La capitale de Douaisis Agglo

Le siège de Douaisis Agglo - CAD _ Lauwin Planque

Bien calé, il est prêt à bondir sur la moindre occasion qui lui permettrait d’attraper un peu plus de pouvoir, un peu plus de responsabilités, un peu plus de prestige. Il a raison. Il est fait pour ça.

Un si modeste début

Il tient sa mairie depuis près d’un quart de siècle, record du prédécesseur battu. Son mandat est une machine bien rodée, presqu’une affaire de famille. La relève est à peu près prête.

Aux municipales, une seule liste, la sienne. L’opposition n’existe pas. Le marigot a été consciencieusement vidé. Les électeurs, quoique silencieux, paraissent contents. Ils sont pourtant de moins en moins nombreux à voter. Le record cette année : 382 voix sur 458 votants sur 1309 inscrits…

L’ascension a commencé en 2001 par la prise du canton ouest de Douai. Affiché à droite dans une couronne plutôt à gauche, Christian Poiret a terrassé son adversaire socialiste en jouant de sa personnalité mais surtout de son incomparable maîtrise des services rendus.

De spectateur, il devient au fil des ans un acteur qui compte. Sa commune est bien trop petite pour inquiéter quiconque mais son canton change tout. A l’assemblée départementale, il porte la contradiction aux maîtres socialistes qui ont mis le Nord en coupe réglée. Ils n’économisent pas leur mépris mais le crépuscule approche.

Très tôt, il avait évidemment pris pied dans la communauté d’agglomération du Douaisis par la vice-présidence masculine que tout maire reçoit en cadeau pour sa participation à l’intercommunalité. Il fait mieux. Il prend la responsabilité des finances, sujet qui intéresse et inquiète à la fois. Il pose surtout en expert celui qui le tient. L’administration de la CAD – 270 personnes – se charge de tout.

Une transition qui dure

En 2009, un concours de circonstances lui apporte sur un plateau la présidence. La démission surprise de Jean-Jacques Delille sonne enfin l’heure du « seigneur de Lauwin-Planque » ainsi que le nomme le Kanner socialiste.

En dépit des déclarations du moment insistant sur la reprise des rails du prédécesseur, peu de monde imagine qu’il ne puisse être autre chose qu’une transition.

Il est vrai qu’il succède à « l’aménageur dans l’âme », personnalité flamboyante qui cumulait à son profit tellement de puissance qu’elle est la clé de sa chute. Ce spécialiste des transports avait lui même remplacé Jacques Vernier, fondateur d’une CAD façonnée à son image. Le vieux chef est toujours conseiller communautaire, son influence subsiste mais, par la force des choses, sa position faiblit.

Comme lui auraient conseillé les Russes, l’ancien despote de Douai aurait dû se méfier des hommes à moustache. Peu à peu, le style du nouveau président marque la différence. Sa gouvernance, faite de réunions en forme de déjeuners et d’avantages pour ses obligés, rend sa position inexpugnable. Ce vendeur de métier se révèle sans égal dans la capacité de convaincre mais surtout l’élimination de la concurrence. On se croirait chez Amazon.

Le discours met en avant le consensus même quand il n’existe pas. On s’entend bien. On se gère sans clivage partisan. Leçon apprise à côtoyer les socialistes, le prénom prime, preuve d’une entente que seuls les mauvais esprits oseraient assimiler à de la connivence.

Mieux, la CAD invente des « groupes » sans aucun rapport avec les partis politiques. Bizarre mais ça marche. Ils permettent au président de disposer de majorités confortables transformant les rares opposants en simples figurants.

La soumission au patron est d’ailleurs un préalable absolu si on veut profiter de son soutien sans limite. A l’inverse, il ne fait pas bon de s’opposer. Les conséquences peuvent être lourdes comme certains en ont fait l’expérience mais surtout, signe d’une excellente maîtrise des troupes, personne ne sauvera l‘imprudent.

La communication est le sujet majeur d’un président qui n’éprouve aucune difficulté à se mettre en scène dans le journal de la CAD. Ce sont, il est vrai, les risques du pouvoir sans partage. On repère aussi, ici ou là, sa propension à présenter les dépenses de la communauté d’agglo comme si elles sortaient de sa poche. Il faut dire que l’avis des contribuables compte peu.

Demain, deux nouveaux projets au Raquet, derrière le truc pointu, Sourcéane…

Avant les municipales de 2014, une instruction gouvernementale permet enfin de réduire le nombre de conseillers communautaires. L’objectif de la manœuvre, réussi, est de limiter l’influence de Douai dans la CAD, surtout avec la perspective d’un changement de majorité dans son conseil municipal. Impuissante, la grande ville sans laquelle le Douaisis n’existerait pas, n’en peut mais. On crie. On s’agite. Mais la manœuvre est impeccable. Douai n’est plus le centre politique de la CAD. Il passe à Lauwin-Planque.

D’ailleurs, l’année suivante, la prise du conseil départemental par la droite ajoute un grade à son maire. Il devient premier vice-président, certes dans une configuration où les puissants Lillois sont en force. Les médias surjouent l’entente entre le président et son adjoint pourtant « très différents ». Quoi qu’il en soit, ces responsabilités ajoutent au prestige du second qui devient grand sur la Scarpe.

Le seigneur de Lauwin-Planque

Car Christian Poiret pourrait faire sienne la fameuse formule de Jules César, séducteur chauve certes mais glabre, qui aimait mieux « être le premier dans un village que le second à Rome. ». Notre président ne risque pas la députation pour des raisons obscures mais on se doute bien, comme les notables d’autrefois, qu’un mandat de sénateur lui irait bien.

Son profil y correspond. Il ne faut pas lui demander une analyse poussée des enjeux de la PMA ou des déterminations de la crise européenne. Ses incursions dans les territoires de la théorie sont rares. Gênée, la presse évoque avec des pincettes cette faible maîtrise des sujets «régaliens» , peut être parce qu’elle ne sait pas quoi en dire.

Loin d’espérer un destin national comme Jacques Vernier l’a vainement rêvé, il est au contraire l’élu de base qui trime pour les habitants, une pelle à charbon à la main. Il évoque de temps à autre son emploi de commercial dans une société de négoce de métaux qu’il aurait toujours conservé. Il est bien difficile de vérifier cette affirmation dont on se demande d’ailleurs comment elle peut se glisser dans tous ses mandats. Il vendrait de l’inox. Retenons que c’est bien choisi. Il résiste à tout.

D’aucuns peuvent trouver curieux qu’une personnalité si locale puisse gérer une communauté d’agglo dotée de compétences grandissantes, très supérieures à celles du début, quand elle était dirigée par un polytechnicien au profil de haut fonctionnaire.

Nous notons le goût du patron pour de curieux projets pharaoniques – Arkeos, piscine, boulodromes, patinoire, planétarium – qui ne paraissent recevoir aucun soutien des citoyens mais que Douaizizaglo® mettra en œuvre, coûte que coûte, avec nos impôts, parce que le président le veut bien.

On a déjà les boules

Posé à côté de la grosse ville, dans sa commune de Lauwin-Planque, sorte de « village Suisse » qui attire l’œil comme les jalousies, le Président Poiret savoure l’immensité d’un pouvoir que personne ne peut plus lui disputer.

On regrette qu’il ne soit pas maire de Douai qui n’en aurait que des avantages. La cité compterait peu de logements sociaux et recevrait sur son territoire de multiples entreprises. Douaizizaglo® la soutiendrait à fond dans tous ses projets au cœur d’un siège installé au pied du beffroi. Nous n’aurions qu’une seule liste à choisir dans l’isoloir avec en prime aucun débat, aucune opposition. Le rêve.

