrontée à ces difficultés extérieures, si ça coince, c’est qu’il y avait un problème structurel.

Il fallait donc combler le « trou » découvert cette année. Il était profond, plusieurs centaines de milliers d’euros. Si les journaux ne donnent pas tous les détails, ils évoquent toutefois un projet magique de rénovation énergétique des bâtiments communaux.
Legs de M. Vandewoestyne, il semble que ce dossier, qui plombe les finances de Lambres pour plusieurs décennies, est la source du litige.

Bernard Goulois, pour maintenir cette affaire de rénovation en dépit des critiques internes, a coupé dans beaucoup de lignes budgétaires : les indemnités des élus, les subventions de certaines associations, notamment le CCAS. Il aurait été mieux inspiré, pour ne pas mécontenter tout le monde, de sucrer une seule rente et pas plus.

La marche électorale forcée

Couvant sous la cendre, les conflits ont rapidement fait jour par un vote du budget obtenu de justesse puis, après, une opposition collective médiatisée. Le plus marquant fut alors le réflexe des dits médias d’aller aussitôt interroger Caroline Sanchez sur ses intentions mais plus encore ses dénégations, contredites par les faits peu après.

Il est à mettre au crédit du maire un accès d’autorité pourtant éloigné de son caractère. Le retrait des délégations – et des indemnités – de cinq de ses sept adjoints a logiquement précipité les choses. Ces derniers, rejoints par plusieurs conseillers municipaux, ont démissionné, obligeant au renouvellement de la totalité du conseil.

La rapidité de réaction de la préfecture à programmer les élections est en elle-même une interrogation. Le budget était voté, rien ne pressait. Les mauvaises langues, dont Douai Vox fait partie, imaginent assez bien que ce raccourcissement des délais est lié à la perte des indemnités des factieux jusqu’au scrutin, y compris à la communauté d’agglomération.
Évidemment, si les élections s’étaient tenues à la rentrée de septembre, cela faisait un sacré trou dans le budget des « intéressé-e-s » pour parler comme notre écologiste local.

Une prime au sortant ?

Cette précipitation, outre l’avantage évoqué plus haut, permet aussi de prendre de vitesse les adversaires. Caroline Sanchez, ce qui n’est peut être pas le cas de Bernard Goulois, dispose déjà d’une équipe toute prête, de soutiens de poids dans le département et l’agglo. Faisons le pari que ses figurations dans ces instances seront valorisées comme il se doit.

Avec deux listes, ce qui en fait une de plus qu’en 2020, l’appel aux électeurs peut avoir le mérite de clarifier les positions.
La Gauche lambresque, peu fournie, elle aussi prise de court, aimerait bien jouer les trouble-fêtes avec une 3° liste. Si on en croit les présidentielles, elle pèse un petit 25% dans cette commune qui a donné à la droite un bon 45% (RN + Zemmour + Dupont-Aignan + Pécresse). Le centre, c’est Macron pour 25%…

Quoi qu’il en soit, quel pronostic pour ces futures élections ?
Généralement, l’électorat, qui n’aime pas les bricolages politicards au parfum de trahison, remet le sortant au pouvoir.
Si nous avions un conseil à donner à Bernard Goulois dont l’honnêteté ne peut être contestée, ce serait, dans cette campagne éclair, de prendre ses distances avec son prédécesseur et Douaisis Agglo. Les deux, qui se confondent, ne lui veulent pas du bien.

Il doit ensuite méditer l’adage qui doit primer dans cette affaire : les ennemis des ennemis sont des amis.