Nous pourrions même prendre le sujet par l’autre bout. Voyons cela comme une possible conséquence des élections municipales. Elles ont un peu bougé les lignes du conseil communautaire mais sans donner à Douai les moyens de ses ambitions.

En dépit de l’augmentation de sa représentation à 19 conseillers, c’est même devenu pire. Devant l’opinion sidérée, par la seule volonté du « boss » , plusieurs « combinazioni » agitent actuellement Douaizizaglo®. Elles souhaiteraient évacuer le maire de la ville-centre des instances communautaires décisionnaires. On ne comprend pas trop pourquoi mais sans doute pour montrer au mal élu qui est le vrai chef, non mais.

Dès lors, pourquoi se prendre le chou ?

Plutôt que réformer cette intercommunalité qui mène le Douaisis vers l’abîme, supprimons Douai qui ne sert décidément à rien. Découpons ce truc inutile en petites unités de 1600 habitants, à liste unique, dotées de maires au profil de soliveaux, qui opinent à tout sans broncher.

Renforçons ainsi la capitale et le maître de Douaisis Agglo !

Quand je serai grande, je serai politicienne

Coline Craye politicienne à Douai

Incontestablement photogénique, elle est apparue dans l’univers politique communal quelques mois avant les élections. De ce néant, un début de notoriété découla de la lutte pour obtenir l’investiture macronienne

Il y avait du monde sur les rangs. Venir au secours de la victoire est un réflexe politique. On se serait cru à Neuilly où quatre impétrants se disputaient l’investiture LREM. Il est vrai que lorsqu’on est certain d’être élu par la grâce d’une étiquette partisane, l’électeur n’existe plus. Seule compte la désignation. Avant.

Avec elle, ils sont trois. Sa rivale est la doublure du député qui lui doit probablement, pêché originel, son élection. Son rival, socialiste en rupture de ban, se croit, par son lâchage récent du maire sortant, taillé pour le rôle. Tous les deux visent l’investiture du « nouveau monde ». La République en Marche va révolutionner le pays, peut être pas la ville, mais plus sûrement leur destin, à eux.

Il ne fallait pourtant pas être grand clerc pour comprendre, comme dans toute bonne émission de télé-réalité, que les jeux étaient faits. Si la concurrence existe, c’est pour donner du relief au gagnant. En dépit des apparences, ce que voit la galerie n’a pas d’importance. Ce qui compte ce sont les ressorts secrets du plan marketing.

La clé du casting de la candidate repose sur le lien subliminal qui doit s’imposer dans la tête de l’opinion entre elle et la ville. Le profil de la jeune dame doit faire envie.  On cherche l’addition magique de sa nouveauté avec son amateurisme prometteur, sa jeunesse irrésistible, son sexe faible, sa prétention académique, son origine locale, affirmée ici et partout :

« je suis de Douai, je suis née à Douai, je vis à Douai, mes parents sont de Douai, j’aime Douai… ».

Toutes les cases sont cochées. Sans doute peut-on repérer dans ce brouillard anesthésiant la minceur du passé professionnel. Avant l’apparition subite dans le décor douaisien, on ne compte à ce jeune prodige, après une fugace collaboration dans une agence de conseil, que de brefs passages dans le monde impitoyable des collectivités locales.

Les initiés savent que la compétence n’est, dans cet univers médiocre, qu’un détail. Passer d’un parrain à un autre, comme on change de monture en équitation, peut démontrer d’un problème avec la fidélité. Plus gênant, il porte le risque d’inimitiés inexpiables que la victoire peut heureusement atténuer. Il suffit d’être, comme Macron, ambitieux. Le modèle est là, prêt à l’emploi.

L’investiture LREM obtenue sans coup férir, l’analogie avec le président en exercice, surjouée, frappe d’abord les esprits. La jeunesse de la candidate est rappelée ad libitum au risque du ad nauseam.

Plusieurs personnalités locales, conquises, exaltent cette caractéristique qui leur fait défaut. Chevaux de retour, ces perdants des scrutins passés rivalisent de louanges sur leur pouliche. L’argument de l’âge évite de penser mais, pour cette raison, s’avère habile.

Car l’assimilation au macronisme est complète. Comme à Hesdin, la jeunesse triomphe de tout, c’est bien connu. Elle est l’argument de la campagne. La ville sera sauvée par des trentenaires.

Peu à peu, on dévoile à contrecœur le positionnement politique. Il faut bien y passer. Mais n’exagérons pas trop l’étiquette LREM même si elle a permis de mettre dans le vent les concurrents. Valoriser le piètre bilan du gouvernement dans un département où pullulent les Gilets Jaunes n’est pas simple.

Il reste toutefois le truc de l’ancrage local même si on n’habite plus depuis longtemps dans sa ville natale. La duacité est la bonne idée qui prend la forme d’un slogan. La répétition est la clé de la pédagogie :

« je suis de Douai, je suis née à Douai, je vis à Douai, mes parents sont de Douai, j’aime Douai… ».

Si la jeune dame exagère ses racines, il est pourtant vrai qu’elle sort d’une strate sociale incontestablement douaisienne.

On perçoit du conservatoire de musique, du Saint Jean, de la messe, du Rotary sinon du Lions Club, des études respectables et des métiers de notables, de ceux dont ne profiteront jamais les prolétaires qu’elle affirme tant aimer parce qu’ils sont la clé du scrutin. Les fondamentaux de la bourgeoisie se retrouvent dans une sollicitude de dame d’œuvre, à coups de frites gratuites s’il le faut.

Sous un visage d’ange, la jeune femme se révèle une redoutable machine de guerre. Sa campagne est parfaitement menée. Les moyens sont conséquents. La stratégie ne laisse rien au hasard. On a affaire à des pros. Il y a du métier dans le back office.

On pompe, certes, les idées des autres candidats quand on n’en a pas et même Douaivox. Il arrive que les propositions soient idiotes. On avance des chiffrages au doigt mouillé dans une ville où la statistique n’existe pas. C’est comme la mousse, les contours manquent de netteté mais on en met partout.

Personne n’occupe le terrain comme la dame à la mouche. Elle visite les associations, de la plus importante à la plus obscure. Trois petits tours, une photo et hop, le tout immortalisé sur internet dans la seconde. Sa présence sur les réseaux est inlassable, bien servie par une infanterie qui tire sur tout ce qui bouge. La confusion d’opinions de ces soldats – certains affirment, les pauvres, détester Macron – prouve bien qu’il y a un loup quand c’est flou.

Le positionnement des troupes est flottant mais le discours de la candidate repose à l’inverse sur une parole parfaitement construite. De ce point de vue, notre fine lame macronienne pourrait être la petite sœur de Frédéric Chéreau ou même la petite fille de Jacques Vernier s’ils avaient été douaisiens.

De fait, son socle est celui de son milieu d’origine, le centre-ville bourgeois ou du moins ce qu’il en reste. Pour assurer cet ancrage, elle a réussi à débaucher quelques militants LR survivants des guerres civiles de la droite locale. Idiots utiles, ils se voient déjà aux manettes. Le pouvoir enfin. Enfin, peut être pas.

Car apparaît un caillou dans l’escarpin de notre Marcheuse. Les LR ont sorti des cartons un concurrent du « canal historique ». Ses troupes sont certes, aussi étiques qu’âgées mais elles sont loyales et disposent de l’appui de la CNI du parti. Leur candidat n’est pas né sur les bords de la Scarpe, C’est son péché originel. La riposte de la candidate est facile et son refrain fait mouche :

« je suis de Douai, je suis née à Douai, je vis à Douai, mes parents sont de Douai, j’aime Douai… ».

Si un concept devait marquer la campagne de la candidate LREM du début à la fin, ce sera une ambigüité dont il parait qu’on ne sort qu’à son détriment. C’est à ce prix que devenue grande, on sera politicienne.

Mme Craeye répugne à endosser le bilan d’un gouvernement dont elle est pourtant la représentante officielle. Elle n’a rien à voir avec lui. Elle défend l’association de « la droite et du centre », concept qui sonne bien aux oreilles d’une notabilité douaisienne dont les ancêtres, qui aimaient Louis-Philippe et la SFIO, détestaient les extrêmes qu’ils ont réussi – ce n’est plus le cas – à reléguer aux périphéries.

Dans le même mouvement, on n’est pas à une contradiction près, l’expression publique et privée dévoile une conception singulière de la politique. Si on ne représente pas le gouvernement, il serait toutefois bon qu’un maire soit de son bord pour profiter d’une subvention, d’une décision positive, à l’inverse des élus qui auraient le malheur de ne pas en être.

Mieux que Janus qui se contentait de deux faces, Mme Craeye joue de tous les registres, de tous les niveaux. Il y a le « on » délivré d’une voix douce avec le sourire puis le « off », celui de ses partisans qui mènent sans relâche une campagne de caniveau où l’excès côtoie souvent la haine. C’est à se demander si ces stratèges masqués n’ont pas fait leurs armes à Hénin-Beaumont à la bonne époque d’Eugène et de Gérard.

La présence d’une liste officielle LR qui casse le rêve explique sans doute la violence des discours et les expédients de bas étage. Tous les moyens sont bons pour dézinguer l’adversaire. On perd ses nerfs à moins que ce soit la marque profonde d’un caractère sinon une future méthode de gouvernement.

Comme leur patronne, il est vrai qu’ils s’y voyaient déjà, les colistiers. C’est bien embêtant tout ça. La route sans histoire vers le beffroi s’avère un sentier semé d’embuches où rien ne se passe comme prévu. Six listes à Douai. Qui l’eut cru ?

La veille d’un premier tour – qui ouvre la crise sanitaire – voit arriver dans les boites aux lettres un incroyable tract rédigé avec une science propagandiste qui ferait passer les Staliniens pour des amateurs. On se prévaut de soutiens qu’on n’a pas. On ne sait jamais, sur un malentendu ça peut marcher.

Admirons la gestion des titres, le propos qui frôle sans cesse le précipice sans jamais y tomber par une utilisation consommée des formules. Seules comptent les images.

Après la mascarade de cette élection confisquée et d’une gestion de la crise qui restera dans les annales, le confinement qui suit, décidé par le gouvernement qu’elle représente, voit Mme Craeye jouer les utilités. Ses concurrents, peut être par l’extraordinaire d’une situation qui réclame des gens normaux un peu de retenue, restent discrets.

Devant les yeux stupéfaits des Douaisiens interdits de bancs publics comme ils sont privés de masques, de tests, de vaccins, la candidate – qui n’est pas LREM, c’est compris ? – sauve Renault (je connais Le Maire), va sauver l’hôpital de Douai (je connais Buzyn, ah zut, maintenant c’est Véran, je le connais aussi), sauvera ses commerces (je connais Darmanin), régénérera la France comme Jeanne d’Arc. Mais non, ça, c’est impossible puisque Jeanne est lorraine ! Car nous savons bien que :

« je suis de Douai, je suis née à Douai, je vis à Douai, mes parents sont de Douai, j’aime Douai… ».

Docteur Chéreau et Mister Frédéric

Docteur Chéreau et Mister Frédéric - Ville de Douai

Devenir maire n’est pas difficile, l’être l’est cependant.

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Tic Tac Tic Tac…

C’était bien mal parti. Les six ans de mandat s’étaient écoulés inexorablement. Rien n’avait pu ralentir la marche du temps, cette malédiction contre laquelle ni l’élu ni personne ne peuvent rien.

Il s’était pourtant convaincu qu’il avait du délai, qu’il pourrait tout faire plus tard mais un jour, impossible d’y couper, faut y passer. Les élections déboulent avec leurs glorieuses incertitudes démocratiques. C’est là que le politicien professionnel découvre qu’il faut marcher ou mourir.

Il sait depuis le début qu’un mandat n’est pas seulement le moyen d’une politique, c’est d’abord un état, un métier. Il n’est même pas certain en cas d’échec qu’il aurait un parc à son nom. Six pauvres années n’y arriveraient pas.

Douai au coeur… de la catastrophe

L’impérieuse nécessité de reprendre le flambeau s’imposait donc à Frédéric Chéreau. Le problème, c’est qu’il ne pouvait mettre en avant un bilan très reluisant.

Dans le genre structurel, ne relevant pas complètement de son mandat mais quand même un peu, la baisse de la population mais surtout son appauvrissement étaient devenus flagrants. Tous les deux attestaient de l’affaissement d’une activité économique incapable de fixer les habitants, ni de les soustraire à une pauvreté galopante.

Un autre sujet était plus visible. La fermeture des commerces du centre ville, catastrophique, relevait plus clairement de la responsabilité du maire. Tétanisé par le risque, il n’avait osé dézinguer le plan de circulation fou légué par le vieux mentor. Ce dogme, avec une création de zones commerciales périphériques jamais empêchée, étaient la cause principale du désastre.

Il y avait eu aussi ces quelques épisodes embêtants qu’aucune gesticulation n’avait pu conjurer : la disparition de la brasserie millénaire, la réduction des dessertes TGV, la spécialisation du ressort judiciaire, l’impuissance de Douai dans l’assemblée de Douaizizaglo® etc.

Enfin, s’imposant encore plus nettement, la dégradation continue du patrimoine de la cité était un caillou, un gros grès, dans la chaussure du maire. Comment justifier que ces monuments aient pu être ainsi abandonnés pendant tout un mandat ? Le plus symbolique était celui-là ou mieux celui-ci mais plus encore ce dossier dont on est à peu près certain qu’il ne bougera pas avant des dizaines d’années.

Prochainement… C’était quand déjà ? Il y a 6 ans !

Ce bilan pouvait se résumer en une simple question : Douai avait-elle enrayé son déclin depuis l’arrivée de M. Chéreau aux affaires ? Evidemment non. Aurait-il pu être pire ? Sans doute pas.

Le programme commun de la Gauche

Quand le bilan n’aide pas, l’étiquetage partisan, sinon la politique nationale, peuvent aider à le dépasser. En 2014, Frédéric Chéreau avait réussi contre toute attente l’exploit du « break » , s’imposant localement quand à la tête du pays, Hollande, socialiste comme lui, était totalement à la ramasse.

Cette fois-ci, c’est bien plus compliqué. L’épidémie macronienne était passée par là. Le PS perdu corps et biens, le maire aurait pu, comme ses amis des Hauts de France qui ont préféré trahir plutôt que tenir la position, devenir un adepte du « en même temps ».

Retenons à son avantage que placé devant cet embouteillage politique, Frédéric fit le pari de conserver l’antique union de la gauche – PS/PC légèrement verdis – « butte témoin » d’un passé révolu probablement unique dans toute la France. S’il n’en restait qu’un ce serait lui.

Là bas, au fond, le grand-père de Frédéric Chéreau

Un mandat d’un mois est bien suffisant

Il y avait certainement un peu de panique autour de lui comme dans sa tête mais l’homme avait du ressort, surtout pour conserver le boulot. Il savait moins bien le faire mais si on part du principe qu’une opinion publique n’a pas de mémoire, un peu de visibilité médiatique au dernier moment peut aider. Politicien, c’est un métier.

L’excuse est souvent pire que la faute. C’est ainsi qu’il faut juger l’incroyable frénésie d’inaugurations dans laquelle s’est plongé Frédéric Chéreau jusqu’à la seconde où elles étaient légalement possibles.

Gymnases, places, centres sociaux, trottoirs, enrobé drainant, tout y est passé. Ajoutons à cet étonnement l’amélioration du nettoyage des rues, l’implacable chasse aux crottes de chien, la nouvelle célérité des services municipaux…

Pourquoi donc un mandat municipal doit-il durer six ans quand on peut faire tant en quelques semaines ?

Les bastions sont bétonnés

Accompagnant cette stratégie d’urgence, notre sortant s’était aussi appliqué, à l’ancienne, à travailler ses bastions électoraux, le faubourg de Béthune étant le modèle du genre. Chacun sait et notre maire plus que tout le monde qu’en marketing gagner des clients est toujours plus difficile que de les conserver.

Le quadrillage en règle du cœur de cible – par familles, clans, assos et catégories – démontra de son efficacité dans certains bureaux de vote. Le jour des élections, son effet fut décuplé par  la « Grande Peur » du Covid. Poussant l’abstention à un niveau jamais atteint, elle renforça parmi les rares votants la proportion de ceux qui avaient intérêt au maintien du maire en place.

Ils savaient, eux, ce qu’ils avaient à perdre avec son départ, à l’inverse de l’incertain contraire. On sait ce qu’on perd et jamais ce qu’on gagnera, c’est bien connu.

La face visible de l’iceberg

Si on n’avait tenu compte de la faiblesse des signaux dans le bruit de la ville, rien ne permettait d’entrevoir la victoire de Frédéric Chéreau. Les relais étaient rares dans les réseaux sociaux tandis que les productions écrites se réduisaient à leur plus simple expression.

Bien sûr, au plus près de lui, c’était quand même le désert. Invisible durant six ans, l’équipe municipale sortante avait été renouvelée selon des critères hermétiques. Elle n’en était pas plus convaincante.

La liste du maire, retenez ces noms, vous n’en entendrez plus jamais parler

Frédéric Chéreau ne compta pas beaucoup de soutiens extérieurs. Ce vide démontre en passant que Douai ne représente plus aucun enjeu pour beaucoup de leaders politiques, hors ceux du territoire et encore. Seul un Kanner démonétisé lui donna en passant un petit coup de main.

Cette modestie était la face émergée de l’iceberg. La suite allait démontrer que l’adhésion au maire, peut être un peu honteuse donc rarement criée sur les toits, n’était pas si limitée que ça. La prime au sortant, importante, était sous le niveau de la mer et personne ne la voyait.

Sous la mer, les électeurs du maire sortant

Les adversaires peuvent être des alliés

Car si l’effet produit par la campagne de Frédéric Chéreau restait à vérifier, son salut pouvait aussi provenir des travers de l’adversaire. Là, notre édile était servi.

Il y avait d’abord les alliés qu’il comptait dans le camp d’en face. S’ils étaient souvent masqués, certains étaient plus repérables que d’autres. Ainsi Jacques Vernier qui, voilà trente ans y aurait regardé à deux fois avant de soutenir un « socialo-communiste », ne lésinait pas sur le soutien donné à son fils spirituel, non sans plonger la Droite locale dans la confusion.

Il eut donc devant lui des adversaires aussi divisés que multiples. Avec six listes, les électeurs de Frédéric Chéreau seraient toujours plus nombreux que ceux de chaque adversaire pris séparément.

La vérité n’est pas bonne à dire

A ce stade de l’analyse, il faut se pencher sur le discours et la posture de notre maire pour décrire la dualité redoutable dont il est capable de faire preuve en maintes situations. Nous devons sacrifier au portrait psychologique.

Si le docteur Chéreau délivre sous tous les temps et toutes les circonstances une parole maîtrisée, Mister Frédéric est plus approximatif. Ce dernier, comme plusieurs épisodes l’ont prouvé est absolument capable de mentir, y compris lorsqu’il est mis devant les évidences les plus marquées.

Interpelé sur l’absence d’une politique, d’une action, d’un dossier, il répondra toujours qu’ils existent, qu’ils sont en cours, qu’ils sont sur le point d’être réglés. Ce travers peut être une qualité politique mais il révèle une curieuse conception morale. Le mensonge dure peu, la vérité est éternelle.

Ce travers le conduit ainsi à malmener les faits sans aucune vergogne : la ville ne perd aucun habitant, elle en gagne, le commerce n’a jamais été aussi bien portant, la sécurité est en progrès constant grâce à ses actions, la situation financière de l’hôpital de Douai est bonne… C’est simple, vous ne l’entendrez jamais reconnaître une erreur, un oubli, un ratage.

Tout va très bien à Douai

Rien ne résume mieux cette vision altérée du réel que la satisfaction exprimée par notre maire de voir sa ville longuement citée dans le New York Times. La description de Douai y était terrifiante mais à sa mode habituelle Frédéric Chéreau présentait sous un jour favorable ce discutable intérêt américain.

S’agit-il d’un réflexe inconscient de défense ou un cynisme de politicien de métier ? Il reste certain que refuser le réel revient à s’interdire de souscrire aux discours négatifs. Une vision lénifiante, quelque soit le moment ou le sujet, outre d’être éventuellement prédictive, peut plaire.

Elle n’est pas ainsi sans effet sur un électorat qui, peu rompu aux analyses politiques, en a peut être assez d’entendre sans cesse, ici et partout, que sa ville est un trou en perdition dans lequel rien ne fonctionne.

Il y a de la fierté douaisienne dans cette négation de la réalité.

Trèfles, gri-gri et baraka

Tous ces artifices n’étaient pourtant pas suffisants pour assurer la victoire. Il fallait un élément supplémentaire : la chance.

Il est un peu curieux de considérer la crise sanitaire sous un jour positif mais, en toute objectivité, le cumul des facteurs favorables au maire sortant durant cette période a été inouï. Comptons les conditions du scrutin de premier tour, le confinement qui a suivi et enfin le second tour organisé à la veille des congés d’été. L’ensemble a été une circonstance incroyable pour celui qui tenait l’hôtel de ville.

Mieux vaut la chance que bien jouer

Napoléon appréciait les généraux qui avaient de la chance. De ce point de vue, il aurait aimé le Grand Frédéric. Sur un mélange savant de gestion quotidienne et de propagande subliminale, ces trois mois inespérés lui donnèrent l’occasion de surclasser facilement ses adversaires.

Mais il y a plus profond, conclusion qui retrouve des déterminants déjà évoqués qui doivent pousser à la modestie tous les opposants de Frédéric Chéreau. Ils prouvent qu’à Douai on peut conserver son mandat en dépit d’un bilan médiocre, une campagne peu active et des contradictions massives.

La bizarrerie de ce paradoxe n’est qu’apparente. Faisons l’hypothèse qu’elle est d’abord dans l’état social d’une ville qui, inexorablement, conforte le pouvoir d’un maire de gauche parce que la population se confond exactement avec son électorat.

Le déclin de la ville- Douai demain Denain – n’est pas une évolution défavorable d’un point de vue électoral, donc la conservation d’un pouvoir. Le pression fiscale qui pousse les classes moyennes et supérieures à quitter la ville modifie considérablement le profil politique d’une cité appauvrie.

Territoire dédié aux subventions et aux assistances diverses, le Douai du futur possède un visage : docteur Chéreau et Mister Frédéric enfin confondus.

Tribune libre

tribune libre douai ma ville 2

Il fut un temps où les mairies n’avaient aucun besoin d’organe de presse célébrant leur action, toujours positive, avec la frimousse des élus sur à peu près toutes les pages. Elles se contentaient d’afficher leurs décisions sur les murs de l’hôtel de ville.
Le lieu de parole était celui de l’exercice du pouvoir, l’action mais pas la description de l’action. Le conseil municipal voyait ses comptes rendus rapidement communiqués au bon peuple. Le contact direct des conseillers municipaux avec la population était constant, histoire de prendre au quotidien le pouls de l’opinion locale.

Pour le malheur des citoyens ont fleuri depuis les « journaux municipaux », publications bizarres dont le ton oscille entre celui de la Pravda de la bonne époque ou celui de l’actuelle Gazette des Communes.
Nous avons déjà l’étonnant prospectus publicitaire de Douaizizaglo® mais aussi l’inusable « Douai notre ville » dont le titre parait parfois bien éloigné de ce qu’il énonce. Ce « nous inclusif » ne doit pas être en effet autre chose que le célèbre « nous de majesté ».

Pour être un peu objectif, ce qui n’est pas forcément la finalité de Douai Vox, il faut reconnaître que l’organe du parti communal reste mesuré dans la célébration des hauts faits notre conseil et surtout ceux de son directeur de la publication. Il donne même – c’est la loi – une part d’expression à l’opposition, comme le dernier numéro de « DNV » la présente en page deux. S’il est un gage d’équilibre démocratique, l’exercice donne lieu à un propos tellement déconnecté de la réalité qu’on balance entre le rire et la consternation.

Loin de préparer la campagne électorale à venir, ce qui serait sans doute logique venant d’élus qui seront probablement partie prenante des listes candidates, nous avons droit à une « tribune libre » dont la liberté pour le coup ressemble à celle qui permet de dire n’importe quoi.

Un esprit avisé peut croire que cette vacuité découle des règles pré-électorales obligeant les auteurs à ne parler de rien. Pas du tout. Le code ne permet pas à un maire de s’opposer à la publication d’articles d’une tribune libre, même quand ils sont assimilables à de la propagande. Le droit d’expression des conseillers municipaux d’opposition est total.

Mais que font donc nos représentants de cette possibilité ? Et bien rien.

tribune libre P2 douai ma ville
Extrait de la page 2 de Douai ma ville -Novembre 2019

D’un côté, nous avons droit à un rappel de la récupération miraculeuse – en 2011, c’était hier – du tableau de Jules Breton, « la fille du pêcheur » volé par les Boches en 1918. La mise en perspective est celle d’un stage de formation (de qui ? pour qui ?) susceptible d’améliorer la restitution des œuvres perdues dans les tourmentes du passé. On se perd en conjectures pour savoir ce que vient faire ce sujet – certes hyper stratégique – dans la feuille de chou municipale, sauf à imaginer que cette notule puisse être écrite par le maire lui-même.

Mais le pire est sur la colonne à côté, bien à droite. Cette fois-ci, le responsable local d’un parti politique connu, peut être bientôt à la tête de la ville, nous assène des considérations invraisemblables sur la « décadence » de la France. Cette liste mériterait d’être inscrite sur les murs du Beffroi pour que son absurdité soit connue de tous pour des siècles et des siècles. L’auteur doit être un adepte du « coupé-collé » qui, trouvant dans un paquet de lessive nationale le topo qui va bien, l’a posé ici à l’arrache en style télégraphique. Il devait penser qu’on ne le lit jamais.

Si nous étions Frédéric Chéreau, la lecture de ces deux « tribunes libres » nous mettrait en joie quant à la qualité et la pertinence des oppositions qui bientôt se lèveront contre nous.

Opposants encore un effort pour être oppositionnels !

Eloge du clivage

eloge du clivage -non à l'unanimisme

Les ravages de l’unanimisme

Une des clés pour comprendre le fondement de notre vie politique locale est l’unanimisme qui teinte toutes les décisions de nos élus. Pour le nouvel arrivant, habitué aux conflits et débats qui se produisent partout ailleurs, ce trait étonne. Il est encore plus surprenant quand nos représentants célèbrent cette concorde comme un avantage unique, du genre de ceux que monde entier nous envie. Le message est répété : « On s’entend, tout va bien ». Au final, cela revient à dire à l’opinion : circulez, y’a rien à voir. 

Le Douaisien aura repéré que cet unanimisme sacré est un moyen très efficace de faire taire les critiques et surtout de s’en défendre. Nous engageons nos lecteurs à compter les fois où on entend dans les médias ou ailleurs, après la découverte fortuite d’un ratage, que « tout le monde était d’accord ». La décision d’un seul devient par cette grâce l’affaire de tous. Ce n’est pas bête.

L’ignorance est mère de l’unanimisme

Qu’on ne s’y trompe pas. Cet unanimisme désastreux ne provient pas, comme un observateur distrait pourrait le croire, de la prescience de nos décideurs, génies vivants capables de distinguer, dans une forêt de complexité, le sentier lumineux de la vérité. Il provient de stratégies délibérées qui visent toutes à obtenir ce bien pratique résultat.

Il y a d’abord l’organisation consciente de l’absence d’expertise. Ceux qui votent dans ces assemblées et autres conseils ne connaissent pas grand chose aux dossiers sur lesquels il sont appelés à trancher. Les intéressés, pour se défendre, diront que ces choses sont très techniques et qu’au fond il n’est pas très important de tout connaître. Ils ajouteront enfin, selon le principe d’immanence évoqué plus haut, qu’ils font totalement confiance aux chefs qui décident pour eux.

Pas de concurrence

Il y a ensuite l’autre bout de ce qui précède. 0n ne met pas d’élus spécialistes tout près de soi pour éviter qu’ils puissent un jour faire de l’ombre. Ayant beaucoup de mal à gérer la contradiction, nos patrons ont soigneusement organisé leur pouvoir dans une configuration qui les protège de toute menace. L’exemple vient d’en haut. Regardons le profil des suppléants de nos députés et autres sénateurs. Quand ils sont non conformes, à l’exemple de celle de Dimitri, la mise au pas est immédiate.

Regardons encore notre conseil municipal où, hors une opposition d’ailleurs bien hétérogène, tous les membres opinent en silence. Dans cette masse, nous serions bien incapables de repérer la moindre parole audible, c’est à dire experte. C’est un des charmes de notre belle cité que sa capacité de consentir sans dire un mot.

C’est pire encore dans notre Douaizizaglo® où siègent pourtant des maires qui devraient savoir de quoi il en retourne. Peut être qu’ils n’y comprennent rien, ce qui serait inquiétant. Préférons croire que l’explication d’un soutien si attentif se trouve ailleurs. Ils se gardent bien d’amener la contradiction parce que le prix à payer serait bien trop cher comme certains l’ont déjà expérimenté.

Speak No Evil, See No Evil, Hear No Evil

La critique n’abîme pas Douai

L’unanimisme provient enfin d’une confusion sur le statut de la critique. Quand Douai Vox© brocarde les élus, notre ville n’y est pour rien. Imaginer que ce discours écorne son image est un contre-sens. C’est d’ailleurs l’argument de ceux qui ne souhaitent pas voir étalées leurs insuffisances.

Le discours est connu « on sème la zizanie, on dresse les gens les uns contre les autres, on joue le jeu des extrêmes », bla, bla, bla…


Quoi de plus terrible que de découvrir des Lillois qui ignorent jusqu’aux Gayants mais qui connaissent dans les moindres détails, un sourire aux lèvres, les péripéties du « tramway douaisien qui n’est qu’un bus » ?

Tous ces accidents industriels n’auraient pu exister si la posture de nos représentants n’avait pas été si unanime. L’affaire du tramway, bien sûr, peut être aussi le Raquet qu’il va falloir un jour regarder de près, mais encore toutes ces petites décisions qui mises toutes bout à bout posent problème. Elles sont bien plus dommageables pour la ville que les critiques envers les élus qui, pour le coup, sont les responsables de ces décisions absurdes.

L’utilité du clivage

Le paradoxe c’est que ces dissonances sont pourtant indispensables. Rien de pire que des débats dans lesquels personne n’apporte une contradiction dont les avantages sont connus. Chacun sait qu’elle oblige à préciser ses vues et à rendre des comptes. Elle force surtout le décideur à la prudence.

On ne pourra sauver notre territoire, parce qu’il s’agit bien de cela, avec les mêmes recettes et les mêmes équipes. Il faut casser le cadre, s’émanciper de cette eau tiède qui prévoit par exemple, dès qu’un bâtiment est vacant d’y mettre des logements sociaux, des sièges d’institutions publiques locales, des piscines déficitaires ou des patinoires que personne ne demande.

On ne peut sortir Douai de l’ornière si la ville choisit les stratégies des équipes précédentes ou des politiques identiques à celles de ses voisines. Il faut une fois encore incarner la différence qui ne peut découler que d’une rupture. Car l’inefficacité des actions se fracasse sur l’absence de stratégie générale. Comment ne pas relever tous ces tournants historiques que nos élus n’ont jamais su prendre le moment venu?

Tant de virages loupés

Le ratage de la mobilité est le plus flagrant. Cela concerne le vélo qui reste à améliorer, la voiture sur laquelle nous avons tant parlé, le tramway qui est hors concours, le TER qui souffre et enfin le TGV, service public de moins en moins public.

Le ratage de l’équilibre social a commencé depuis longtemps. Il plonge ses racines dans un prêt à penser si souvent repéré. 35% de logements sociaux dans la ville et des élus qui en remettent des couches. La diversité, de moins en moins évidente, est pourtant la clé du renouveau.

Le ratage de la santé concerne tous les habitants du Douaisis. Nous avons dans cet échec, que sanctionnent nos taux de mortalité, les ingrédients de l’absence d’anticipation et de mobilisation de toutes les échelles de décision du territoire. Piscine, patinoire et boulodrome sont tellement plus vitaux.

Le ratage du numérique est le plus étonnant si on en juge par les déclarations martiales de nos représentants, Frédéric Chéreau en tête, présenté comme un spécialiste du sujet. Nos voisines se déclarent « smartcities » quand elles ne se lancent pas dans la gestion intelligente du « big data ». Mais qu’est-ce qu’on attend ?

Le ratage de la gouvernance, enfin, est au cœur de notre sujet. On pense à la manière dont Douaizizaglo® gère sa communication et, mieux encore, le débat citoyen qui précède les séances du conseil municipal, les conseils de quartier dont les délibérations sont rarement suivies d’effet.

Douaisiens, et si on passait à autre chose?

Moutons - clivage

Qui est-ce ?

qui est-ce?

Plusieurs réactions à Douai Vox tournent autour de l’identité de ses auteurs. Est-ce si important en comparaison des sujets qu’il aborde ? Evidemment non.

Il n’effleure pas la notabilité douaisienne qu’il puisse exister en dehors de son horizon des habitants concernés qui ne font partie d’aucun des réseaux d’intérêts de la ville.  Plus curieux, si on en croit certains commentaires, une parole comme la nôtre ne pourrait être que l’expression d’un groupe masqué défendant un parti politique. Ben voyons. Tout mais pas ça.

Anonymes et invisibles, n’étant rien, nous sommes libres de prendre position et de le faire savoir. Voilà la première raison d’être de Douai Vox.

Il y en a une autre que les lecteurs attentifs auront perçu sans effort. Le ras-le-bol des gâchis auxquels le peuple assiste impuissant alors qu’il en est le premier payeur, sans parler du silence pesant qui recouvre tous ces ratages.

Comme l’a justement fait remarquer le président de notre agglomération, aux affaires depuis dix ans à la CAD et depuis vingt-cinq ans dans sa mairie, les mécontents n’ont qu’à se faire élire pour décider à sa place.

C’est exactement l’objet des municipales et au-delà celui du renouvellement de Douaisis Agglo qui suivra. L’objectif très souhaitable de changer le patron avec la récente augmentation des sièges en faveur de Douai est tout à fait jouable.

Il ne sera pas dit que dans ce rendez-vous, qui est peut-être celui de la dernière chance, des citoyens libres n’auront pas, avant, fait entendre leur voix.

Loin de toute manipulation, ils ont choisi de se focaliser sur les idées plutôt que sur les hommes. Au final, l’espoir est là, c’est aussi le moyen de pousser d’éventuels candidats – reconnaissons qu’ils sont nombreux – à adopter un programme dépassant des engagements partisans qui aujourd’hui ne veulent plus rien dire.

Les remarques qui émanent de nos nombreux lecteurs démontrent que beaucoup d’entre eux, de tous bords politiques, approuvent notre propos. Ce sont la ville et son avenir qui comptent. Sur un tel objectif, le consensus est total.

Cette constatation, incertaine au lancement de Douai Vox, suscite un véritable espoir. Nous n’avons jamais douté du potentiel de la ville, ni de celui de sa région. Le problème est ailleurs. Il est chez les représentants que nous nous sommes donnés jusqu’à présent et qui ont été incapables de faire bouger les lignes.

Si c’était le cas, nous rencontrerions des multitudes de Douaisiens ravis de la situation de la cité découlant de l’action de nos élus. C’est bizarre mais c’est rarement le cas.

Allez hop ! On les change !

Un mandat si court

Un mandat si court

Il avait conduit une bonne campagne, alimentée, peut être avec l’aide de ses amis de la Région, par des propositions originales, plutôt bien calibrées. Elles répondaient aux destinées d’une ville dont les problèmes étaient si évidents que leurs solutions coulaient de source.

Bien sûr, la mise en œuvre concrète relevait d’une autre logique mais il aurait été quand même injuste de faire au candidat un procès d’intention sur une possible absence de résultats. Il bénéficierait, en cas de victoire, d’un mandat de six années pour tout faire.

On retenait ainsi la formule des « 43 000 Douaisiens qui étaient pour chacun d’entre eux des défenseurs de leur ville ». S’il y avait une erreur sur le chiffre, on appréciait malgré tout la rupture qu’un tel slogan pouvait incarner.

Jeune, sans réel passé, l’affichage politique du candidat comptait pour peu face à la promesse d’avenir qu’il annonçait. Pour beaucoup, les jours du PS local, ancien parti unique aux dérives si nombreuses, étaient comptés. On se doutait bien que le département comme la région, à bout de souffle, changeraient bientôt de main.

Une triangulaire salvatrice

Frédéric Chéreau sut se détacher de cette logique partisane avec beaucoup de finesse. Jouant habilement de sa personnalité, il ne se départait jamais d’un flegme quasi britannique, révélant même, lors des débats, une certaine aptitude à l’oral. Délivré d’une voix posée, le discours était clair, ce qui n’était pas le cas de ses nombreux concurrents dont l’insuffisance en la matière était particulièrement marquée.

La dauphine que le vieux maire lui opposait était de ce point de vue peu dangereuse. Pire, sa faiblesse la plus évidente était sans doute la certitude de la victoire. Elle avait bien essayé de marquer la différence avec son mentor mais ménager la chèvre et le chou n’est jamais une bonne chose, surtout en politique. D’ailleurs la formule du «changement dans la continuité » avait déjà été prise par d’autres en d’autres temps.

Le deuxième tour mit en face de la gauche un assemblage hétéroclite de candidats qui n’avaient, juste avant, cessé de se taper dessus. L’effet donné par l’accord improvisé de la droite fut désastreux. Plus indépendant, le candidat du FN avait mené une campagne qui se limitait, quand on l’interrogeait, à répéter le nom de la présidente de son parti à défaut de la moindre proposition précise. Sans doute pour perpétuer ce vide, il décida de se maintenir contre les deux listes encore en lice.

Une triangulaire était la configuration dont Frédéric aurait pu rêver. C’est ainsi qu’il gagna.

L’état de grâce

Un prometteur état de grâce s’ensuivit et cela d’autant plus que le nouveau maire ne bouscula pas grand-chose, conservant intacte l’administration dont il héritait jusqu’au DGS (Directeur Général des Services). C’était un peu comme si Hollande après sa victoire avait conservé Fillon à Matignon. Un conseiller, s’il en avait eu un, l’aurait conjuré de faire le ménage après les cinq mandats de son prédécesseur. Il ne le fit pas, peut-être parce que s’inscrire dans les pas du vieux monarque le rassurait. Il suffirait de faire la même chose que lui et tout irait bien.

La découverte de ses colistiers donna l’impression que la troupe n’était pas vraiment apte à l’épauler mais cela gêna peu. On avait l’habitude avec Jacques Vernier de l’exercice solitaire du pouvoir. Dans les mois qui suivirent, on vit toutefois dans les rues de Douai un adjoint chargé du commerce qui paraissait prendre son sujet au sérieux. Quant au reste, ce fut le silence, le néant. Parcourir la liste des conseillers et autres adjoints surprend encore jusqu’à aujourd’hui, on n’y connait personne.

La malédiction de l’agenda

Peu entouré, au fond très isolé, le maire éprouva dès lors, le problème de l’élu, surtout novice : la fameuse «malédiction de l’agenda». Les journées sont mangées par toutes sortes d’obligations dans lesquelles la représentation se taille la part du lion. On va chez le sous-préfet ou encore mieux à la préfecture dans la grande ville du Nord, on préside des réunions en tous genres, on reçoit une flopée de mandats aux limites de l’honorifique, on assiste aux remises de décoration, on se rend à Paris pour rencontrer Dimitri et ses collègues etc. Rien de concret, ni de conclusif dans tous ces machins mais qu’on ne s’y trompe pas, ils sont la preuve du pouvoir.

Pris dans ce rythme infernal, comme on délègue peu, les dossiers s’empilent, prennent du délai, sont mis à distance. On n’a pas le temps de penser et de poser une stratégie. On s’en remet à une administration dont le moteur est d’abord la perpétuation de son existence. Imposer la disruption à ces experts est un travail à plein temps qui réclame une énergie de très forte intensité.

mandat - choses remisent à demain

Les mois passent, les années s’écoulent. Un jour, on se rend compte que la prochaine élection approche. L’angoisse du vide saisit le maire. Il est sortant, il sera candidat. Son argument est prêt : « j’ai besoin d’un mandat de plus pour terminer ce que j’ai commencé ». On pourra gloser sur la réalité de cette dernière affirmation mais en hypothèse basse, si on commence sans finir, ce n’est pas faire.

C’est là que l’électeur déçu se pose des questions

Monsieur le maire :
Comme l’indiquait votre programme, où est donc la halle des produits frais dont vous avez parlée régulièrement durant la dernière campagne ?
Quand pourrons nous naviguer sur le canal Seine Nord que vous défendiez avec tant de vigueur devant les électeurs ébahis ?
Mais jusqu’où se prolonge ce fameux tunnel sous la gare qui devait nous permettre d’entrer facilement dans le beau quartier de la Clochette ?
A quel moment sera-t-il possible de mettre nos jeunes dans le CFA qui devait être créé bientôt, projet débattu depuis plus de dix ans ?
Avez-vous enfin rapproché Arras de notre belle ville de Douai comme le proposait fort justement votre programme électoral ?
Avez-vous rééquilibré le rapport de force interne de la CAD – enfin Douaizizaglo – pour que Douai, sans laquelle ce qui précède n’existerait pas, ait ses intérêts préservés ?
Enfin et surtout, avez-vous revitalisé le centre-ville, axe fort, essentiel, absolu de votre discours de candidat, auquel tous les habitants souscrivaient, programme si important qu’il vient de recevoir – à un an des municipales – un « développeur » dont on se demande pourquoi il n’a pas été recruté en 2014 ?

Frédéric Chéreau qu’avez vous fait de votre mandat ?

Addendum

5 septembre 2019

Nous découvrons ce jour sur RCF Radio Chrétienne le lancement de la campagne municipale de M. Chéreau. Notre maire explique comment il a traversé ce premier mandat, pourquoi il se représente et quelles sont ses ambitions pour la ville dans l’avenir.
Nos inquiétudes se confirment. Les 6 années de son mandat ont fait office d’apprentissage. Il nous le jure, nous le promet, il a tout appris, il sera maintenant efficace. Ses projets de 2014, « qu’il a regardé récemment » (peut être les avait-il oubliés) ont tous été réalisés.
Douai Vox reste sans voix, ce qui n’est pas si courant. C’est vrai, le mandat était trop court…


Le sixième mandat de Jacques Vernier

Le sixième mandats de Jacques Vernier

Tapi dans l’ombre d’une obscure opposition municipale, un jeune militant socialiste se déclara au bon moment candidat à la mairie d’une belle cité de Flandre. Peu de monde pariait sur ses chances et peut être même pas lui.

Il était unique, il le resterait

Jacques Vernier, le vieux maître de Douai, parrain redouté, passait enfin la main, après un interminable règne de trois décennies, cinq mandats complets, record absolu de l’histoire de la ville depuis les échevins du Moyen-Age.

Le monarque avait désigné sa dauphine, dame patronnesse qui paraissait rassembler tous les suffrages et dans tous les cas recevant le seul qui comptait : la désignation du chef. Ainsi adoubée, l’héritière voyait s’ouvrir devant elle un boulevard balisé en trois étapes, l’élection, la victoire, le pouvoir.

Pas de chance. Le plan ne répondit pas aux espoirs. Sans doute fatigué par la trop longue durée de la période verniérienne, attiré par la nouveauté qui a au moins l’avantage de l’incertitude, l’électorat porta au pouvoir local le jeune socialiste prometteur.

Certes, ses titres étaient bien rares, son expérience professionnelle bien légère mais son profil de jeune premier, sa constante correction, son mutisme stratégique sur beaucoup de questions lui permirent de ramasser la mise.

La dauphine avait fait bien pâle figure dans les pauvres débats qui animèrent la campagne électorale. Ses curieuses prises de parole démontrèrent aisément que ni la bienveillance quotidienne auprès des démunis, ni l’appartenance au sexe dit faible, ne suffisent à convaincre des habitants de la capacité à gérer leur ville.

Election faite, l’opinion s’interrogea sur le choix bizarre du vieux maire. On se demanda s’il n’avait pas trop écouté les conseils de son épouse. On en vint surtout à croire si, au plus profond de lui-même, il ne souhaitait pas cette issue. L’échec de son héritière était peut être le moyen de démontrer qu’il était irremplaçable. Il était unique et il le resterait.

Les apparences de l’exploit

Les premiers pas du jeune maire profitèrent d’un bel état de grâce. Il est vrai que cette victoire d’un homme de gauche sous un gouvernement de gauche possédait toutes les apparences de l’exploit. Outre la forte impopularité des socialistes à cet instant, les électeurs ont souvent l’habitude de sanctionner les candidats du même bord que le pouvoir en place.

Il échappa à ces risques, performance qui fut saluée à sa juste valeur. Il avait bien joué, profitant habilement de l’alignement des planètes. Très clairement, les votants, y compris une partie de la droite, appuyèrent le candidat qui, quoi que soutenu par les lambeaux de la gauche et de l’extrême gauche locales, avait eu la grande intelligence de conserver jusqu’au bout un discours modéré.

Il avait aussi un programme dont la teneur, pourtant bien banale, prend toute sa saveur aujourd’hui, quand on considère la réalité de sa mise en œuvre. Quant à l’équipe municipale, à part une ou deux individualités, dès le début du mandat rien ne dépassa du groupe, masse indistincte à l’épaisseur médiatique fort mince jusqu’à aujourd’hui.

Ce dernier trait ne fut pas sans rappeler l’exercice solitaire du pouvoir que pratiquait l’ancien maire lequel, d’une manière tout à fait inattendue, allait se rapprocher subrepticement de son successeur.

Flèches émoussées n’amassent pas mousse

Il y avait eu, durant la campagne, des critiques du candidat mais ces flèches s’émoussèrent bien vite. On avait entendu que si « de belles choses avaient été faites en trente et un ans », on pouvait regretter, ce qui était juste, que le sortant « n’ait pas eu de politique globale ». Plus méchant, le prétendant avait accusé Jacques Vernier d’avoir géré la ville « dans un superbe isolement » en travaillant peu avec les autres collectivités locales, région et département, ce qui était aussi injuste que faux.

Ces petits nuages se dissipèrent rapidement. Dès qu’il mit la main sur les manettes, Frédéric Chéreau, peut être un peu inquiet quant à sa capacité à saisir seul les destinées d’une ville de cette taille, conserva tous les cadres laissés en héritage par l’équipe sortante, notamment le directeur général des services (DGS), ce qui est sans exemple dans l’histoire des alternances municipales. Le nouvel édile rassura son monde d’une formule lénifiante qui serait la marque de son mode de gestion au long de ses six années de pouvoir : « Tous souhaitent rester. Nous ne leur demandons qu’une chose : un investissement fort dans le nouveau projet. »

Les années aidant et le poids des sujets s’imposant, le rapprochement entre l’ancien et le novice fut de plus en plus voyant. On en vint à se demander si le nouveau maire n’était pas, pour Jacques Vernier, le fils dont il aurait rêvé. Le premier ne ménageait pas ses efforts pour complaire au vieux sage, ravi d’être appelé à la rescousse sur tous les dossiers importants dont les chagrins notèrent qu’ils étaient surtout ceux qui n’avaient pas été réglés durant les cinq mandats du Cincinnatus des bords de Scarpe.

Le parc des vanités

Jacques Vernier, mentor du maire, obtint du conseil municipal un hommage saugrenu dont seul le général de Gaulle – il y a peut être un lien – pouvait s’enorgueillir : qu’on baptise de son vivant un lieu public de son nom. Le bon sens ou même simplement l’humilité auraient du pousser l’intéressé à décliner une telle distinction mais ce ne fut pas le cas.

Le remplacement du parc Gayant par le réseau du “tramway“, compte tenu de son coût pour la ville, aurait été mieux indiqué. Plus modeste, une station aurait pu à son tour célébrer une autre personnalité locale chère au souvenir des contribuables douaisiens. On pense bien sûr à Jean-Jacques Delille, ancien bras droit devenu traître, ardent défenseur d’un concept qui, à l’inverse de son financement bien existant, n’a lui jamais vu le jour.

Sauvons Douai

sauvons douai

C’est dans ces termes, et pas autrement, qu’il faut aborder les municipales qui s’annoncent à Douai. Dans le groupe bien fourni des élus qu’ils se donnent, les Français plébiscitent leur maire.

Ils savent que le patron de la cité dispose d’un pouvoir immédiat sur leur vie quotidienne mais plus encore sur l’avenir de la ville où ils habitent.

Ils savent qu’entre l’action d’un idiot et celle d’un intelligent, la distance peut être considérable, en gros celle qui sépare le succès du désastre.

Ils savent surtout, au final, que s’il revient aux premiers de décider, ce sont d’abord les habitants qui supporteront les conséquences de leurs choix ou, pire, de leur absence de choix.

Pour ces raisons sans doute, le moment des élections municipales est celui où on regarde un peu plus précisément l’état de sa commune. Celui de Douai n’est pas brillant. Il est d’ailleurs rare de rencontrer un habitant qui soit heureux de la situation de la ville. Si un de nos lecteurs en connait un, qu’il nous le présente. Nous serions heureux d’entendre ses arguments.

Bien sûr, il serait idiot de ne pas reconnaitre les effets de l’évolution du pays, de notre région, du désastre que représente, pour les villes moyennes, une mondialisation qui concentre la richesse en quelques endroits pour abandonner au reste le strict minimum.

Si la plainte des Douaisiens peut être parfois excessive, on aura du mal à leur donner tort, tant le constat est sévère. Regardons les devantures vides du centre ville, la baisse régulière de la population qu’accompagne, année après année, son inexorable appauvrissement. La comparaison avec la situation d’il y a trente ans est cruelle. Que sont devenues les activités d’antan, l’énergie qui animait nos quartiers ? Où est donc passée la locomotive économique du Douaisis ?  

Tout prouve que le déclin s’est peu à peu imposé, qu’il est à présent évident et massif, sans qu’aucune équipe municipale n’ait jamais été capable, depuis des décennies, de l’arrêter.

Pourtant – sinon ces lignes n’existeraient pas – rien n’est dit, rien n’est fait. Il est encore temps de réagir. Il est encore possible d’installer une politique municipale digne de son nom, une politique qu’on rêve active et visionnaire. D’autres, ailleurs, y sont parvenus. D’autres ont été capables d’inscrire un nouveau cours, avec l’idée de la rupture et la volonté de tout changer. Pourquoi Douai n’y aurait pas droit ? Pourquoi serions nous tous condamnés à subir la loi générale et la bêtise des élus ?

Un rebond est-il possible ? Peut-on imaginer l’obtenir avec les nombreux candidats qui se poussent aujourd’hui au portillon d’une élection dont tout démontre qu’elle sera incertaine ?

Peut-on faire le pari que ces noms déjà connus, peut être même un peu usés, dont les Douaisiens n’ont pas voulu dans le passé, seront la clé du changement tant espéré ?

Rien n’est moins sûr. Il faut se persuader que ces élections seront pour Douai celles du sursaut vital. Une chose est certaine : si ces élections ne permettent pas de désigner une équipe capable de réaliser le retournement positif qu’attendent tous les Douaisiens, l’avenir de notre ville sera sombre.

Observateurs et acteur de la politique locale, nous nous proposons, dans ce blog, d’analyser et même de participer à la campagne qui s’ouvre, en espérant alimenter le débat qui est nécessaire à toute échéance électorale mais qui parait parfois à Douai bien limité.

Car oui, nous pouvons, tous ensemble, sauver Douai et pour une fois, prouvons le !